Auteur : angiepav

La Muraille by night… or by rain

La Muraille by night… or by rain

Je m’octroie ici un petit break dans mon article en cours (qui sera encore trop long je crois) sur Xi’an et son armée de terre cuite enterrée, pour un sujet beaucoup plus léger 😃.

Comme vous l’avez probablement déjà compris, la Grande Muraille est notre terrain de jeu de prédilection ici. Pour profiter des derniers jours d’été (quoique dans le calendrier luni-solaire chinois, nous sommes déjà en automne) et de la nature 🌄, loin de la capitale beaucoup plus fourmillante qu’en 2022, je constitue un groupe constitué d’amis randonneurs, avec le petit grain de folie qu’il faut, et demande à notre guide habituel Steven (les chinois ont tous des prénoms occidentaux en plus de leur nom chinois) de nous emmener camper ⛺️🥾🎒 sur la muraille le week-end précédant la rentrée des classes 💼👧🏼👦🏼.

Nous voilà donc parti le samedi en fin de matinée, avec nos sacs à dos 🎒, duvets , Steven s’occupant de la logistique plus encombrante (tente ⛺️, dîner et petit dej). En tant que bons français, nous n’oublions évidemment pas de mettre dans le fond de nos sacs du vin 🍷, un morceau de baguette 🥖, de la terrine, et d’autres petites choses pour un apéro au coin du feu le soir. Nous prenons tout de même aussi nos k-ways, car ici aussi la météo est un peu détraquée, il pleut régulièrement sans que cela soit vraiment prévu, et pour une raison étrange, la pluie s’invite surtout le week-end ☔️😏.

Il faut quand même préciser qu’à chacune de nos sorties sur la Muraille, il se passe un truc: le bus qui tombe en panne 🚍, le guide qui doit partir chercher une partie du groupe qui avait voulu s’aventurer plus loin mais qui s’est perdu 🧭 (nous laissant avec un autre soi-disant guide qui ne connaît pas le chemin), les villageois qui ne veulent pas nous laisser accéder à la muraille prétextant que c’est trop dangereux ⛔️, etc. Bref, avant de partir, j’averti Laila, qui va aller sur la muraille pour la première fois, qu’il va forcément se passer un quelque chose… la question étant de savoir quoi ❓. Autre petite précision, nous ne savions pas exactement sur quelle portion de la muraille nous nous rendions, décidément notre niveau d’organisation est beaucoup plus limité maintenant, that’s China!

Nous prenons donc la route, sous un magnifique ciel bleu 🏞. L’itinéraire est assez accessible (nous sommes 15, dont 6 enfants).

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Nous commençons à marcher vers 13h (notre point de départ étant à environ 2h de route du centre de Pékin) et cherchons un endroit approprié pour un arrêt déjeuner au début du chemin. Nous trouvons un petit coin idéal, avec le dessert à portée de main, au milieu de ce qui ressemble à des pommier 🍎 et pruniers 🌳. C’est aussi l’occasion pour les enfants de grimper aux arbres, décidément vivre dans une mégalopole présente des avantages, mais on s’émerveille encore plus de ce que nous offre mère-nature dès que nous en avons l’occasion.

Nous reconnaissons ensuite assez facilement cette portion de la muraille, très caractéristique de cette région du Hebei: elle est faite de pierres 🪨 et non de briques 🧱, et présente une allure encore plus proche d’un dragon que l’on imagine serpenter au milieu des montagnes 🐉 ⛰. En effet, le Hebei étant une province entourant complètement Pékin, les ingénieurs de l’époque ont été encore plus rigoureux dans leur conception et choix des matériaux constituant cette portion de la muraille, elle est ainsi une des portions les mieux conservées de nos jours.

Cette région de la muraille présente aussi quelques passages particulièrement vertigineux 🧗‍♀️, et elle a beau traverser les siècles, les pierres ne sont pas toutes parfaitement scellées, ce qui nous donne régulièrement quelques frayeurs, surtout pour les enfants.

Il ne vous aura probablement pas échappé que sur certaines de ces photos, le ciel paraît de plus en plus gris 🌫. Effectivement, au début nous voyions le ciel s’obscurcir derrière nous, et nous nous disions que ce mauvais temps allait gentiment nous contourner. Mouai, c’est beau de rêver! Aucune de nos applications météo ne disait la même chose, comme souvent ces derniers temps. Il nous faudra donc croiser les doigts pour éviter la pluie 🍀🌧. Steven nous demande tout de même de nous dépêcher, le vent se levant de plus en plus fort, afin d’arriver au camp au plus vite et de monter les tentes avant que la pluie soit réellement là.

Nous arrivons donc là où Steven s’est, je pense, donné beaucoup de mal pour nous préparer un campement vraiment chouette: un brasero pour faire le barbecue 🔥, une table et des tabourets en rondins qui je pense ont été fabriqués pas lui pour cette occasion 🪵, un repas avec des quantités astronomiques de brochettes 🍗, de légumes 🌽🥔🥒 et de fruits 🍑🍏 probablement cultivés par les fermiers du coin, de l’eau, et biensûr de l’eau et des bières 🍻 pour compléter l’apéro que nous nous imaginions tous prendre au coin du feu en admirant le couché de soleil 🌄. La petite carriole qui transportait nos sacs (c’était la bonne surprise, car nous avions organisé nos sacs de façon à tout porter le long de la rando) était aussi déjà arrivée par je ne sais quel petit chemin de terre.

Allé hop, on jette une petite bâche sur les sacs qui n’ont pas déjà de protection contre la pluie, nous attrapons les tentes (il y avait de tentes de 2, et des tentes de 4, ou plutôt de 3 par expérience, nous avions déjà organiser la répartition pendant que nous marchions), et nous allons sur le terrain que Steven nous recommande pour les installer ⛺️. Son choix était justifié par le fait que là les herbes étaient très hautes 🌾, que cela serait donc plus confortable pour la nuit 🌌😴. Nous sommes un peu sceptiques car il aurait fallu tasser le terrain avant, mais nous n’avons plus le temps de réfléchir, donc on y va.

Là, nous nous rappelons que nous sommes bien en Chine, toujours pleine de quiproquo, en constatant que les tentes n’ont pas de sardine, et que les tentes 3-4 places n’ont pas de double toile (les vertes et oranges sur la photo ci-dessous), sauf un bout de tissus en plus juste sur le dessus de la tente. Bref, ce sont des tentes plutôt pour aller dans les parcs l’été, pour faire du glamping (les chinois en sont très friands). N’ayant pas de sardine pour tendre les tentes, qui en plus sont posées sur des hautes herbes, et n’ayant pas réellement de seconde toile, ce qui aurait dû assurés l’imperméabilité de la tente ⛺️💦, nous ne sommes pas hyper confiants quant à la suite des évènements.

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D’un coup la pluie se met à tomber vraiment fort ⛈, ponctuée de coups de tonnerre assez proche en fait, nous nous abritons donc tous dans nos tentes (Augustin avec ses 2 copains, Constance reste avec moi), Julien étant parti aider Steven pour fabriquer un abri de fortune pour espérer manger au sec. Nous étions donc toutes les deux posées dans la tente à attendre que le mauvais temps passe, sur des petits matelas de camping que nous avait passés Steven, avec les chaussures pleines de boue jetées dans un coin de la tente 🥾, les sacs étant restés non déballés (par prudence, ou intuition je ne sais pas, nous avions décidés de ne pas sortir nos duvets, contrairement à certains de nos amis). Assez rapidement je me rends compte sans trop de surprise que l’eau rentre dans la tente 💦, d’abord par les coutures, puis tout simplement par la toile. Je m’aperçois qu’une des chaussures de Constance était renversée sur le côté, et commençait à se remplir d’eau… oups. Et puis je ne sais pas pourquoi, je passe la main sous le matelas sur lequel j’étais assisse, et je m’aperçois qu’une petite marre était gentiment mais surement en train de se former sous moi. Aller hop, on enlève nos chaussettes (hors de questions de marcher les pieds mouillés, car pour moi c’était déjà évident que nous ne passerions pas la nuit là), Constance se met debout, et moi accroupie avec nos 2 sacs sur les genoux, histoire de ne pas les mouiller plus que nécessaire.

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La tente prend l’eau!

Dans la tente d’à côté j’entendais aussi Noémie et Alex qui devaient replier leurs duvets qui étaient à trempés, et surtout Noémie dire qu’il pleuvait « en spray » à l’intérieur 💧.

Au bout d’1h, ou plus ou moins je ne sais pas, Julien arrive pour demander si tout va bien. Alors oui ça va, si ce n’est qu’il va falloir trouver rapidement un plan B, car dormir là ça n’est juste pas possible! Steven n’avait pas la même tente que nous (il avait une tente type tente militaire), et ils ne s’imaginaient pas que c’était un peu la cata ici. Quand Julien ouvrit la tente (en cassant la fermeture éclair aussi je crois), il a de suite compris qu’il faudrait effectivement s’en aller avant la tombée de la nuit (qui n’allait plus tarder à arriver d’ailleurs). Je crois que Steven était tout dépité et désolé pour nous, mais aucune inquiétude, nous prenions tous ça avec le sourire fait, on savait que comme toujours ça ne se passerait pas comme prévu, mais que ce sont ces situations loufoques qui nous laissent les meilleurs souvenirs.

L’orage ayant l’air de s’éloigner, quitte à être trempés, autant être tous ensemble, alors nous sortons de nos abris, pour découvrir notre campement devenu tout boueux.

Et puis le dîner avait été préparé par un ami de Steven, et nous ne voulions pas gâcher toute cette nourriture. D’ailleurs, pour l’anecdote, Steven avait rencontré ce fermier lors d’une randonnée que nous avions faite avec lui l’hiver dernier. Notre itinéraire était passé par sa ferme où il élève des cochons, et depuis une jolie amitié semble être née.

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Nous avons tout de même abrité du mieux possible les enfants, je ne dirais pas pour manger au sec, mais pour ne pas manger sous la pluie qui tombait encore dru.

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Mais rapidement, même cet abri s’écroula sous le poids de l’eau 😅

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Mais quand même, on s’est bien marrés 😁

Profitant d’une accalmie de la pluie avant la tombée de la nuit, mais vraiment déçus pour Steven qui préparait ce week-end depuis des semaines, nous partons en laissant le campement en l’état, en essayant tout de même de prendre les restes de nourritures pour ne pas gâcher. Nous repartons partons à pied 🥾🎒 (avec tous les sacs à dos cette fois-ci), afin de rejoindre la ferme de l’ami Steven, située à environ 30 minutes de marche de là.

