Mois : octobre 2022

Beijing Architecture (北京建筑)

Beijing Architecture (北京建筑)

En cette période du XXième congrès de Parti Communiste Chinois, Pékin est entourée d’une frontière invisible, mais pourtant bien réelle, un peu comme ces boucliers protégeant les villes futuristes des films de science-fiction. Voyant le verre à moitié plein, nous profiterons de ce passage en Chine pour explorer Pékin au maximum, et heureusement il y a de quoi faire!

En effet, la mégalopole chinoise n’en finit pas de nous étonner par sa richesse architecturale si contrastée: l’ultra moderne côtoie des monuments phare de l’Histoire de la Chine, ainsi que l’âme de Pékin avec ses Hutongs. Nous repartons ici dans les rues de la capitale chinoise, pour découvrir son architecture. Il nous faudra pour cela parfois lever les yeux très haut dans le ciel, ou chercher un recoin caché d’un Hutongs. Il ne s’agit que d’un minuscule pan de la ville, je ne pourrai prétendre déjà tout connaître ni tout résumer dans ce simple texte. J’en profite pour remercier notre ami Quentin, qui a contribué au reportage photo que vous allez découvrir ici 📸.

Mais d’abord, je voudrais vous partager notre perception des changements profonds opérés à Pékin ces dernières décennies. Comme nous l’avons vu il y a quelques mois, Pékin a 7️⃣ périphériques (et ouai, nous sommes de petits joueurs avec notre périphérique parisien + A86 + N104). Le premier périphérique est en réalité l’enceinte de la Cité Interdite. Nous habitons juste derrière le troisième périphérique (ce qui est toujours considéré comme faisant partie du centre de Pékin!).

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le point rouge en haut à droite, c’est chez nous!

Pour imaginer cette vitesse de l’extension de la ville de Pékin, dites-vous que les 3ième périphérique a été terminé à la fin des années 90. Pour faire simple, il y a 20 ans, à la place de notre immense résidence, il y avait des champs et des vaches 🐮. C’est comme tout ici: on construit vite, on voit tout en grand, tout est toujours démesuré. Nous n’étions pas là pour le voir, mais les français installés ici depuis des années (des héros à nos yeux) nous décrivent aussi un changement opéré depuis quelques années consistant à remplacer l’ancien par du nouveau. Il ne s’agit de rénover une habitation ou un magasin, mais de raser ce qui fait l’âme de Pékin, par du moderne aseptisé. Les petites échoppes traditionnelles sont remplacées par des banques 🏦 ou des salons de coiffure💈 (ne me demandez pas pourquoi), une grande partie des Hutongs ont été rasés pour être remplacés par des immeubles de 40 étages 🌇. Oui il faut loger tout le monde, oui il faut vivre avec son temps, mais à quel prix? Un autre exemple de cette ville ayant grandi trop vite, c’est le plan du métro 🚇, qui n’est absolument pas pratique. Les stations sont toujours loin d’où l’on doit se rendre, les stations sont éloignées entre elles, et les interconnexions sont mal pensées. Le métro pékinois est en quelques sortes plus comparable au RER parisien qu’à son métro.

Revenons à l’objet de cet article. Comme dans d’autres mégalopoles chinoises, Shanghaï pour ne pas la citer, Pékin est fait de contrastes entre l’ultra design, l’historique, et l’authentique que j’associerais à pauvre aussi. Oui, le contraste est aussi très fort au niveau des richesses: Pékin fait partie du top 10 des villes les plus chers de la planète (ou 20, selon les classements), mais il y aussi beaucoup de très pauvres. Du point de vue du contraste architectural, un exemple bien connu ici illustrant cela est cette célèbre photo offrant un point de vue sur le très design Galaxy SOHO, construit au milieu des vieux Hutongs.

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Galaxy SOHO au milieu des Hutongs

Vu de l’intérieur, c’est d’ailleurs digne d’un décor de film de science-fiction.

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Il y a en fait 3 ensembles SOHO de ce type à Pékin, au style ultra moderne dessiné par la célèbre architecte Anglo-Irakienne Zaha Hadid. On y retrouve des magasins (il y a à Pékin une incitation permanente à la consommation), des bureaux, et autres lieux de divertissements. Un autre de ces trois SOHO est le Wangjing SOHO, au look tout aussi improbable.

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Wangjing SOHO

Wangjing est aussi appelé le Koreantown 🇰🇷 de Pékin. Et oui, partout dans le monde on a des Chinatown, et ici il faut bien trouver autre chose! Ce quartier a aussi ses grandes tours, qui enfilent leurs robes de lumière le soir. Il n’y a pas à dire, les Chinois sont très forts pour les illuminations de nuit.

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Les tours de Wangjing

C’est d’ailleurs étrange de s’émerveiller devant ces illuminations 💡 (c’est vraiment beau Pékin de nuit), alors que récemment sur France Inter j’entendais qu’il était question de ne plus faire d’illuminations pour Noël, à l’heure de la crise énergétique (et écologique!). Mais qui sommes-nous pour avoir bien profité pendant des décennies, avoir donc bien contribué à cette crise, et pour donner des leçons de sobriété aux pays qui ont pris leur élan après nous? Enfin bref, revenons à notre sujet, c’est beaucoup plus léger!

Toujours dans la thématique de l’architecture design, la CCTV tower est l’emblème du nouveau Pékin. Conçue par l’architecte néerlandais Rem Koolhaas, cette tour défiant les lois de la gravité, abrite le siège de la télévision centrale chinoise 📺. Notamment en raison des risques de séisme, sa construction fut considérée comme un défi d’ingénierie. Sa forme unique lui fait valoir le surnom dà kùchǎ (大裤衩), signifiant « gros pantalon ».