La nature après la pluie c’est vraiment magnifique, et cela est encore plus vrai au soleil couchant. La brume qui s’élève du sol et le ciel allant du rouge orangé au violet, c’est absolument sublime.

Il y a aussi cette odeur de nature après la pluie, que je ne peux pas vous partager en image, mais c’est une odeur que j’ai toujours aimée, je la trouve réconfortante, un peu comme quand nous sommes au chaud sous un plaide devant un vieux film, alors que l’orage gronde dehors. Cela dit, ce petit nuage ☁️ qui nous suivait nous donnait un peu trop l’impression que la pluie pouvait revenir à tout moment…

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Nous arrivons comme prévu dans ce tout petit village au milieu de la montagne, avec cette ferme et son élevage de cochons 🐖. Comme je vous le disais plus haut, nous étions déjà passé par là l’hiver dernier, au cours d’une rando qui nous apporta elle aussi son lot d’imprévus (ici c’est un peu devenu une habitude, le tout étant d’anticiper au maximum ces fameux imprévus). J’ai retrouvé quelques photos de cette ferme/village de l’hiver dernier, ça sera plus parlant de jour…

… que lorsque nous sommes arrivés en début de soirée

Nous avons été accueillis très chaleureusement chez ce fermier, les Chinois sont vraiment adorables, qui nous aurait volontiers hébergés si nous le lui avions demandé. Sans les enfants, ok, on aurait tous pu dormir n’importe où, même sur une chaise. Mais là à 15, dont les 6 enfants, nous avons préféré demander à Steven s’il était possible de rappeler le bus, qui aurait dû nous récupérer le lendemain en fin de matinée, pour rentrer sur Pékin.

Le temps que Steven parte chercher du réseau pour téléphoner au chauffeur de bus 🤳🏻, qui heureusement devait passer la nuit dans un village proche, nous avons donc sorti toutes nos victuailles, pour cette soirée complètement pas prévue chez ce fermier, mais tellement authentique. C’est tout à fait ça que l’on aime en Chine 🇨🇳🫶🏻.

Nos 2 hôtes nous ont raconté leur histoire (nous avions heureusement avec nous une amie chinoise parlant parfaitement le Français pour nous faire la traduction). Il s’agit en fait de 2 anciens militaires de l’armée chinoise. L’un d’eux (celui qui nous avait préparé le dîner au campement), avait construit il y a quelques années cette ferme, et une chambre d’hôte (ou plutôt un gîte) que sa femme gérait (à priori c’était à l’étage, mais nous ne l’avons pas vu). Pendant les 3 de COVID, il avait été réquisitionné par l’armée et n’avait pas pu rentrer chez lui. Quand il a finalement pu revenir, sa femme était partie avec quelqu’un d’autre. Quand Steven l’a rencontré lors de notre rando l’hiver dernier, il s’est pris d’amitié pour ces fermiers et s’est promis d’y faire passer ses groupes de marcheur dès qu’il en aurait l’occasion, pour aider à faire vivre cette ferme et ce petit hameau. Une bien triste mais jolie histoire n’est-ce pas?

Nous avons partagé avec lui le vin que nous avions apporté, et lui nous a offert du Baijiu 白酒, signifiant littéralement alcool blanc, fait de céréales 🌾, et dont les Chinois sont très fier. Personnellement, je déteste, mais refuser un Ganbei serait irrespectueux. Heureusement, le bus a pu arriver rapidement, et nous avons pu repartir pour les 3 derniers km, le bus ne pouvant emprunter la petite route menant à la ferme. Nous avons mis les enfants et nos sacs dans les petites carrioles, et nous les adultes sommes repartis à pied, équipés de nos lampes frontales 🔦.

Arrivés en bas, nous retrouvons notre bus 🚐, et les enfants arrivés plus rapidement que nous, et remercions bien chaleureusement Steven pour cette journée incroyable, car vraiment on a adoré. On voulait créer de nouveaux souvenirs, le contrat a été largement rempli! Nous avons repris rendez-vous avec Steven, qui restait là pour la nuit, et remettrons ça mi-octobre, on a hâte 🗓!

Maintenant vous pensez que nous avons pu rentrer tranquillement chez nous? Oh que non, nous sommes en Chine quand même, et il se passe toujours quelque chose… Rappelez-vous, plus haut je disais que le matin nous ne savions pas trop où aurait lieu la rando. J’avais, avant de partir de notre appartement, demandé à Julien si à son avis il fallait prendre nos passeports  (réflexe du COVID). Réponse catégorique: non. Au pire, on a toujours une photo de nos passeports et VISA sur nos téléphone. Au bout d’1 heure de route, nous voilà bloqués dans un embouteillage 🚛🚚🚙🚐🚌, nous sommes complètement à l’arrêt. Finalement, au bout d’1h supplémentaire peut-être, nous nous arrivons à la barrière de péage permettant de rentrer dans la province de Pékin (et oui, nous étions dans la province du Hebei!). Rentrer dans Pékin, province la plus protégée de Chine car elle héberge le gouvernement central, revient aussi à passer par un contrôle de police, ou de douane, c’est un peu pareil dans ce cas 🛂. Le chauffeur nous explique alors qu’il nous fallait tous descendre avec nos passeports. Donc à l’aller il n’y a aucun contrôle, mais au retour si (et ce n’est pas la première fois que nous faisons Hebei –> Pékin par la route, mais ne nous rappelons pas avoir déjà eu ce contrôle). Au pire pas grave, on se dit que nous avions des photos de nos passeports, mais en fait non, une de nos amies ne l’avait pas. Solidarité de groupe, nous arrivons donc tous en bloc devant la police, en disant que nous n’avions aucun nos passeports sur nous. Au début la police nous demande de nous mettre de côté pour laisser passer tous les Chinois qui étaient derrière nous. Là c’est un coup à y rester toute la nuit! Nous refusons et bloquons tout le monde derrière nous, c’était le seul moyen pour qu’ils finissent par en avoir marre et nous laisser passer. Nous appelons également Steven au téléphone, qui parvient à négocier avec eux de nous laisser passer car nous ne faisions que rentrer chez nous, en laissant noté sur un papier nos numéros de passeport.

Le lendemain, Steven nous écrit sur WeChat que nous avions bien fait de rentrer à Pékin, car il avait encore plu des cordes vers minuit, et la tente qui se transforme en pataugeoire au milieu de la nuit, c’est beaucoup moins marrant. Par contre le lendemain, le temps était parfait pour que Steven fasse sécher tout le matériel. Par curiosité, 2 de nos amis sont allés chez Decathlon le lendemain, et en ont profité pour passer au rayon camping. Etonnamment toutes les tentes étaient comme celles que nous avions la veille, ce ne sont pas les mêmes que l’on peut trouver dans les Décathlon en France.

Le lundi suivant, c’était déjà la rentrée des classes 💼✏️, dont la rentrée au collège pour notre grand bonhomme. On ne nous avait pas dit que ça arriverait si vite, je n’étais pas prête moi 🥹!

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紫禁城 – la Cité Interdite 🚫

紫禁城 – la Cité Interdite 🚫

Je me lance enfin dans l’écriture d’un article sur la Cité Interdite. C’est si immense, son Histoire est si complexe, que j’ai mis du temps à oser m’y mettre. Je l’ai déjà visitée 4 fois, mais j’ai encore l’impression que de n’y voir que des murs, que de ne palper du bout des doigts qu’une infime partie de ce pan de l’Histoire de Chine 🇨🇳. Nous allons donc nous y balader, y parler un peu architecture, un peu d’histoire, partager des impressions, ressentir la grandeur du lieu. En effet, ici pas d’inscription, pas de panneau explicatif, juste des audio-guides décrivant de façon détaillée l’intérieur des bâtiments… auxquels nous n’avons pas accès! Logique 😅

Pour ceux qui me lisent et qui n’ont pas encore eu la chance de venir en Chine 🧳✈️🇨🇳, je vous recommande de regarder le film 🎬 « le Dernier Empereur », réalisé par Bernardo Bertolucci en 1987, et tourné dans la Cité Interdite 🎥. L’histoire est certes romancée, mais elle relate de façon assez fidèle la vie (tragique) de Puyi 溥仪, et les rites très protocolaires de la Cité Interdite 🚫. Même Constance, qui se plaint que nous l’emmenons trop dans nos visites culturelles, réclame de retourner voir la Cité Interdite depuis qu’elle a vu le film 👧🏼.

Là, il est très facile de me perdre dans des recherches et explications interminables, mais tout autant passionnantes, sur l’Histoire de Chine. Je vais essayer d’éviter de m’y perdre (sinon ce n’est pas 3 mois de retard sur mon blog que je vais prendre, mais 3 ans au minimum 😇). Je vais donc tâcher de rester synthétique, peut-être qu’un jour je me lancerai dans une écriture plus approfondie de ce pan de l’Histoire de Chine 📚. Ici, mon objectif sera essentiellement de vous offrir une visite virtuelle de la Cité Interdite.

Durant 5 siècles, la Cité Interdite (appelée gùgōng 故宫 par les Chinois, ce qui signifie « Palais Ancien ») fut le centre de la politique chinoise, voir du monde selon la pensée chinoise 🌏🇨🇳. Sa construction, qui ne prit que 14 ans, fut ordonnée au début du XVième siècle par l’empereur Yongle 永乐帝 , troisième empereur, dont la légitimité est par ailleurs discutable, de la dynastie Ming. Ainsi, Yongle déplaça la capitale de l’Empire chinois de Nanjing à Pékin, afin de se rapprocher des frontières du Nord, et ainsi mieux les contrôler face à l’envahisseur Mongole. La Cité Interdite est en réalité le troisième palais impérial à avoir été construit à Pékin. Le premier l’a été pendant la dynastie Jin (1115-1234), le second au cours de la dynastie des Yuan (1271-1368), et la Cité Interdite a donc été construite pendant la dynastie des Ming. Aux Ming succédèrent les Qing, dynastie ayant régné de 1644 jusqu’en 1912, année de l’abdication de Pu Yi lors de la création de la République de Chine. Sauf Pu Yi qui y était pour ainsi dire prisonnier , les Empereurs ne vivaient pas toute l’année dans la Cité Interdite. L’été, pour fuir la chaleur étouffante de Pékin 🥵, les Empereurs résidaient à Chengde, résidence d’été située dans la province du Hebei, à 100km au nord de Pékin. Nous en parlerons dans un futur article.