Dans ce même quartier d’affaires de Guomao 🏙, le CBD pour Central Business District, se trouve un fameux gratte-ciel à la forme singulière: le China Zun (中国尊). Son nom vient du zūn, un ancien type de vase chinois en bronze qui inspira le style architectural de l’édifice. En temps normal il est possible de monter jusqu’au 108ième (et dernier) et étage, où une terrasse d’observation doit offrir une vue à couper le souffle sur la capitale. Mais restriction COVID oblige, elle n’est pas accessible. Mais vue d’en bas, cette tour donne aussi le vertige!

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Pour la petite histoire, nous voyons cette tour China Zun de notre salon (j’avoue que ce n’est pas désagréable comme vue, surtout le de nuit 🌃), et elle nous sert d’indicateur du niveau de pollution: si nous la voyons mal, voire pas du tout, c’est qu’il y a un pic de pollution.

Finalement, le CBD est le symbole moderne de Pékin, une des images typiques que l’on pourrait envoyer par carte-postale. J’aime d’ailleurs beaucoup ce contraste que l’on voit sur la photo ci-dessous, prise depuis la colline au Charbon avec le CBD en arrière-plan.

Pékin n’en reste pas là sur le thème des constructions audacieuses et futuristes 🛸. Au sud de Chaoyang Park, qui est un peu le Central Park de notre district, se trouve le Chaoyang Park Plaza, conçu par l’architecte Chinois Ma Yansong. Les formes des bâtiments ont été dessinés de façon à faire écho à ce que l’on retrouve dans les paysages naturels et les peintures traditionnelles chinoises, et réintroduisent ainsi la nature dans le domaine urbain. Ce n’est cependant pas exactement ce qui me vient à l’esprit en voyant cette construction, mais elle a le mérite d’être très atypique.

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Chaoyang Park Plaza vu depuis l’autre côté du lac de Chaoyang Park

Non loin de là, toujours aux abords du sud de Chaoyang Park, se trouve cette drôle de construction en forme de Donut 🍩, le Phoenix Center, ou Phoenix television. Cette construction est surtout impressionnante vue de l’intérieur, mais malheureusement il n’est pas possible d’y rentrer depuis plusieurs mois, à moins de travailler pour la chaîne Hong Kongaise évidemment.

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A l’ouest de la place Tian’Anmen, une autre construction étrange ressemblant cette fois-ci à un Oeuf posé sur l’eau mérite le détour 🥚💧: le National Centre for the Performing Arts 🎶 (NCPA pour les intimes). Cet opéra démesuré est l’oeuvre du Français Paul Andreu 🐓.

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Changement de décors pour un autre symbole de Pékin: les Hutongs. Les Hutongs, ça grouille de vie (ou plutôt ça grouillait, il paraît qu’avant c’était beaucoup plus animé qu’à présent), mais ce sont aussi de vieux vélos ou scooters garés en vrac 🚲🛵, ce sont des oiseaux 🐦, vestige du Pékin d’autrefois où les soldats en attente d’être appelés s’occupaient aux jeux et en faisant de l’élevage d’oiseaux, et puis on y joue, on y crie, ou on y fait la sieste. L’oisiveté d’antan est toujours un peu présente dans les Hutongs…

Dans les Hutongs on ressent aussi un fort sentiment nationaliste chinois, notamment avec les drapeaux accrochés à côté de chaque porte 🇨🇳. Nous avons des amis installés dans les Hutongs, et à la veille de la fête nationale début octobre (la Golden week), le comité de quartier a fait le tour des habitations pour s’assurer que chacun accroche bien un drapeau à sa porte. Nos amis (Français) n’ont pas eu d’autre choix que d’acheter un drapeau chinois (c’était le plus neuf de la rue!), le comité de quartier ayant un pouvoir de nuisance non négligeable, comme faire passer le health kit, précieux sésame du quotidien, du vert au rouge sans aucune raison. Chiche qu’ils feront mettre un drapeau français à leurs voisins pour le 14 juillet 🇫🇷!

On aime jeter un oeil au travers des portes pour deviner comment c’est à l’intérieur, et on y trouve de tout: des Hutongs joliment rénovés, du bric à brac, des Hutongs dans leur jus 🏮.

Où on aime simplement s’arrêter devant les portes closes🚪, car elles sont toujours étonnantes, très joliment ornées, le plus souvent du rouge typiquement chinois.

Mais les Hutongs, ce sont aussi des toits en quinconces, parfois avec des volières au milieu, qui renforcent le sentiment de dédale et de bouillonnement de la vie pékinoise. Si ça n’avait pas été si compliqué de se rendre au lycée d’ici, c’est là que j’aurais voulu habiter! Attention toutefois, car mis à part pour les hutongs rénovés, il n’y a pas d’autres sanitaires que les WC publiques dans la rue 🚻, et ces hutongs sont souvent si mal isolés que l’hiver, très rude à Pékin, il faut garder le gros manteau aussi bien dehors que dedans 🥶.

Pékin est aussi LA ville qui a accueilli les JO d’hiver ET d’été🏅(la Chine en est d’ailleurs très fière). Cela a par conséquent laissé une empreinte architecturale plutôt chouette, comme le stade national de Pékin, surnommé aussi le « Nid d’Oiseau ». C’est là que ce sont déroulées les épreuves d’athlétisme, mais aussi les cérémonies d’ouverture et de fermeture des JOs.