On parle donc de Cité Interdite, car interdite au peuple, ou encore de Gùgōng (nous l’avons vu, cela signifie ancien palais). Mais le nom complet serait « Cité Pourpre Interdite », en référence à l’étoile nommée Zǐwēi Xīng (紫微星, la « petite étoile violette » ⭐️🟣) dans l’astronomie chinoise, c’est-à-dire l’étoile polaire de l’astronomie occidentale. En effet, comme le palais impérial se trouve au centre de Pékin et représentait le centre administratif de l’État 🎯, on lui donna un nom évoquant l’étoile qui est au centre de la rotation du ciel. Tout est toujours symbolique et imagé ici.

C’est donc parti pour la visite virtuelle de la Cité Interdite. L’architecture de la Cité Interdite est très imposante: il s’agit d’un rectangle de 960m x 750m, autour duquel il est difficile de circuler, car des policiers montent la gardent tout le long, et veillent à ce que l’on ne s’attarde pas trop longtemps autour. Une de nos premières tentatives d’approche en décembre 2021 a d’ailleurs été compliquée car nous ignorions à l’époque que les taxis ne pouvaient s’y arrêter. Nous avons donc eu du mal à rentrer. Autrefois, il était interdit à Pékin d’ériger des constructions plus hautes que la Cité Interdite, sauf le Temple du Ciel plus au Sud. Cela amplifie l’effet massif du lieu.

Nous arrivons donc par la « Porte de la Gloire Orientale », où nous laissons nos scooters électriques 🛵, et finissons le tour à pied entre l’extérieur du mur d’enceinte et les douves, pour rentrer par la Porte du Midi, elle aussi bien gardée! 💂‍♀️

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Mur d’enceinte extérieur de la Cité Interdite
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Imperturbable garde surveillant la foule de visiteurs se rendant à la Cité Interdite
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Entrée par la Porte du Midi… complètement déserte en juin 2022
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La même en avril 2023… très calme par rapport à juin 2023!

Comme je vous le disais, la Cité Interdite je l’ai déjà visitée 4x: 2x pendant le COVID 😷 (dont le 10 décembre alors que le COVID a subitement fait partie du passé, tout le monde était alors terré chez soi, soit de peur d’attraper le virus, soit car déjà malade), et 2x dans le monde post-pandémie 🥳. C’est très certainement un des rares points qui me fait regretter l’époque 2022, car nous avons eu la chance de voir la Cité Interdite pratiquement vide. Cela donne à la visite du lieu une saveur très particulière, que nous nous ne réalisons que maintenant au milieu des foules de visiteurs. Par conséquent, ne soyez pas surpris de voir des photos prises à différents moments de l’année 📷 ❄️☀️.

Après un minutieux contrôle de notre identité, nous passons la Porte du Midi, pour entrer dans la Cour de la Rivière aux eaux d’or, avec au fond l’imposante Porte de l’Harmonie suprême.

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Porte de l’Harmonie suprême et ponts enjambant la Rivière aux eaux d’Or
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Porte du Midi vue de l’intérieur de la Cour

La forme sinueuse de cette rivière évoque la forme du Dragon, symbole de l’Empereur. La dragon chinois 🐉 n’a d’ailleurs rien à voir avec notre dragon volant et effrayant cracheur de feu en Occident. Le dragon chinois ne vole pas, il représente la force de la nature, et la puissance impériale.

Cette cour monumentale (et c’est loin d’être la seule), nous montre que la Cité Interdite s’élève sur d’énormes fondations en pierre blanche. Ces blocs de roche massive, dont le poids peut atteindre plus de 200 tonnes, ont été autrefois extraits des carrières de Fangshan, situés à 70km au sud de Pékin, et transportés jusqu’au site de construction. Comment ont-ils réalisé cet exploit? En les faisant glisser sur les cours d’eau gelés 🧊, cela pouvant parfois prendre plusieurs hivers pour tout transporter.

Nous pouvons d’ailleurs ici voir déjà les symboliques de la Cité Interdites. Pour cela, faisons une courte introduction à la numérologie chinoise:

  • le chiffre 9️⃣ (九 jiǔ) est considéré comme un bon nombre dans la culture chinoise car il sonne comme et ressemble au mot « durable » (久 jiǔ). C’était ainsi le chiffre symbole de l’Empereur sous la dynastie Ming, et c’est pour cette raison que la cité interdite compterait 9999 pièces (en réalité, elle en compterait un peu moins de 9000). 9999 est aussi le dernier nombre avant 10 000, représentant une limite de ce qui est dénombrable. Au-delà on entre dans le domaine du divin. 9️⃣ est aussi le plus grand nombre impair, tandis que 5️⃣ se trouve en plein milieu des nombres impairs. Ainsi, dans la Chine ancienne les chiffres 9️⃣ et 5️⃣ symbolisaient la suprématie de l’empereur
  • le chiffre 3️⃣ est aussi très présent, celui-ci représentant l’équilibre, et le début de tout (si je me souviens bien, sur ce point j’ai un doute)

Ces chiffres sont donc très souvent présents dans la Cité Interdite, tout comme d’autres symboles réservés uniquement à l’Empereur:

  • 9 colonnes ou 9 intervalles entre les colonnes, ou parfois 5, ou parfois 3.
  • 9 animaux mythiques sur les tuiles des toits ou 9 intervalles entre eux (ou parfois 5, ou parfois 3). Ce qui est intéressant de noter ici, c’est l’entrelacement du symbolisme et du rôle architectural. En effet, ces animaux (dont les représentations sont aussi très symboliques, mais je n’irai pas dans ce détail ici) sont des éléments architecturaux lourds qui favorisent le maintien en place du toit, c’est sans doute le rôle initial de ces représentations
  • les toits avec des tuiles vernissées jaunes, couleur réservée à l’empereur uniquement 🟡. Dans la culture chinoise, la couleur jaune étant associée au respect.
  • On trouve aussi beaucoup de rouge pourpre 🔴🟣, nous l’avons vu plus haut, cette couleur étant associée à l’étoile polaire, cette étoile qui ne semble jamais bouger. C’est donc parfait pour cet environnement ayant si besoin de symétrie.
  • 9 rangées de 9 clous sur les portes🚪
  • 3 niveaux de terrasses pour les bâtiments les plus importants (personne d’autre en Chine ne pouvait oser avoir plus de 2 marches pour rentrer chez lui!)
  • des dragons, représentés un peu partout 🐉

Avant d’aller plus loin, laissez-moi vous montrer son plan (image trouvée sur voyageschine.com), là aussi tout est question de symbolismes

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L’architecture de la Cité respecte à la perfection des règles protocolaires très strictes. D’ailleurs, nous avons commencé à le voir, il n’y a pas d’arbre, pas de verdure pour se rafraîchir un moment à l’ombre, mais de grandes étendues minérales. Cela est un peu moins vrai dans la partie nord de la Cité Interdite, ou dite Intérieure, la partie privée de la Cité Interdite (par opposition à la zone au sud, dite extérieure, où s’exerçait la politique impériale). Le palais est, nous l’avons vu, au centre de la ville de Pékin, inscrit dans un rectangle dont le centre est le palais de l’Harmonie Suprême, le palais de l’Empereur, où celui-ci était couronné, où il recevait les hauts fonctionnaires chinois et les délégations étrangères. Coupée en deux par une ligne de symétrie Nord-Sud, reprenant le même axe qui était autrefois déjà cela de la ville de Pékin au temps des dynasties mongoles, la Cité Interdite toute entière est vouée à la logique mathématique. Les pavillons sont construits suivants des règles géométriques les plus parfaites possibles, par nombre pair le plus souvent. Le palais n’accueille aucune courbe, à l’exception de la rivière aux eaux d’or, tout est tracé de façon rectiligne, mettant en avant l’ordre, la régularité, les qualités qui devaient être celles de l’empereur.

De façon plus pragmatique on constate que l’empereur, fils du Ciel 🔵, réside dans le palais de la Pureté Céleste. Son épouse, associée à la Terre 🌏, était au palais de la Tranquillité Terrestre. Dans la cour intérieure les portes latérales sont dédiées à la Lune 🌝 et au Soleil 🌞, ce qui fait qu’on retrouve dans cette disposition les 4 éléments de l’Univers, selon la cosmologie chinoise. Cette disposition ainsi favorisait la stabilité du pouvoir. Ce lieu est donc imposant, inspirant un immense respect, sentiment appelant la comparaison avec Versailles.

Toutefois, les plus tatillons d’entre-vous auront remarqués que cette symétrie n’est pas toujours exactement respectée sur le plan. La Cité Interdite a effectivement beaucoup évolué au cours de son histoire, les empereurs apportant leur touche personnelle, sans pour autant détruire ce qui était là avant, afin de garantir une certaine forme d’unité de l’Empire, pour rassembler tous les peuples, y compris les partisans des précédents Empereurs. Mais aussi car la Cité Interdite a subi de nombreux incendies au cours de son histoire. En effet, les bâtiments sont conçus majoritairement en bois 🪵, du bois précieux venant du Yunnan. On imagine aisément qu’un lieu si immense n’a pas toutes ses pièces occupées toute l’année, et les bâtiments étant chauffés par un système de chauffage au sol, pas toujours bien entretenu pour les bâtiments les moins usités, ils étaient régulièrement ravagés par les flammes. Un des rôles de la rivière aux eaux d’or étaient d’ailleurs de servir de réserve d’eau pour éteindre les feux 💦🔥!

Reprenons notre visite, avec un petit retour en arrière. Avec toutes ces contraintes symboliques sur l’architecture du palais, cela laisse peu de liberté pour faire de l’esthétisme… sauf dans les angles, comme on peut le voir pour cette tour d’angle que nous apercevons depuis l’extérieur, au sud-est des remparts. Ces dougongs, emboîtement de supports en bois très typique de l’architecture chinoise, sont aussi ici un véritable ornement. Il faut noter que ce type de construction est très robuste vis-à-vis des tremblements de terre, la région pékinoise s’étendant sur une zone sismique.

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Reprenons notre visite virtuelle là où nous l’avions laissée:

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Photo de la famille devant la Porte de l’Harmonie Suprême

En passant par là, on ne peut rester indifférent devant les deux magnifiques shī 獅, ces 2 lions gardiens impériaux 🦁💂‍♀️, montant la garde devant tous les temples et palais chinois, et biensûr la Cité Interdite ni fait pas exception. Sur l’image ci-dessous il s’agit d’un mâle, reconnaissable à la boule de soie qu’il maintient sous sa patte. La femelle a quant à elle un petit lionceau couché sur le dos.

Nous passons ensuite de l’autre côté de la Porte, et arrivons dans une immense cour (qui mesure tout de même la bagatelle de 30 000 mètres carrés), où trône le Palais de l’Harmonie Suprême (en chinois Taihedian 太和殿), le palais principal de l’Empereur 🏰. Il s’agit par ailleurs du bâtiment en bois le plus grand de son époque à avoir survécu en Chine, et du plus haut de la Cité interdite. Il repose sur une base en marbre à trois étages, toujours pour une question de symbolique!

L’Empereur y recevait les hauts fonctionnaires, mais surtout les délégations étrangères. Toutes les grandes cérémonies avaient lieux ici, en particulier lors des avènements des nouveaux empereurs. On y célébrait aussi les anniversaires 🎂, les mariages 👰🏻‍♀️, et toute autre occasion comme la célébration du solstice d’hiver ❄️, le nouvel an chinois 🧧 et les déclarations de guerre ⚔️.

La terrasse en marbre y est décorée luxueusement de grues 🦩 et de tortues de bronze 🐢, symboles de la domination et de la longévité éternelle ∞. On trouve aussi, devant le bâtiment, deux cuves de bronze doré, servant à stocker l’eau 💧 en cas d’incendie🧯.

Sur cette terrasse, on trouve aussi un cadran solaire 🕔☀️ (on en trouve d’ailleurs plusieurs au sein de la Cité Interdite, le second exemple ci-dessous est visible dans la zone privée de la Cité Interdite). Il a ici un double rôle: à la fois symbolique puisqu’il représentait la capacité de l’empereur à être mesuré dans ses jugements ⚖️, mais aussi pratique car la vie protocolaire de la Cité nécessitait de toujours bien respecter le calendrier 🗓.

Il nous est par contre impossible de voir comment est l’intérieur du bâtiment, des barrières nous empêchant de coller la tête aux fenêtres pour y apercevoir probablement un trône richement décoré.

Passons à présent de l’autre côté du Palais de l’Harmonie Suprême.

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Il fait en fait partie d’un ensemble de 3 pavillons principaux, avec le Palais de l’Harmonie Parfaite (ou Palais de l’Harmonie du Milieu, en chinois Zhonghedian 中和殿), et la salle de l’Harmonie Préservée (en chinois Baohedian 保和殿).

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Le Palais de l’Harmonie du milieu (les couleurs sont assez ternes, ses peintures n’ayant pas été rénovées récemment)
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Derrière le Palais de l’Harmonie Parfaite, la salle de l’Harmonie Préservée (et une copine en premier plan 🙂 )

Ces trois pavillons sont connus sous le nom des « Trois grandes salles de la cour extérieure », et sont alignés le long de l’axe de symétrie Nord-Sud de la Cité 🚫. A vol d’oiseau les trois palais sont disposés de façon à plaire aux Dieux, sensés regarder le palais de haut. Leurs formes différentes brisent la monotonie architecturale du lieu. Le Palais de l’Harmonie Parfaite, qui est aussi le plus petit des trois pavillons, dispose aussi d’un toit unique. Ce pavillon était le lieu de repos 😴 de l’empereur quand il était en train d’organiser les cérémonies qui avaient lieu dans la salle de l’harmonie suprême. C’était un peu un salon d’attente, avant de recevoir ses ministres ou les fonctionnaires.

Le dernier pavillon de la cour extérieure est donc la salle de l’Harmonie Préservée. Les empereurs Ming s’en servaient pour changer de vêtements lors des cérémonies rituelles. Cette fonction changea ensuite sous la dynastie Qing, puisqu’il était devenu d’usage que les banquets impériaux s’y tiennent 🎉. Chaque année, à la veille du réveillon du Nouvel An Chinois, un banquet s’y tenait pour honorer les gouverneurs de provinces, les princes mongols, et quelques fonctionnaires civils et militaires. En 1789, au milieu de la dynastie des Qing, l’empereur Qianlong décida que la phase finale de l’examen national obligatoire, celui qui permit de lettrer une grande partie de la population chinoise, se tiendrait dans ce pavillon 📝🥇. Il s’agissait de l’équivalent du plus haut niveau du système des examens impériaux, à l’échelle nationale, et l’empereur honorait ainsi les dix premiers candidats retenus par la lecture des journaux qu’ils avaient soumis.

On croise ici du drôle de monde, surtout quand la Cité est complètement vide de visiteurs du fait de la pandémie en 2022 😷:

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Un groupe que l’on imagine être des étudiants d’une école de police
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Un couple de jeunes diplômés?

Et biensûr, comme dans tous lieux touristiques en Chine, nous retrouvons toujours ces personnes en costume traditionnel, pour une immersion au temps des Empereurs, le temps de quelques heures de shooting photo 📷.

Derrière la salle de l’Harmonie Préservée, avant de rentrer dans la cour Intérieure, zone privée réservée à l’usage personnel de l’Empereur, dans arrivons dans cette cour, qui donne l’impression de n’avoir pas de rôle particulier. Et pourtant, c’est dans ce petit bâtiment, qui ne ressemble à rien de bien important, que se jouait toute la politique de l’Empire du milieu. C’était un peu le bureau de l’Empereur, et la salle de réunion avec ses ministres 👨🏻‍💻 🤝.

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Petit bâtiment à l’allure insignifiante qui était le centre de la politique impériale

Je crois d’ailleurs que de l’autre côté du mur, qui sépare la cour Intérieure de l’Extérieure, un des Empereurs y avait installé sa garçonnière. Ainsi, pas besoin de beaucoup se déplacer au quotidien 🚶🏻‍♂️😄.

Si vous regardez bien la photo précédente, vous pouvez apercevoir un toit un peu différent des autres. En zoomant un peu plus (photo ci-dessous), on voit effectivement un toit qui sort complètement du protocole de la cour extérieure, beaucoup plus officielle. Dans la partie privée de la Cité Interdite, il était permis quelques fantaisies architecturales. Il s’agit en fait du Pavillon Yuhua, un temple Bouddhiste Tibétain, témoin de l’apogée de cette religion en Chine.

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Pour se rendre de la cour extérieure à l’intérieure, on passe par la Porte de la Pureté Céleste (Qianqingmen), qui sert d’entrée au domaine privé de l’Empereur 🚫. A l’entrée de cette porte on peut voir deux magnifiques lions en bronze 🦁, comme nous l’avons déjà vu précédemment. A l’origine, ils avaient pour rôle d’empêcher les femmes d’entrer dans la cour extérieure (où se déroulaient les affaires de l’État, interdites aux femmes) et aux courtisans d’entrer dans la cour intérieure (qui était le domaine privé de l’Empereur). Ils étaient un peu les cerbères de la Cité Interdite.

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Rangée de banc face à la Porte de la Pureté Céleste.

Derrière la porte de la Pureté Céleste, on arrive sur une cour de taille plus modeste. L’élément principal de cette cour est le Palais de la Pureté céleste (Qianqinggong en chinois). C’était tout simplement la chambre 🛌 des Empereurs de la Cité Interdite, du moins jusqu’à la dynastie des Qing. Ensuite, ce Palais servit de cabinet de travail ou de salle d’audience.

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Vue depuis le Palais de la Pureté Céleste

La partie privée, où l’Empereur résidait avec sa famille, sa cour, ses eunuques (à une certaine époque il y en aurait eu près de 8000!), offre un décor très différent: une succession de petits pavillons, de grandes allées faites de murs hauts séparant les différentes parcelles, et surtout le jardin impérial 🌳 (oui, ici les arbres sont permis aussi).

J’aime me perdre en déambulant dans ces allées, et jouer à photographier les portes. Cela offre de jolies perspectives, et ça donne l’impression de faire un voyage à l’époque des Empereurs de Chine.

Autre lieu que je trouve très agréable (ou trouvais, car c’est une toute autre saveur quand il est vide de visiteurs), c’est le jardin impérial 🌳🪨🌺. Il correspond à la plus petite des zones du palais, composé d’une succession de jardins et de pavillons de taille modeste (il s’agirait même de kiosques). Il est situé tout au Nord de la cité interdite, face à la porte de la prouesse divine qui garde l’entrée Nord. Ce fut un refuge privé pour la famille impériale et c’est peut-être l’exemple le plus typique de la conception chinoise d’un jardin. Ici, les arbres aux formes biscornues, les rochers tout aussi peu conventionnels et les massifs de fleurs sont agencés dans une harmonie parfaite.

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Des arbres à l’allure étrange, ressemblant aux Ents du Seigneur des Anneaux. Peut-être que la nuit ils se déplacent?

Toujours dans la partie privée de la Cité Interdite, nous pouvons visiter, moyennant un ticket supplémentaire, le Palais de Qianlong, regroupant un ensemble de bâtiments indépendants du reste du palais. Cet ensemble, entouré par de hauts murs d’enceinte rouge, n’est pas une construction d’origine. Il s’agit d’un ajout ordonné par l’empereur Qianlong (1736-1795), de la dynastie Qing, en vue de sa retraite. Une fois qu’il aurait démissionné, il souhaitait s’y retirer paisiblement et y passer ses vieux jours. Il démissionna effectivement de ses fonctions à ses 60 ans de règne 👴🏻, par respect pour son grand-père, l’empereur Kangxi, qui régna pendant 61 ans. Il décida toutefois de conserver un œil 👀 sur les affaires de l’Etat sous le prétexte de donner un coup de main, et donc en pratique il conserva le pouvoir. Il ne vécut donc jamais dans cette partie qu’il s’était faite construire, où il n’alla que parfois, dans son temps libre.

Ici, on peut notamment trouver un théâtre 🎭, appelé le Pavillon des Sons Agréables (Changyinge en chinois). Une de ses particularités est d’avoir une scène à 3 niveaux.

Contrairement au reste de la Cité Interdite, nous avons pu ici rentrer dans certains bâtiments. Rappelez-vous, je vous disais plus haut que la Cité Interdite était essentiellement faite en bois. L’intérieur ici était donc complètement en bois, non vernis cette fois, ce qui donnait une atmosphère assez sombre. Les cloisons étaient faites pour être modulables, et j’ai un peu honte mais je ne me souviens plus des explications reçues sur cet intérieur. Il va falloir que j’y retourne!