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On retrouve aussi la Tour d’Observation Olympique, mais dont la construction n’a commencé qu’en 2011, soit 3 ans après les JO 2008. Son rôle n’est que de faire de l’observation, rien d’autre. Elle est située sur l’Olympic Green, où l’on voit aussi ci-dessous le Nid d’Oiseau, le « Cube » (le centre national aquatique de Pékin, en blanc à droit sur la photo), et la tour de diffusion des médias pour les JO (la tour ressemblant à un empilement de toupies).

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Mais comment parler d’architecture pékinoise sans évoquer un autre symbole, qui n’a nul autre pareil: la Cité Interdite 🚫! Je présume que vous seriez curieux de lire un article à ce sujet, encore un peu de patience, car nous ne l’avons visitée qu’une fois, ce qui est bien trop peu pour commencer à en percer ses mystères. Mais en attendant, voici un magnifique panorama depuis la colline du charbon, où l’on aperçoit aussi plus loin sur la droite l’Opéra de Pékin.

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Un autre cliché célèbre à prendre à Pékin est cette vue prise à l’un des angles nord de la Cité Interdite, à l’équilibre symétrique parfait.

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Bien évidemment à Pékin on trouve une multitude de temples. On ne peut jamais vraiment les dater, dire s’ils sont très anciens ou pas. En Europe nous prêtons une grande attention à la façon d’entretenir, voire de restaurer nos monuments anciens, pour ne pas impacter leur authenticité (il n’y a qu’à regarder tous les débats autour de la reconstruction de la flèche de Notre-Dame de Paris). Ces temples ont par contre une caractéristique commune que nous aimons beaucoup: la forme élancée des toits, avec leurs tuiles vernissées . Toujours du rouge et du doré, mais aussi du vert et du bleu.

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On y voit ici un dǒugǒng (斗拱), un élément architectural spécifique au monde chinois, basé sur un emboîtement de supports en bois. Servant au début à fixer les structures des toits sur des piliers et des colonnes, ils évoluent avec le temps pour devenir un ornement. C’est un des éléments les plus importants de l’architecture chinoise traditionnelle.

Tous ces temples que nous pouvons visiter ici sont de forme rectangulaire, sauf un temple très célèbre, presqu’autant que la Cité Interdite, et qui est aussi un véritable symbole de Pékin: le temple du Ciel. Il est considéré comme l’achèvement de l’architecture chinoise traditionnelle. La croyance chinoise symbolisant la Terre de forme carrée, et le Ciel de forme ronde, l’architecture ici est faite d’enceintes carrées avec des tuiles de couleur verte qui symbolisent la terre 🌍🟩, de bâtiments ronds avec des tuiles de couleur bleue qui symbolisent le ciel 🌈🔵. Ici aussi, il nous faudra y revenir, car ce genre d’endroit est trop immense pour être visiter complètement en une seule fois, surtout avec des enfants.

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Temple du Ciel

Et pour finir, n’oublions pas que le Communisme a aussi laissé sa trace sur l’architecture pékinoise, surtout aux abords de la place Tian’anmen 🪖. Le Palais de l’Assemblée du Peuple en est sans doute le meilleur représentant.

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Le Parlement

Je ne vais évidemment pas commenter plus ce sujet du congrès du PCC, qui commence aujourd’hui, mais pour les curieux que vous êtes, je vous propose d’écouter quelques Podcast pour mieux comprendre le contexte dans lequel nous vivons, notre réalité. Sur l’application Spotfy:

  • il y bien entendu « Les Chroniques d’Eric » (qui est d’ailleurs l’auteur de « Robinson à Pékin », dont nous avons parlé dans Robinsons à Pékin 2.0. ): épisodes du 14 octobre et du 14 septembre 2022
  • mais aussi « L’Heure du Monde »: épisode du 13 octobre
Yunnan (云南) – Voyage sur les rives tropicales du Mékong

Yunnan (云南) – Voyage sur les rives tropicales du Mékong

Je n’ai jamais mis autant de temps pour un article… entre la reprise du travail et la rentrée des classes, je n’ai plus beaucoup de temps pour écrire 🥱. On va dire que c’est juste le temps de se remettre dans le rythme. Mais j’espère surtout que cet article ne sera pas trop décousu, car difficile de garder le fil conducteur en écrivant 3 lignes tous les 3 jours 🤷🏻‍♀️.

Ça y est, notre road trip dans le nord-ouest du Yunnan touche à sa fin, et nous reprenons l’avion ✈️ pour la région autonome du Xishuangbanna (signifiant « 12 000 rizières » 🌾), plus précisément pour la ville de Jinghong.

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Grande comme la Belgique, cette région frontalière du Laos et de la Birmanie (Jinghong n’est qu’à 30km de sa frontière!) représente ce que la Chine a de plus tropical 🌞🌴💦. Eh oui! Même si nous ne pouvons pas passer les frontières chinoises (enfin si c’est possible, mais bonjour le parcours du combattant pour revenir), ici on se sent dans ce que l’on imagine de la Thaïlande, du Vietnam, et du Laos. Et le mythique fleuve Mékong y contribue beaucoup, avec ses rives bordées par la jungle, les odeurs de nature après la pluie, l’air chargé d’humidité, on se croirait dans un décor de film se déroulant au Vietnam! Venant du Tibet, le Lancang Jiang (c’est le nom chinois du Mékong) traverse du nord au sud cette province verte de la Chine, puis vient marquer une frontière naturelle entre le Laos et la Birmanie, avant de s’enfoncer dans l’ancienne Indochine.