Est-ce que vous vous rappelez du Murs des 9 dragons 🐉 vu dans le parc de Beihai Beihai et ses neuf Dragons (北海公园)? Il existe 3 de ces murs en tuiles vernissées en Chine, le mieux conservé étant celui visible dans le Palais de Qianlong, dans la Cité Interdite. Le chiffre 9️⃣, des dragons, toujours une histoire de symbolisme!

Il est dit que le centre du troisième dragon (blanc) a été brisé lors de la cuisson dans le four, ce qui était la mort assurée pour les artistes compromis dans ce travail ☠️. Malgré le risque, un charpentier s’était porté volontaire pour remplacer l’original avec du bois et fit la sculpture et la peinture pendant la nuit. Grâce à ses talents et son courage, il sauva ainsi les sculpteurs du châtiment qui les attendait. De nos jours, on peut encore trouver des traces de cette réparation sur le troisième dragon. Zut, j’ai raté ce détail! Pour ça aussi, il faudra que j’y retourne.

De nos jours, certains de ces pavillons sont reconvertis en halls d’expositions, où l’on peut admirer des trésors impériaux de la civilisation chinoise ancienne et de très nombreuses œuvres d’art chinois : peintures, bronzes, céramiques, instruments de musique, laques. En voici un exemple (j’avoue de pas en être une grande passionnée, je ne m’y suis donc pas trop attardée).

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Avant de ressortir de la Cité Interdite, nous passons toujours devant un autre Palais, tout à fait étonnant du fait de son architecture plutôt de style occidental, voir même italien.

Il s’agit du Palais du Bonheur Prolongé (Yanxi gong). Au XIXième siècle, le palais originel fut détruit par un incendie. Il resta alors en ruine jusqu’en 1909, date où le gouvernement des Qing lança sa reconstruction dans un style occidental (la terrible impératrice douairière Cixi étant décédée, l’époque était propice à un élan d’ouverture vers l’Occident), avec un bassin l’entourant. Faute de budget, il ne fut jamais achevé, le bassin qui devait être rempli autour resta vide, on ne peut donc qu’imaginer ce que serait la visite permettant de voir les poissons 🐟 nager à travers des parois de verre. A présent les sculptures en marbre permettent d’imaginer ce qu’aurait pu être ce système.

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Pour sortir de la Cité Interdite, nous passons habituellement par les annexes extérieures orientales, chemin très agréable de par la verdure et le petit canal qui y serpente.

On peut apercevoir au fond ce grand bâtiment au toit de tuiles noires. Il s’agit du belvédère de la profondeur littéraire (Wenyuan ge en chinois, 文渊阁), ou plus simplement la bibliothèque impériale 📚. La couleur noire symbolisant l’eau 💦, ce toit noir (et non jaune!) protégeait les livres impériaux des risques d’incendie 👩🏻‍🚒.

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Le belvédère de la profondeur littéraire

Pour terminer notre visite virtuelle de la Cité Interdite, je vous propose ce diaporama de photos prises en 1890 ou 1900, en regard des mêmes lieux de nos jours. Enjoy!

Voyage dans l’Univers d’Avatar

Voyage dans l’Univers d’Avatar

Aujourd’hui, nous allons vous raconter notre dernier voyage en Chine, dans les provinces du Hunan et du Guizhou (voyage qui commence à dater un peu puisque c’était en mars…🤦🏻‍♀️). Le thème de ce voyage était les forêts de pierre 🏞, notamment celles de Zhangjiajie, qui auraient inspiré le réalisateur James Cameron pour l’univers de son film de science-fiction « Avatar » 🎬.

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Nous commençons donc par une nouvelle province pour nous, le Hunan (湖南省, signifiant province du Sud du Lac), terre d’origine de Mao Zedong 🇨🇳. Premier objectif: la région reculée et montagneuse de Zhangjiajie (张家界市), rendue célèbre par sa réserve naturelle, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO.

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Parsemée de pics rocheux majestueux, cette forêt de pierre abrite aussi une faune 🦅🐒🦋🐻 et une flore luxuriante 🌳💚. Ces 3000 pics karstiques ressemblent effectivement beaucoup aux montagnes flottantes des Hallelujah du film Avatar, les nuages qui s’y accrochent ☁️ renforçant d’autant plus cette similitude avec les paysages de Pandora 🌑. En chinois, les monts Hallelujah sont aussi appelés Tianzi Shan, pouvant être poétiquement traduit par « les premières montagnes étranges de Chine » ⛰. C’est beau, c’est féérique, voyez par vous-mêmes 📷:

Et c’est encore plus impressionnant en vrai! Ce pont de pierre est particulièrement à couper le souffle, et la photo ne nous permet pas de rendre l’effet waow que nous avons ressenti 😮

Ces paysages fantasmagoriques résultent de l’érosion de couches de grès , qui a laissé ces colonnes aux formes variées. En effet, il y a plus de 300 millions d’années, cette région était recouverte par l’océan. Avec la tectonique des plaques, les fonds marins ont émergé, puis l’érosion et les glissements de terrain ont formé progressivement le paysage de Zhangjiajie, qui ressemble à présent à une vaste forêt de pierre. Il n’était d’ailleurs pas rare de voir des fossiles de coquillages pris dans la roche, trace d’une époque lointaine de plusieurs millions d’années 🐚.

Bien que nous ayons choisi de faire ce voyage en-dehors des congés en Chine (un avantage d’être au lycée français), nous avons découvert la Chine post-COVID, avec une foule qui nous était encore inconnue jusqu’à présent (mais où étaient-ils tous cachés pendant ce temps?). En Chine, le tourisme étranger ne représente que 2% environ du tourisme, les touristes étant essentiellement des Chinois, et plutôt des retraités en période « creuse » (les Chinois voyagent essentiellement pendant les périodes de congés nationaux, ils ont en effet trop peu de vacances en plus de ces jours d’exode populaire). Ces groupes de retraités étaient d’ailleurs facilement reconnaissables, tous avec la même casquette 🧢 🔴, à suivre 1 ou 2 animateurs équipés d’un drapeau pour les reconnaître, et d’un mégaphone 📢 🏳.

Mini aperçu… car là en fait il n’y a absolument personne 😅.

Heureusement, notre guide Bree, qui nous a accompagné tout au long du voyage, connaissait la région comme sa poche, et nous trouvait des « passages secrets » 🤫 qui nous permettaient de nous évader loin de la masse touristique avide de prendre LA photo (sachant qu’il y a mille autres endroits où immortaliser ces paysages, mais cela nécessite de marcher un peu, de faire un petit effort quand même 🥾).

Quelques cerisiers en début de floraison, c’est la magie du printemps en Asie 🌸.

Par contre même hors de sentiers battus, les chemins restent globalement très tracés, c’est toujours compliqué, si pas interdit, d’en sortir. D’ailleurs, la plupart des touristes chinois préfèrent se déplacer en bus 🚌 (ils sont réellement partisans du moindre effort), et comme on le voit sur cette carte, le parc est très bien organisé pour cela.

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Néanmoins, étant donné l’afflux touristiques du lieu, cela est indispensable afin de préserver la biodiversité si riche du parc. Le parc de Zhangjiajie bénéficiant d’un climat subtropical et d’une biodiversité étonnante, de lacs et cascades scintillants, il abrite des variétés d’arbres rares et plusieurs espèces d’animaux en voie de disparition. De façon moins rare dans l’absolu, mais pourtant toujours encore étonnant pour nous, nous croisâmes un certain nombre de petits singes aux fesses roses 🐒, en train de jouer dans les arbres, de se dépouiller, ou pour certains si peu farouches qu’ils s’amusaient à voler la nourriture des passants peu précautionneux.

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photo prise by my dear Lydie!

Entre 2 sites secrets de Bree, nous passons aussi par ces points caractéristiques des sites touristiques chinois: des snacks avec des odeurs si typiques de la Chine, dont le fameux « tofu qui pue » (pour ceux qui me lisent depuis la Belgique, ce tofu me rappelle le fromage de Herve, aussi bien par l’odeur que par le goût), ou ces boutiques pour s’habiller de façon traditionnelle, afin d’agrémenter ensuite les photos pour immortaliser le « j’étais là! ».

Dans le programme de notre voyage, il était ensuite prévu que nous passions une nuit dans le parc. Il était indiqué: « guesthouse au confort simple », et il n’y avait pas d’autre choix car il s’agit du seul logement dans le parc. Nous nous attendions donc à quelque chose de très rustique, et nous ne fûmes pas déçus! Dépaysement total garanti, mais une nuit et pas 2 comme ça 😅: finissions made in China (les fissures dans les murs permettaient d’admirer le paysage au-travers), une planche en bois en guise de matelas (avec un fin sur-matelas par-dessus), et une salle-de-bain qui nous a bien fait rire (il vaut mieux, plutôt que d’en pleurer):

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Autre blague: la chambre qui nous était proposée en arrivant est une chambre de 2 lits de 1m20 de large chacun. Pratique quand nous sommes 4! En Chine, tout le monde dort ensemble: les enfants avec les parents, tout le monde dans le même lit. Notre guide avait l’air aussi surprise de ce qui nous était proposé (elle savait qu’en Occident les habitudes sont différente). Mais heureusement nous étions les seuls clients et nous avons donc utilisé 3 chambres juste pour nous 4: 1 avec un grand lit et de vrais WC, mais pas d’eau chaude (nous n’y avons donc pas dormi) – et 2 autres avec 2 lits d’1m 20, avec eau chaude mais WC à la turc. La Chine, c’est le pays du système D 💡!

En Chine du Sud, les hivers sont relativement doux, même si les soirées et les nuits peuvent être très froides pendant plusieurs semaines. Néanmoins, il n’y a pas de chauffage comme c’est le cas à Pékin, mais nous trouvons plutôt des clim’ réversibles dans ces régions méridionales (nous en avions déjà parlé lors de notre voyage dans les Tulous il me semble). C’est clairement insuffisant, surtout si on ajoute à cela les fissures dans les murs et jointures des fenêtres complètement inexistantes, ainsi que le fait que, pour une raison que je ne m’explique pas, il a beau faire 12°C dehors, ils ouvrent toutes les portes et toutes les fenêtres 🥶. Ainsi, à l’instar de nos amis les Chinois, nous avons dîné avec nos gros pulls🧣 (quoiqu’eux ils sont carrément en doudoune), sur cette mini table avec un gros rideau en guise de nappe, de façon à recouvrir nos jambes alors chauffées grâce au charbon incandescent dans le mini-chaudron sous la table 🔥.