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Cette région est habitée principalement par la minorité des Dai, cousins germains des Thaïs. Ce « pays à dos d’éléphants » (comme on l’appelait autrefois) était leur royaume jusqu’en 1953. La culture des Dai est similaire est celle du peuple Thaï, de par l’architecture des maisons, la façon de prier dans les temples bouddhiques, la langue (à l’oreille c’est très différent du mandarin), et l’écriture.

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Nous sommes arrivés en début de soirée dans notre hôtel, situé le long du fleuve et en plein coeur de Jinghong. Après les 10 jours où nous étions finalement très isolés du tourisme de masse et où nous étions dans des petites villes plutôt authentique, le changement de décors est assez brutal: de hauts immeubles lumineux aux formes rappelant les tropiques 🌃🍍🌴, des lumières multicolores, des voitures de luxe à louer pour une balade, et surtout du bruit et du monde.

Mais ce que nous apprécions vraiment, c’est cette vue de nuit sur le Mékong, qui offre un panorama venant parfaire le plaisir de voyager.

Nous partons à la recherche d’un endroit pour dîner. La réception de l’hôtel (où personne ne parlait anglais, la semaine s’annonce challenging sur le plan de la communication 😅), nous avait conseillé un restaurant très populaire dans le marché de nuit juste à côté. Même si ce marché de nuit est un des lieux incontournables de Jinghong 🎆, nous y retournerons en journée, ça sera plus calme 😱.

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Couleurs et lumières au-dessus du très fameux marché de nuit de Jinghong

(plus tard nous sommes donc retournés de jour au marché de nuit. Evidemment presque tout était fermé, mais cette allée très colorée est très agréable, on y fait volontiers un petit détour, comme je le faisais autrefois en rentrant à la maison pas Gare de Lyon, où je faisais un détour par la rue Crémieux)

Il y a aussi le marché de nuit version locale, nous expliqua cette jeune chinoise qui a marché une bonne heure avec nous le long du quai du fleuve, trop contente qu’elle était de pouvoir pratiquer son anglais. Ici on retrouve des odeurs qui caractérisent tant cette Chine tropicale, des odeurs de nourriture dont nous ne préférons pas connaître les ingrédients, et de fruits si délicieux!

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Le lendemain, le programme promis aux enfants est: piscine, piscine, et puis si on a le temps, on ira à la piscine 🥳. Bref, ne rien faire en vacances, c’est pas mal non plus. C’est aussi l’occasion de déambuler un peu dans la ville, et de nous faire une meilleure idée des Chinois en vacances. La fameuse étoile ayant disparu pour tout le monde (voir mon article Fichue étoile! ), tous les chinois en profitent pour voyager (et ils ont eu bien raison! Car ça s’est bien gâté en août). Ce qui fait qu’en comparaison d’ici, la côte d’Azur en plein mois de juillet a des allures de port de pêche du Finistère Nord au mois de novembre (j’exagère un peu, mais pas tant que ça 😁). Les chinois en vacances (et je m’excuse auprès de mes amis chinois qui peut-être me lisent, mais c’est réellement ce que nous avons ressenti), c’est comme des ados en colo! La journée ils ne font pas grand-chose à part manger, se prendre en photo et dépenser de l’argent (ici c’est très important de dépenser beaucoup d’argent en vacances, regardez aux Galeries Lafayette à Paris quand ils pouvaient encore voyager!), donc le soir (et la nuit 😡), ils sont en super forme! Globalement (et ça c’est valable toute l’année), les chinois sont assez bruyants, et ici en vacances, c’est encore pire.

Je vous fais donc une petite parenthèse d’Histoire. En effet, une explication que l’on nous a donnée sur le fait d’être si bruyant ici serait un héritage de la révolution culturelle, période très sombre de l’Histoire de la Chine du XXième siècle. Initiée par Mao Zedong, la révolution culturelle a été lancée afin de purger le Parti Communiste Chinois (PCC) de ses éléments « révisionnistes » et limiter les pouvoirs de la bureaucratie. De nombreux massacres ont alors été perpétrés, notamment lors de rafles pendant la nuit, pendant le sommeil des gens. Une habitude consistant à faire du bruit a donc été prise, afin de décourager ces rafles (difficile d’être discret dans ces conditions).

Revenons à présent à Jinghong. Là où nous nous trouvons, nous sommes en plein coeur du quartier de Gaozhuang Xishuangjing. Ici, c’est la folie des grandeurs, version chinoise. Un immense quartier sorti de terre en moins de 15 ans et entièrement dédié aux divertissements de la nouvelle bourgeoisie chinoise. Dans ses rues, on trouve des hôtels de luxe (quoi que pour beaucoup, comme par exemple le nôtre, passé l’effet Waow, on voit vite que c’est beaucoup dans l’apparence uniquement, et que c’est souvent mal entretenu), des boutiques de luxes (en vacances, je vous l’ai dit en Chine il est important de pouvoir dépenser de l’argent), des restaurants (et oui, les chinois mangent tout le temps!), des marchands de thé 🫖🍵 (nous sommes très proche de la ville-préfecture de Pu’er, célèbre pour son thé), et des marchands de Durian. Le Durian est un fruit de la taille d’un ballon de rugby, hérissé d’épines. Il est aussi très connu pour son odeur pestilentielle (il est par exemple interdit d’en consommer dans le métro). Les asiatiques pourtant en raffolent, mais nous n’avons toujours pas compris pourquoi 🤢.