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Donc à l’intérieur, pas vraiment confortable ni le charme authentique que nous aimons tant. A l’extérieur, pas beaucoup mieux… 🤦🏻‍♀️

C’est donc très chinois, mais le très chinois que l’on aime moins. Cela étant dit, en se tournant de l’autre côté du bâtiment, nous étions entourés de champs de thé 🍵, et surtout entouré de calme 🤫, loin de du fourmillement de nos amis les groupes de touristes retraités à casquette rouge, qui expédient beaucoup plus leur visite du parc, un jour étant pour eux suffisant.

La même prise 1 mois plus tard, par notre amie Lydie, qui a eu la chance d’avoir plus de ciel bleu, et surtout des fleurs🌸🌺!

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Il y faisait vraiment calme, la fabrication du thé étant à l’arrêt à cette époque de l’année (selon Lydie, la récolte devrait démarrer la semaine suivant son voyage).

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En marchant dans les environs avant le dîner, nous nous serions presque même crus à Murat, en balade près du lac du Pêcher 🎣, dans le bois de la Pinatelle 🌳, pour ceux qui connaissent 😉.

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Tout au long du voyage, ce fut aussi l’occasion pour nous (et surtout pour les enfants), de faire quelques « plus …  » du monde. Cela fera d’ailleurs l’objet d’un article à part entière, car ne cherchez pas, tous les trucs les plus hauts, les plus grands, (et les plus sots peut-être aussi?) du monde sont en Chine ✚🌁✚🎢✚🌏. Quand ça n’était pas un record, c’était tout de même très vertigineux. A Zhangjiajie, nous avons par exemple commencé notre tour par une montée en télécabine 🚡. Pas la plus quelque chose (celle-ci… suspense… sera pour un peu plus tard), mais ça n’en reste pas moins impressionnant

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Ou le passage sur des ponts assez compliqués pour moi… Merci Julien pour la photo! Moi j’ai traversé très vite 🔝.

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Ou à la descente lors du second et dernier jour dans le parc de Zhangjiajie, nous avons emprunté « l’ascenseur extérieur le plus haut du monde ». Construit à flanc de falaise, l’ascenseur Bailong (百龙), signifiant « Cent dragons » est tout de même haut de 326m.

Je ne pense pas que cela soit la chose la plus sotte, mais c’est toujours surprenant quand on pense arriver sur un spot loin des foules, et de se retrouver avec une petite dame parlant seule avec ses deux téléphones, face à un paysage sublime. Elle faisait une vidéo pour ses followers TikTok, scène toujours aussi surprenante de mon point de vue, s’adresser à un écran face à un paysage si magnifique a un côté superficiel auquel je ne me ferai jamais.

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A environ 40′ de voiture du parc, nous arrivons au grand Canyon de Zhangjiajie, connu pour son long (430m) et haut (300m) pont de verre, inauguré en 2015.

C’était très impressionnant d’avoir l’impression de marcher dans le vide. Apparemment il est interdit d’y marcher avec une gourde métallique, car si elle venait à tomber sur le verre, il pourrait se fendre. Rassurant!

Il était aussi possible de faire un saut à l’élastique à partir du pont . Même si faire cette expérience nous tente bien, nous la ferons dans un pays où nous serons capable de comprendre les consignes de sécurité ⚠️🤷🏻‍♀️. Par contre coup de chance, à notre passage une femme s’apprêtait à se jeter dans le vide 😱. Moi je dis chapeau, car c’était sacrément vertigineux! Beaucoup plus à notre portée, nous nous sommes amusés à jouer les photographes, c’est clair que le lieu nous permet des perspectives intéressantes 📷.

Ensuite, après une descente en tyrolienne pour Augustin et Julien, et en toboggan pour Constance et moi, nous avons pu profiter du Canyon vu d’en bas, et de la fraîcheur de l’eau qui y circule 💦.

Au troisième matin, après une nuit dans une chambre parfaite pour une photo de magasine, mais dont la fenêtre donnait sur le mur voisin et ses climatiseurs (on ne peut pas tout avoir: c’était soit la vue mais un lit trop petit pour les enfants, soit 4 vrais couchages mais la vue sur ce mur bruyant), nous partons pour la montagne Tianmen (天门山 , signifiant Montagne de la Porte du Ciel), célèbre pour son immense arche naturelle haute de 130m, creusée dans la montagne.

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Pour y monter, nous avons emprunté le téléphérique le plus long du monde 🚡, construit par la société française Poma. Long de 7455m et d’un dénivelé de 1279m, il ne s’agit en réalité plus de plus long téléphérique du monde, celui-ci ayant été détrôné en 2020 par un téléphérique de 9km de long, construit encore par Poma, en Serbie. Mais la Chine aime ses records, nous n’allons donc pas leur gâcher cette fierté.

Un autre record que nous pouvons observer pendant notre ascension est la fameuse « route aux 9️⃣9️⃣ virages ». C’est sur cette route tortueuse et longue de 11km que s’était lancé Ken Block pour son Climbkhana en 2019 🏁.

Toujours pour les amateurs en recherche de sensations fortes, la montagne Tianmen est aussi très connue pour les sauts en wingsuit 🦅, l’objectif étant de traverser l’arche le plus vite possible . Nous n’avons évidemment pas pu voir un de ses sportifs de l’extrême à l’oeuvre, la discipline étant surtout prisée des occidentaux, encore très rare à cette époque.

Arrivés tout en haut, avant d’atteindre l’Arche, nous devons faire le tour de la montagne, à flanc de falaise, sur des passages en pierre ou en verre. Ne vous m’éprenez pas, je suis morte de trouille, faire des photos est alors pour moi un excellent moyen de me détourner l’attention.

Tout en haut de la montagne, nous pouvons aussi visiter un temple bouddhiste. La construction très récente (même si les conditions climatiques un peu rudes du lieu lui confère un aspect plus ancien) reproduit la construction originelle datant de la dynastie Tang (6ième siècle après JC). Mais rappelons qu’en Chine ils sont beaucoup moins attachés que nous à la préservation des choses très anciennes. Elles peuvent être restaurées avec des moyens et matériaux plus modernes, sans toutes les contraintes que nous nous mettons, à tort ou raison, pour préserver l’authenticité de l’époque.

Le temple était complètement vide, sauf un monsieur qui nous suivait tout au long de la visite. J’ai demandé à notre guide ce qu’il nous voulait (en tant qu’étrangers, cela peut arriver que l’on nous suive pour s’assurer que l’on n’ait pas d’intention non autorisée), et il s’avérait qu’il voulait nous écouter parler anglais. C’est effectivement rare depuis le début du COVID que les Chinois puisse le pratiquer 🇬🇧.

Pour redescendre, nous avons emprunté « le plus long escalator du monde » . En réalité il s’agit de 12 escalators successifs à flanc de montagne, et ces portions d’escalators le rendent finalement moins impressionnant que les longs et raides escalators descendant dans les stations de métro de Moscou, celles-ci étant très profondes pour servir d’abri antiatomique.

Après ces 3 jours dans la région de Zhangjiajie, nous prenons la route vers la vieille ville des Miaos et des Tujia de Furong. Les Miaos sont une des minorités principales de la région, formant la sixième minorité ethnique de Chine, en nombre de personnes. Parmi l’artisanat des Miaos, on note notamment le façonnage de l’argent, qui sert notamment aux parures des femmes. Merci à toutes ces chinoises qui se sont habillées pour l’occasion dans ces tenues traditionnelles, toujours dans l’objectif de passer 2h à sillonner les rues suivies d’un photographe, pour immortaliser auprès de leurs followers ce séjour dans cette jolie petite ville.

Le village de Furong, perché en arc de cercle autour d’une belle cascade, est à l’origine d’un roman dont la version cinématographique 🎬 a été réalisée sur place et lui a donné son nouveau nom: la ville des Hibiscus 🌺 (芙蓉 fúróng). En effet, à l’origine ce village s’appelait Wangcun et portait bien son nom: « Wan » signifiant roi, le village s’appelait donc le village du roi car le roi de la minorité Tujia y habitait. Il s’agit d’un film relatant une histoire d’amour, comme les Chinois en aiment tant ❤️. Notre compréhension est que les mariages étant encore ici très souvent des mariages arrangés 💍 (avec les marieuses, comme dans le film Mulan), ils vivent le grand Amour au travers de ces fictions cinématographiques.

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La nuit, la cascade et les habitations illuminées qui s’accrochent dans la montagne et la verdure dessinent un tableau féerique inoubliable 🏮💦.

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De notre chambre, la vue était aussi superbe, aussi bien de jour que de nuit (quoique…). Qui dit jolie vue dit attractif, donc beaucoup de monde, donc beaucoup de bruit (rappelez-vous, la nuit les Chinois sont très bruyants, notamment car sont très férus de KTV (= karaoké) 🎤🎶).

Nous avons tout de même pris beaucoup de plaisir à « nous perdre » dans les rues de la ville, où nous avions nous-même eu l’impression d’être une attraction touristique, les étrangers étant encore si rares dans la région (l’ouverture des frontières au tourisme extérieure a d’ailleurs été annoncée au cours de notre séjour là-bas).

A noter aussi que, dans cette région, les spécialités culinaires sont déjà plus épicées qu’à Pékin, à l’instar de cet artisan fabricant du Chili 🌶🌶🌶, pâte à base de piments rouges que l’on retrouve dans de nombreux plats en Chine, dont dans cette région. D’ailleurs, saviez-vous que le piment n’est arrivé que récemment en Chine (quand je dis récemment, cela doit faire tout de même environ 300 ans)? Originaire d’Amérique latine, il aurait été introduit en Chine par les Portugais 🇵🇹, qui avaient installé un comptoir commercial à Macao 💰.