Dans les rues, on trouve de tout, comme ces scooters ressemblant à des toutous, certains étant même disponible en version side-car, et le mieux étant d’en trouver un assorti à sa robe, ça donne mieux en photo 💃🏻👗.

Ou des travaux, où il vaut mieux avoir un bon équilibre…

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Ou encore ces rues, où règne un fourmillement permanent, ce genre d’endroit où l’on ne voudrait pas vivre et pourtant où l’on adore aller car c’est ici où est la vraie vie de la ville, et non cette vitrine complètement fake pour les vacanciers.

C’est aussi dans ces rues que l’on trouve toujours des endroits improbables pour manger (ben oui, nous aussi on doit se nourrir de temps en temps), même si pour commander c’est toujours un véritable challenge! En fait les cartes avec images c’est vachement bien. Mais au jour d’aujourd’hui, tout se fait par WeChat, y compris pour commander au resto, et ça c’est beaucoup moins intuitif quand c’est complètement en chinois…La modernité n’a pas que des avantages. On a dû leurs faire pitié, car ils nous ont trouvé une ancienne carte, et un client est même venu faire l’interprète… un échange d’une photo de sa soeur avec Constance 😅.

Et comme tous les soirs, ça n’est pas la peine de commander un taxi comme à Pékin, ici c’est à l’ancienne, en hélant le premier taxi qui passe 🚖. Nous aurions voulu louer des scooters (les enfants auraient adoré aller dans un side-car), mais sans carte d’identité chinoise c’est assez compliqué, voire impossible ☹️.

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Pour notre deuxième journée dans le Xishuangbanna, le programme nous conduit à la Vallée des Eléphants 🐘. Elle se situe à environ 30km au Nord de Jinghong, en bordure d’une réserve naturelle protégeant la forêt tropicale et les éléphants sauvages. Xishuangbanna est la seule région où résident les éléphants sauvages de Chine et la Vallée des éléphants sauvages le seul endroit où l’on peut les observer, bien que la rencontre ne soit pas certaine. La preuve… nous ne les avons pas vu ! En effet, ils détestent le bruit, dommage quand on est en Chine 😂 ! Et puis ils sont malins, il faisait si chaud qu’ils ont préféré aller se mettre au frais dans la forêt! Quand on parle de jungle ou de forêts, ici il s’agit surtout de forêts d’hévéas. Cette essence d’arbre a sans doute beaucoup de qualités, mais elle n’en est pas moins néfaste d’un point de vue écologique, car elle est responsable en grande partie de la déforestation en Afrique et en Asie du Sud-est, la demande en caoutchouc naturel étant de plus en plus importante.

Nous avons pourtant deviné la présence des éléphants, avec les énormes empreintes de pas que nous pouvions voir en contre-bas dans la boue, le long de la rivière, ainsi que par la taille de leur excréments (et ouai! 💩). Une soixantaine d’éléphants sauvages résident ici. Ils s’approchent très occasionnellement des humains. Un sentier aérien en bois de 2km s’étend le long du parc et permet aux touristes de parcourir une partie du parc depuis les airs.

A défaut d’avoir vu des éléphants sauvages, nous avons vu un singe 🐒 et un paresseux 🦥 accrochés dans les arbres. Ils n’étaient pas difficiles à trouver, il suffisait de lever les yeux quand on voyait un Baoan 👮‍♂️ montant la garde à côté d’un arbre. Pour ceux qui ont vu Zootopie, un paresseux ça se déplace réellement au ralenti, encore pire qu’Augustin au réveil!

Un spectacle d’éléphants domestiqués était aussi donné dans le parc, pour le bonheur des enfants. Ce genre de spectacle, où qu’il soit, ne nous plaît pas forcément, question de valeurs, mais les enfants étaient contents, et on pourra dire que nous avons vu les éléphants du Xishuangbanna ✅.

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Dans ce parc, parmi les animaux que nous pouvions voir, pas toujours dans des super conditions d’ailleurs…, il y avait une énorme volière à papillons. Des papillons par centaines 🦋, qui se posaient même sur nos têtes, nos mains, sans aucune crainte, alors que nous n’avions qu’une peur, c’était de frôler leurs ailes, car me semble-t-il ça n’est pas très bon pour eux.

Après cette longue journée sous un soleil de plomb, les enfants n’ont qu’une envie… la piscine évidemment! Nous avions dans l’hôtel une chambre familiale (décorée sur le thème de Saint Exupéry), donnant sur la piscine, pour le plus grand bonheur des enfants! Un peu moins pour nous, car vous vous en doutez, c’est bruyant quand certains décident de se baigner tard. Mais, cette semaine est la semaine des enfants 👦🏼👧🏼.

Par contre du point de vue de l’intimité, c’est assez moyen. L’intimité est beaucoup moins un sujet pour les Chinois que pour nous. Ça n’en reste pas moins délicat, et ça l’est encore plus quand dans notre chambre, la porte des toilettes et de la douche est en réalité une vitre, et que cette porte fait directement face à la fenêtre de la chambre, qui donne… sur la piscine!

Le jour suivant, un programme bien chargé nous attend encore. Nous nous rendons d’abord au magnifique jardin botanique de Menglun. Il s’étend sur une petite péninsule encerclée par la rivière Lupsuo, à proximité de la ville de Menglun, à 70km à l’Est de Jinghong. Ce jardin botanique a été fondé en 1959, par Cai Xitao, un botaniste chinois réputé, et couvre une superficie de 900 ha. Avec une collection de plus de 12 000 espèces botaniques domestiques et introduites, c’est le plus grand jardin botanique tropical de Chine. Le jour de notre visite, il pleuvait des cordes ☔️. Mais finalement, ça nous va très bien, car la pluie mélangée à la chaleur accentue encore l’ambiance tropicale, et fait encore plus ressortir ces odeurs de la nature. Et cerise sur le gâteau 🍰, nous pouvons profiter tous seuls à pied du parc (on avait nos k-way), la plupart des gens préférant parcourir le parc abrité dans des golfettes.

Rien qu’à regarder à nouveau ces photos je sens encore ces odeurs de nature tropicale humide. Ça me transporte dans les pays d’Asie du Sud, si proches et pourtant encore inaccessibles.

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Nous avons vu aussi un arbre à durian, même d’en bas on pouvait sentir cette odeur horrible (je ne pas la décrire, mais vraiment ça sent mauvais). La pensée de cette odeur me transporte plutôt dans les rues du vieux Jinghong, étroites, sales et pleines de monde, avec des étals de fruits et de gros cageots de durians.

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Pour le déjeuner, ici pas de jambon beurre, mais des hot pot, ces pots de bouillon à base de nouilles et de viande 🍜. Pour accompagner, un délicieux jus de fruit de la passion 🥤, comme on en trouve partout dans cette région. Ici les fruits de la passion, qui sont jaune à l’extérieur, sont beaucoup moins acide que les violets que l’on peut acheter chez nous. Nous aurions aussi pu prendre du jus de noix de Coco 🥥, fraîchement préparée. Constance, dans sa volonté de manger avec les yeux, a plutôt opté pour une saucisse de canard. C’est un peu comme les fricadelles, je préfère ne pas savoir comment c’est fait…

Après ce repas, nous préférons encore repartir à pied, la file pour avoir une place dans une golfette étant très dissuasive 🛺.

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Nous retrouvons un peu plus tard notre chauffeur, et faisons route, toujours le long du fascinant Mékong, vers Ganlanba, bout de campagne au milieu des rizières, essentiellement peuplé par la minorité Dai. Dans ce parc dédié à la culture Dai, on peut trouver quelques villages typiques, mais comme souvent ici « nos pas ne peuvent quitter le chemin balisé ». Comme dans tous les lieux un peu touristiques, on ne va pas où on veut comme on veut (pas grave, on reviendra tous seuls la prochaine fois, il paraît que c’est encore mieux de parcourir ces campagnes à vélo, pour voir « les vrais gens »). Au milieu de Ganlanba, nous avons pu visiter un superbe temple bouddhiste en bois, enclave de sérénité comme on peut en voir tant dans cette région de Chine.

Avec en prime une comparaison de l’écriture Dai avec les caractères chinois (et des filles beaucoup moins ordonnées que les garçons! 👟😂).

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Un peu plus loin nous pouvons voir un autre temple bouddhiste en bois, ainsi que son stupa. Comme tous ces lieux, il s’agit encore d’un véritable havre de paix. Nous y croisons d’ailleurs quelques moines, certains à priori à peine plus âgés qu’Augustin, se dépêchant pour ne pas arriver trop en retard pour la prière. C’est amusant de voir ces moines en tenue traditionnelle, le kesa, et de grosses baskets, style Nike Air.

Pour finir cet après-midi dans l’univers Dai, on nous a conseillé d’aller voir « la Fête de l’eau ». Sans savoir vraiment de quoi il s’agit, nous suivons la foule (oui parce qu’ici dans le Yunnan, il y a encore moins de monde parlant anglais), en pensant bien que tout le monde s’y rendait (ça semblait être un évènement très populaire)

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Nous arrivons donc sur une grande place, entourée d’échoppes et de bancs (déjà bien pleins), et au milieu une grande fontaine. On ne sait pas trop quoi faire, on se dit alors que l’on va attendre, comme tout le monde. Quelques enfants, certains en combinaison de piscine et munis de bassines ou de pistolets à eau 🔫, commencent à essayer de s’approcher de l’eau, mais ils se font à chaque fois refouler par des « vigiles ». Cela ne nous étonne pas vraiment, il y a des fois des interdits pas toujours très logiques (car par cette chaleur, un peu d’eau aurait fait du bien!). De plus en plus de monde arrivait, et beaucoup avec des récipients et des pistolets à eau (d’ailleurs il y avait quelques marchants de pistolets à eau un peu plus loin). Mais que se passe-t-il ici? Il y avait aussi cette ligne au sol, faisant un cercle plus large autour du plan d’eau, derrière laquelle la plupart des gens se mettaient pour attendre… Et puis à un moment, après un discours biensûr incompréhensible pour nous, ils se sont tous jetés à l’eau 💦!

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Par la suite, nous avons compris que la Fête de l’eau correspond au Nouvel An Dai, qui est une déclinaison locale du Songkran thaïlandais. Ayant lieu mi-avril, le Nouvel An Dai se déroule sur 3️⃣ jours: le 1er jour se tient un marché géant sur les berges du Mékong, le 2ième se tient une course de bateaux dragon et des spectacles de danse et de musique. Enfin, le 3ième jour c’est l’apothéose: pour appeler la pluie bienfaitrice, les participants s’arrosent à coups de grands seaux d’eau, de pistolets à eau, de jets et bombes à eau. Ils rendent ainsi hommage à Nang Thorani, déesse de la Terre qui tordit sa chevelure pour en faire jaillir des torrents d’eau capables d’engloutir les armées du démon. En plus, plus on est mouillé, plus on aura de chance dans l’année!