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Après cette bien jolie ballade, la nuit fut un peu plus compliquée: c’était très / trop bruyant. Entre les KTV qui hurlaient à tue-tête jusqu’à 23h30, ceux qui s’étaient installés sur notre terrasse (pas fermée) pour regarder des vidéos sur leur téléphone (sans écouteurs, sinon ce n’est pas drôle), ou encore l’éléphant qui devait occuper la chambre au-dessus de la nôtre, c’est d’un mauvais pied que nous avons pris le matin suivant un petit déjeuner typique chinois: nouille 🍜, riz 🍚, et autre plats inconnus 🥢 que nous n’avions pas trop envie de goûter cette fois-ci. Il faut dire qu’en Chine, on mange très peu sucré, voire pas du tout (d’ailleurs nous trouvons beaucoup de choses trop sucrées à présent 🧁🍪). Le petit déjeuner ne fait pas exception, et notre guide Bree faisait au mieux pour nous trouver au moins quelques fruits 🍌, du café ☕️ (soluble, mais c’est mieux que rien), du jus de fruits pour les enfants (quoique maintenant ils boivent du thé), et des oeufs 🥚. Ce matin-là, le petit déjeuner sur une terrasse humide (il avait plu toute la nuit), avec des poissons séchés et fumés 🐟 accrochés à côté de nous, était un peu rude. Mais comme toujours, on en garde à présent un très bon souvenir, même une certaine fierté, en se disant que l’on a été dans le fin fond de la Chine, dans les terres de Mao, Chine qui n’a plus aucune adaptation aux Occidentaux que nous sommes, le tourisme étranger, qui était déjà peu fréquent avant le COVID 🦠, étant devenu proche du néant depuis 3 ans.

Le soleil se remet à percer les nuages, la bonne humeur et l’enthousiasme habituels reviennent donc, et nous nous mettons en route pour les gorges de Zuolong. De taille plus modeste que le Canyon de Zhangjiajie, le parcours est toutefois très escarpé par endroit, avec ces petites échelles métalliques 🧗🏻‍♂️🪜, à la fois si étroites et espacées que nous avons dû faire demi-tour pour notre petite Constance, malgré l’aide de Super-Papa 🦸🏼‍♂️👨‍👧.

Changement de programme pour ce matin, nous allons donc à Hongshilin (signifiant forêt de pierres rouges), le géoparc national des Roches rouges qui possède de nombreuses formations rocheuses en forme de vagues, dont les couleurs changent avec le temps du noir ⚫️ au rouge 🔴.

Il y a en effet 480 millions d’années, cette zone était située au fond de l’océan de l’Ordovicien (奥陶海底), durant l’ère Paléozoïque. Ces étonnantes structures calcaires ont été sculptées par l’érosion différentielle des couches calcaires plus tendres ou plus résistantes après le retrait de l’océan. La couleur rouge de la roche carbonatée est quant à elle due aux impuretés qu’elle contient.

Avant de partir, nous nous arrêtons, comme souvent lors de nos voyages, donc un restaurant routier (je n’ai pas de meilleur nom pour ce type d’endroit sans équivalent chez nous) où nous avons pris notre déjeuner, parmi les chinois toujours aussi curieux par notre famille à l’allure si inhabituelle dans la région. Ce fut l’occasion d’assister à une partie endiablée de Mah-Jong 🃏, jeu traditionnel, mais aussi complexe, chinois ressemblant de loin à un mix entre le Poker et le Rami.

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Direction ensuite Phénix Town, ou en chinois Fenghuang (凤凰), une autre très célèbre ville d’eau. Cet oiseau mythique chinois , qui règne sur tous les autres oiseaux, est selon la légende le plus doux et le plus sage des oiseaux. Les mâles sont appelés feng (鳳) et les femelles huang (凰). Cette distinction des sexes est parfois éclipsée pour ne former qu’une seule entité féminine: le fenghuang. En effet cet oiseau est souvent associé au dragon (dont il est parfois considéré comme le parent) qui est son pendant masculin. Il était d’ailleurs l’emblème personnel de l’impératrice, celui de l’empereur étant le dragon.

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Classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, la vieille ville fut construite au bord de la rivière Tuo, traversée par une succession de ponts. Sa version actuelle daterait de la dynastie Qing, au XVIII ième siècle. Avec ses vieilles maisons en bois construites sur pilotis et ses remparts, on a adoré encore « se perdre » dans les ruelles pavées marquées par le temps, pour un véritable bain de foule au milieu des odeurs de nourriture typiques de la Chine.

Les habitations sur pilotis ci-dessous seraient les plus anciennes de la ville. Ici une vue de nuit et de jour, les Chinois étant toujours aussi doués pour mettre en valeur les villes par de nombreux éclairages.

Constance a encore une fois été l’attraction des Chinois, sa petite bouille blonde étant si peu courante dans le coin.

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De nuit, la ville se réveille et se met à briller de mille et une lumières colorées, et un marché de tas de choses que l’on n’ose pas forcément goûter s’installe.

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Qu’importe la foule soudainement grandissante, nous avions trop envie de découvrir cette ville si typique et si belle, une de ces nombreuses Venise chinoises au charme malgré tout toujours authentique.

Depuis le début de ce voyage, nous goûtons à la Chine pré-COVID, avec le tourisme de masse presque essentiellement chinois (peu d’étranger venaient dans cette région, même avant 2020). Et comment reconnait-on les touristes chinois? Un peu comme les occidentaux en amplifié: ils sont très… très! nombreux, ont de gros appareils photos, et adorent toujours autant se faire photographier en tenue traditionnelle (le fait de tous vouloir se démarquer des autres les rendent finalement tous semblables).

Le lendemain, nous repartons dans les mêmes ruelles que la veille, et c’est un tout autre visage de la ville que nous découvrons: c’est plus calme, plus authentique, tout aussi beau:

Petite blague de ce matin tout de même: nous avons été prendre notre petit déjeuner dans un coffee shop pas très loin de l’hôtel (pour avoir du café et des chocolats chauds), et Bree nous avait acheté des fraises 🍓 et quelques pâtisseries. Sans trop savoir à quoi elles étaient faites, Julien pris une grande bouchée de ce qui ressemblait à un petit chausson aux pommes, pour en fait se rendre compte que c’était fourré au durian (vous vous rappelez? Ce gros fruit à l’odeur repoussante, typique de l’Asie du Sud-Est?) Le pauvre, il a eu de relents de durian toute la journée 🤢.

Suite du voyage vers une curiosité toute particulière pour nous: la Grande Muraille du Sud de la Chine. Venant de Pékin, nous pensions que la Grande Muraille était présente uniquement au Nord de la Chine, pour se protéger des Mongoles. Mais que nenni, une autre muraille, bien plus petite (longue de seulement 190km), a été érigée dans le Sud sous la dynastie Ming, avec pour objectif d’isoler les minorités hostiles au pouvoir impérial. Elle aurait ensuite été détruite par les Miaos à la fin de cette dynastie. La minorité Miao n’étant pas très redoutable, la muraille a une structure moins résistante que celle du Nord. Au fil des siècles, les pierres de la Muraille ont été utilisées par les locaux pour construire leurs maisons, les réservoirs et les canaux. Aujourd’hui, il ne reste plus grand chose de la muraille originelle, et c’est sur une reproduction circulaire que nous allons marcher.

Avant de monter sur la muraille, nous sommes abordés par une petite marchande de fleurs, au chapeau traditionnel de la minorité Miao, chapeau signifiant que la dame est déjà mariée (heureusement qu’elle avait son chapeau, cela nous a permis d’éviter tout risque de malentendu 😅).

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Nous reprenons à présent la route vers la province voisine: le Guizhou (贵州), pour la dernière étape du voyage. Pour la nuit, nous nous arrêtons dans le mignon petit village de Jiangkou, au pied du mont Fanjiang, notre dernière étape du programme. Ce village avait des airs nous rappelant les paysages des aquarelles chinoises, avec les montagnes en forme de pain de sucre se reflétant sur des lacs brumeux 🌁.

Ici encore nous nous arrêtons pour un déjeuner dans une auberge (je cherche toujours comment appeler ces endroits) chinoise.

Par contre grosse déception en arrivant dans notre chambre, je crois que l’agence a confondu les mots authentique et rustique… C’est rigolo une fois, mais 2 pas vraiment. En plus il y faisait froid, et le temps dehors ne donnait pas envie de se poser sur la terrasse.

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Notre super Bree nous a donc trouvé un autre hôtel, exactement le genre que nous aimons: petit, calme, beau, confortable. Et en plus nous avons pu nous mettre au chaud pour une partie de jeu de société, avec un bon chocolat chaud, et même des gaufres (ne pas chercher à comprendre la tête de Julien, private joke 😁🤔)!

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Passé ce petit couac, nous partons pour notre dernier jour de voyage à l’assaut de Fanjingshan (梵净山) ⛰. Le mont Fanjing est un lieu exceptionnel, connu notamment pour les deux temples bouddhistes sacrés culminant à plus de 2300m, au sommet du pic d’or des nuages rouges. Le mont Fanjing est très important dans le bouddhisme chinois. En effet, il est considéré comme le bodhimanta (lieu où l’on atteint l’illumination) du Bouddha Maitreya. C’est pour cette raison que deux temples y ont été érigés à son sommet, sous la dynastie Ming (1368 à 1644). On y trouve le temple du Bouddha et le temple de Maitreya, reliés par un petit pont. Tous deux sont un haut lieu de pèlerinage pour les bouddhistes du monde entier.

Selon l’UNESCO, qui a classé la réserve naturelle de Fanjingshan « réserve de biosphère », Fanjingshan est le seul écosystème de forêt primaire à avoir été bien conservé à une telle latitude. Par ailleurs, elle compte une espèce endémique de singe, le rhinopithecus brelichi, ou plus appelé simplement le singe doré 🐒.

L’inconvénient de cet endroit, c’est qu’il est dans les nuages en moyenne 2 jours sur 3. Les probabilités n’étaient donc pas avec nous, même si nous avons espéré jusqu’au bout d’avoir une éclaircie et un dégagement des nuages. Sans nuage, voici à quoi cela ressemble (vous verrez un peu plus bas que notre décor était disons un peu plus brumeux, les 2 photos ici sont prises de notre programme de voyage):

Mais reprenons cette journée depuis le début: prendre nos tickets 🎟! Comme toujours, nous remercions le ciel d’avoir une guide avec nous, car quand nous arrivons avec nos passeports étrangers et notre niveau de chinois proche du néant, cela amène toujours à des situations très cocasses. Il fallut être patients, le temps que la guichetière trouve un collègue sachant comment renseigner leur logiciel avec nos données (oui, à chaque fois que nous prenons un ticket, tout est soigneusement fiché, histoire de savoir qui fait quoi quand…)

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Ensuite, nous voilà partis pour de longues files d’attente, une montée en mini-bus 🚐 (la route étant trop étroite et tortueuse pour des gros bus avec une plus grande capacité), une montée en télécabine🚡, et enfin une dernière, mais pas moins longue, ascension en escaliers, pour le plus grand bonheur des enfants.