Après cette journée haute en couleurs, nous avions une folle envie… de manger « western ». La nourriture chinoise est vraiment délicieuse, mais il y a des moments où en fait non, on sature, on a besoin de revenir vers nos repères. A Jinghong le choix pour dîner western n’est pas très varié, le choix se limite rapidement à des pizzas ou des burgers. TripAdvisor nous amène donc dans ce Bistro digne d’un décor de film américain, tenu pour un Canadien « Jim » 🇨🇦. Mais quelle bonne soirée! En Chine, nous sommes si peu d’étrangers que rapidement on se met à discuter ensemble pendant des heures, on échange nos WeChat si jamais nos chemins devaient encore se croiser, une véritable solidarité se crée sans rien attendre en retour.

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Finalement tous les soirs on choisissait de manger Western, ce qui nous a d’ailleurs conduit le vendredi soir dans un autre restaurant (tenu par un Hollandais 🇳🇱 si je me souviens bien, et qui brassait sa propre bière!) au milieu d’une grande tablée de « Laowai » (terme pour désigner les étrangers non-asiatiques en Chine) ayant pour habitude de s’y retrouver tous les vendredis soir. C’était fabuleux cette soirée à discuter avec des Américains 🇺🇸, des Australiens et des Néo-Zélandais 🇦🇺, et même un Suisse avec un style improbable de soixante-huitard chic. Gérard, le Suisse🇨🇭, nous a expliqué être arrivé ici il y a 18 ans, alors qu’il n’y avait encore presque rien, sauf de grandes forêts d’hévéas. Il a donc décidé de planter une jungle (oui oui, vous avez bien lu). Au milieu de sa propriété, où l’on retrouve je ne sais plus combien d’essences différentes, il tient 5 chambres d’hôte dans des cottages, tout en bois, où parfois même des singes s’invitent 🐵. Nous avons définitivement envie d’y revenir le temps d’un week-end long ou pourquoi pas pour Noël 🎄?

Nous avons à nouveau une journée « sans rien de prévu ». La nature, surtout la mienne, ayant horreur du vide, nous partons (à pied!) au parc Manting, magnifique jardin botanique en plein centre de Jinghong, de l’autre côté du fleuve. C’était malheureusement sans tenir compte que nous ne sommes pas tous égaux face à la chaleur, je me suis faite appelée Arthur sur tout le trajet 🥵.

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traversée du pont à pied

La nuit suivante, Julien et moi avons été réveillés par les cintres qui se cognaient entre eux dans le placard… un tremblement de terre! Pour nous deux, c’était la première fois que nous en « sentions un ». Personnellement, passé la question « mais… c’est un tremblement de terre? », je me suis rendormie directement. Julien par contre a été tenu réveillé un moment par ce qui ne m’a traversé l’esprit que le matin au réveil « mais on aurait pu voir tout l’hôtel s’effondrer sur nous! ». Et pour cause, il ne s’agissait pas d’un petit tremblement de terre : magnitude 5 à seulement 100km de nous!

IMG_4564Pour notre dernière journée « programmée, nous commençons par la visite du village Dai de Manzhao, où l’on fabrique encore du papier de manière traditionnelle.

On s’y promène et au fil des maisons, on peut y observer les locaux fabriquer de superbes feuilles de papier de riz. Les enfants s’y sont même essayé. Dans l’ordre ici la fabrication du papier de riz:

Au-delà de la technique de fabrication du papier, c’est aussi un très joli village, au milieu duquel trône bien évidemment un temple bouddhiste. Et celui-ci nous offre un beau panorama sur le village.

Nous avons même eu droit à la fameuse cérémonie du thé (nous y reviendrons un peu plus loin), servi par le bouddha (prêtre principal) du temple lui-même! Encore une fois le décalage que l’on se fait des moines bouddhistes nous a fait sourire. Certes il s’agit de moines, mais ils ont des téléphones dernier cri, de belles baskets, et ils sont surtout très sympathiques et très drôle!

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Nous reprenons la route, direction la pagode octogonale de Jingzhen. Ici, nous sommes seuls au monde, nous sommes accompagnés uniquement du tintement des clochettes sur le toit, moment de zénitude garanti!

Avec une fresque sur la vie de Bouddha, passé de prince hindou à fondateur du bouddhisme.

L’heure du déjeuner arrive, et tout comme avec Jeff, nous nous arrêtons dans un endroit improbable, où l’on peut manger du poulet « rôti à plat » (comme au Portugal) dans un…. garage, ou une carrosserie, je ne sais pas. Le poulet est cuit dans l’entrée, et on mange au-dessus du garage.

Le poulet est entier, certains n’ont pas pu s’empêcher de s’en amuser 😁🐓.

Puis nous prenons la route vers la montagne Nannuo Shan, l’une des six montagnes à thé qui ont fait la renommée du thé Pu’er ⛰☕️. Encore une fois, ces paysages nous ont replongés dans notre voyage au Sri-Lanka il y a 14 ans, décidément ce voyage nous a marqués.

Petite anecdote tout d’abord: le Xishuangbanna est une région autonome. Ainsi, quand nous quittons sa limite pour nous rendre vers la plantation de thé, nous devons nous arrêter à un poste de contrôle de police 🛂. Donc comme d’habitude, il nous faut répondre à un certain nombre de questions, sauf que certaines sont absolument ridicules, comme le numéro de vol par lequel nous sommes arrivés en Chine 9 mois plus tôt…), ainsi que le numéro de siège! Nous n’avons pas trouvé mieux comme réponse qu’éclater de rire 😆, même le policier a ri de l’absurdité de la chose.

Revenons donc au thé Pu’er. Il s’agit du thé chinois le plus réputé. Il ne s’agit ni d’un thé noir ni d’un thé vert, mais d’un thé « sombre ». A l’instar des grands vins, le thé Pu’er se bonifie en vieillissant, du moins pour les meilleurs crus. Les thés de cette famille se différencient de toutes les autres familles par la fermentation qu’ils subissent (fermentation, et non oxydation). L’oxydation est la réaction qui se produit naturellement chez tous les végétaux une fois récoltés au simple contact avec l’oxygène contenu dans l’air, comme par exemple une pomme qui noircit après avoir été coupée. Il en est de même pour le thé car, une fois ses feuilles récoltées, le processus d’oxydation s’amorce naturellement. La fermentation, quant à elle, est une réaction différente. Elle peut se produire chez les végétaux sous l’effet de micro-organismes (des levures ou des bactéries). C’est notamment grâce à la fermentation que le sucre du raisin se transforme en alcool lorsque l’on fait du vin. Cette réaction est due à l’action de bonnes bactéries naturellement présentes dans les aliments qui, soumises à certaines conditions de chaleur et d’humidité, sécrètent des enzymes qui vont modifier l’aliment d’origine. Le thé Pu’er est donc soumis, lors de son élaboration, à la chaleur et un certain taux d’humidité pour activer sa fermentation et se retrouve ainsi, outre son goût transformé, particulièrement sain pour l’équilibre de notre organisme.

Nous arrêtons donc la voiture dans un petit village, et partons à pied dans la forêt.

Nous arrivons un peu plus loin, après que Julien soit tombé nez à nez avec un serpent 🐍, dans un endroit ressemblant au repère de Peter Pan, avec des petits sentiers suspendus, reliant des petites cabanes en bois.

Comme dans tous villages de théiers, il y a aussi « le plus vieil arbre à thé », celui-ci étant vieux de 800 ans (j’ai d’ailleurs lu que l’on pouvait en trouver vieux de 2000 ans!)

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Comme évoqué dans un précédent article, les Chinois ont développé une technique ingénieuse pour le stockage du thé. En compressant fortement les feuilles de thé, on crée des volumes compacts faciles à empiler sans perte de place, et permettant de plus de mieux préserver le thé lors de longs voyages. La compression limite en effet le contact des feuilles avec l’air et ralentit ainsi l’oxydation des feuilles. Il s’agit des fameuses galettes de Pu’er, et ce format est encore aujourd’hui celui qui prime lors du façonnage des Pu’er. Même si on peut trouver du thé Pu’er en vrac, la plupart sont compressés sous diverses formes : galettes, briques, boules, etc.

Et ici encore, nous avons droit à la « cérémonie du thé ». Appelée Gong Fu Cha (signifiant « prendre le temps pour le thé »), cette cérémonie consiste à révéler tous les arômes du thé en préparant en quelques instants un thé très concentré. Les feuilles de thé sont infusées jusqu’à épuisement des arômes, il est d’ailleurs possible de conserver les mêmes feuilles jusqu’à 10 infusions pour un thé de très bonne qualité. Les ustensiles pour la cérémonie du thé sont:

  • Une petite théière 🫖, de préférence en terre cuite (mais ici elle est transparente, pour mieux admirer la robe du thé)
  • Un pot à thé avec une petite passoire ou un couvercle pour retenir les feuilles de thé
  • Des petites tasses de dégustation 🍵 à l’intérieur blanc de préférence pour mieux apprécier la couleur du thé (ici pas de gros mug pour boire le thé)
  • Une bouilloire
  • Un plateau ajouré avec un réservoir qui accueillera toute la vaisselle et l’eau versée

Le rituel se passe ensuite selon les étapes suivantes (attention, ce rituel est digne de la dégustation d’un grand vin!):

  • Il faut d’abord laver et réchauffer les ustensiles, afin d’éviter les chocs thermiques. Pour cela on verse de l’eau bouillante dans la théière, puis depuis la théière dans le pot, puis dans les tasses
  • Ensuite, on procède au lavage et à l’humidification des feuilles de thé. Pour cela, il faut placer le thé au fond de la théière puis verser de l’eau frémissante dessus pour ensuite jeter cette première eau
  • Le moment de la véritable première infusion est venu. On verse de l’eau bouillante dans la théière puis sur la théière, et on laisse infuser pendant environ 1 minute. Il faut ensuite transvaser le thé dans le pot muni de la passoire pour homogénéiser l’infusion puis dans les tasses. Au fil des infusions, les arômes et la couleur évolueront…

Ici nous avons pu goûter le traditionnel thé sombre Pu’er, mais aussi du thé blanc, c’est-à-dire celui ayant reçu le moins traitement lors de son élaboration.

C’est ainsi que ce termine ce premier tant attendu voyage dans notre conquête de l’Asie. Nous sommes revenus avec des étoiles plein les yeux, des souvenirs pleins la tête, et heureux par les rencontres, souvent improbables, faites. Tout comme Paris n’est pas la France, Pékin n’est pas la Chine, et la diversité découverte ici est très prometteuse pour la suite (même si à l’heure où je vous écris, sortir de Pékin est encore très risqué, le retour n’étant pas du tout garanti sans passer par la case quarantaine, même en ne quittant pas la Chine). Ce fut aussi l’occasion de comprendre comment nous aimons voyager en Chine, et nous comprenons que sortir des sentiers battus est encore plus nécessaire ici, notre façon de voyager n’étant pas mieux ou moins bien, mais simplement différente de celle des Chinois.

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