Arrivés au premier point d’intérêt de par sa forme insolite, le rocher champignon 🍄 culminant à 2318m, c’est sans surprise que nous sommes dans les nuages 😶‍🌫️.

Nous ne nous décourageons pas pour autant, et continuons notre ascension, reprenant espoir à chaque impression d’une nouvelle éclaircie. Avant de partir pour la dernière montée, complètement dans les nuages, nous passons par un autre temple bouddhiste, celui-ci étant d’ailleurs toujours habité par des moines.

On en profite pour un petit casse-croûte (on rêve d’un vrai jambon beurre quand même là)

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Alors on y croit ou pas? De moins en moins quand même… 😶‍🌫️🌁🌫

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Vous n’allez pas me croire, mais même pour monter il y avait la queue! C’était très raide, à la limite de la via ferrata, et quand c’est dangereux et que tout le monde s’arrête pour prendre des photos, ben ça ralenti tout le monde derrière! Et comme le Chinois ne sont pas de gros aventuriers, et que grimper ces marches en talons 👠 et/ou tenue de ville pour certains (et même des tenues d’Harry Potter!), c’est vraiment long 😅.

Mais arrivés tout en haut, malgré les nuages, c’est grandiose 🤩

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La descente était tout aussi impressionnante que la montée, et de temps en temps nous nous retournions pour espérer voir les temples se dégager sur un ciel bleu, mais en fait non 😭

Toutefois, nous avons pu capturer cette mer de nuages lors de la descente en téléphérique

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Et voilà la conclusion de ce superbe voyage, où pour la petite anecdote de fin, nous avons pris l’avion 🛫 avec tout un groupe de retraités qui était parti « en colo » dans la région. Je dis en colo car ils sont vraiment comme des enfants, qui prennent l’avion pour la première fois. Ils avaient l’air tout perdus, venaient se faire prendre en photo avec nous (surtout avec Julien, je n’étais plus d’humeur à supporter ce vacarme je dois avouer). Ils se levaient sans cesse alors que les hôtesses leurs sommaient de s’asseoir et de s’attacher, changeaient de place en permanence. Bref des enfants! Le clou, ce fut ces 2 accompagnatrices qui sont venues s’asseoir derrière nous, tout à l’arrière de l’appareil, et qui se sont levées et mises à hurler dans leurs mégaphones 📢 alors que les trains d’atterrissage venaient à peine de touche le tarmac. Là il n’y avait plus de barrière de la langue, elles se sont tout de suite arrêtées quand nous leurs avons dit en français de se taire et de s’asseoir. Ils sont vraiment incroyables 🤣…

Et maintenant quels sont nos prochains projets de voyage? Biensûr l’Europe cet été, et puis ensuite il sera temps de voyager en Asie 🌏, voir autre chose quand même, et surtout s’éloigner de ces foules de Chinois, à présent complètement libérés de toutes contraintes et contrôles de leurs déplacements, alors que nous aspirons au calme et la solitude en voyage.

福建土楼 – Les Tulous du Fujian

福建土楼 – Les Tulous du Fujian

Youpiiii, la Chine s’est à nouveau ouverte, le COVID fait partie du passé (sauf biensûr dans les hôpitaux paraît-il, nous ne l’avons pas vu, mais ce fut probablement une réalité en décembre), mais finie la politique 0-COVID, finies les restrictions, on peut enfin vivre NOR-MA-LE-MENT! Dès que nous avons vu la possibilité d’à nouveau pouvoir voyager au sein de la Chine sans risque d’être bloqué quelque part, nous avons pris nos billets pour une nouvelle destination à l’occasion des vacances de Noël: le Fujian, province du sud-est de la Chine, dans l’arrière-pays de détroit de Taïwan.

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La première partie de notre voyage nous mène dans le pays Hakka, à environ 200km de Xiamen, pour découvrir une spécificité unique à cette région: les Tulous (signifiant « bâtiment en terre » en Mandarin). Construits à partir du XVième siècle, les Tulous sont d’énormes bâtisses, rondes ou carrées, construites initialement à la fois dans un rôle d’habitation, mais aussi défensif. De la taille en moyenne d’un terrain de football, construits sur 3 à 5 étages autour d’une cour centrale, les Tulous sont un modèle de vie communautaire comme nous n’en avons jamais vu. Pour bien illustrer cela, voici quelques photos prises d’extérieur puis d’intérieur, et après je vous explique tout cela:

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Le village Tulous de Chuxi,  avec le plus vieux tulou, datant de plus de 600 ans
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Extérieur du Tulou du Yuchanglou

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Il n’y qu’une trentaine d’année que l’on connaît les Tulous. Notre guide nous a d’ailleurs raconté avoir accompagné au début des années 90′ un photographe français (je n’ai pas retrouvé qui), venant faire un reportage pour un magazine photo (je ne sais pas lequel). Il s’agissait d’une des premières fois où des personnes étrangères aux Tulous se rendait dans cette région. Il n’y a d’ailleurs que deux ans qu’une vraie route permet de s’y rendre, c’est donc encore un territoire assez méconnu, qui vit pratiquement en autarcie. Pour la petite anecdote, pendant la guerre froide les Américains ont cru qu’il s’agissait de silos à missiles. Il est vrai que vu du ciel, l’image doit être assez atypique 🛰.

Les Tulous sont donc des habitations construites selon une architecture défensive 🤺, pour protéger ses habitants contre disait-on les pirates japonais 🏴‍☠️. Ceux-ci n’étaient toutefois pas plus japonais que vous et moi, mais il s’agissait de pêcheurs chinois trop pauvres pour s’acheter à manger 🎣. En effet, l’arrivée au pouvoir de la dynastie Ming correspond à un moment de repli de la Chine sur son territoire intérieur. Les populations des zones côtières étant très appauvries, celles-ci n’avaient pas d’autres solutions que d’aller plus dans les terres, pour trouver de la nourriture, quitte à la voler.

Les Tulous sont faits d’un mélange d’argile, de calcaire et de sable qui, une fois séché, est dur comme du béton. Leur base est renforcée de très grosses pierres 🪨, afin de protéger l’enceinte contre les potentiels assaillants qui voudraient se frayer un passage au travers du mur. Les fenêtres donnant sur l’extérieur sont petites et ne sont qu’aux derniers étages 🪟, à l’instar des meurtrières de nos châteaux.

Il n’y a qu’une porte principale pour rentrer dans un Tulou, et parfois une porte secondaire 🚪. Je me découvre ici en Chine une fascination pour les portes je crois 😆, car je dois avoir aussi des dizaines de photos de portes des Hutongs pékinois. Peut-être car elles sont l’ouverture un autre monde, une autre culture, un mode de vie. D’ailleurs certaines portes ont été fermées à notre approche, le COVID 🦠 étant en pleine explosion en Chine, les paysans de cette région reculée sont effrayés par les étrangers (comprendre étrangers au village).

Dans les Tulous, plusieurs centaines de personnes y vivent de façon communautaire et égalitaire: tous les logements sont les mêmes, il n’y en a pas un mieux que l’autre (quoique dans un tulou carré, les habitations dans les angles sont plus sombres), et tous ont la même taille. L’organisation est la même pour chaque famille: la cuisine au rdc, l’étage au-dessus sert de réserve pour les provisions, et on retrouve les chambres aux étages suivants. Des escaliers extérieurs permettent de relier les pièces, et des coursives relient chaque appartement. Il n’y a pas vraiment de sanitaires ici: on a pu voir des seaux en bois servant de pots de chambre, et des robinets dans la cour permettant probablement de faire sa toilette.

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Tulou du Yuchanglou, célèbre pour ses piliers inclinés, sans doute un défaut de fabrication, et pourtant ce Tulou de tient debout depuis plus de 600 ans

Les escaliers reliant chaque étage, ayant parfois des allures de grenier

Ici, les cuisines du rez-de-chaussée servent aussi d’échoppes. Nous nous sommes d’ailleurs souvent demandés de quoi pouvaient bien vivre les gens d’ici.

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Tranche de vie dans les Tulous de Chengqilou et du Yuchanglou:

Au milieu des Tulous, surtout des plus gros, on trouve une petite bâtisse faisant office de temple. Il y a aussi parfois d’autres constructions au milieu, peut-être des sanitaires ou d’autres zone de stockage des réserves alimentaires.

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Le Tulou du Yuchanglou, avec ses piliers de travers

Certains des Tulous que nous avons vu ne sont plus habités, comme ce Tulou carré avec pour seules habitantes quelques poules.

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D’autres plus rares Tulous ont une architecture d’habitation chinoise traditionnelle, en rectangle et avec un étage supérieur sur un des côtés. L’esprit égalitaire est donc moins présent ici.

Encore aujourd’hui, les habitants des Tulous vivent quasiment en autarcie, et des cultures à perte de vue de riz 🌾, de thé 🍵, et de légumes 🥬🍠 entourent les habitations.

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Préparation de la terre pour semer le riz qui sera récolté à la prochaine saison (vers septembre/octobre)

Une fois récoltés, les légumes sont mis à sécher au soleil, afin d’être conservés tout l’hiver (on y trouve notamment des patates douces et de la moutarde de Chine).

Mais aussi du tapioca, servant de base pour la conception de nombreuses spécialités culinaires locales. Nous l’avons vu sur toutes ses formes, de la racine broyées, à une sorte de meule qui en faire une pâte qui sera ensuite étalée au soleil☀️ pour devenir par la suite une poudre bien blanche.

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Chacun amène ses racines de Tapioca pour les broyer dans cette unique machine du village.
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C’est avec ce pressoir que le tapioca sera transformé en pâte, qui ensuite en séchant au soleil deviendra une poudre blanche

Il y a aussi bien entendu la viande, elle aussi séchée au soleil (au côté du linge). Ici pas de déchets, la peau de la tête du cochon aussi se mange!

Une autre spécialité du coin est le vin de riz. Nous l’avons goûté, surtout par politesse à vrai dire, il se boit chaud, et ressemble à du Muscat (chaud… )

Mais parmi les villages de Tulous que nous avons pu voir, celui de Shiqiao fut mon préféré. C’était le moins touristique, donc le plus authentique, mais par conséquent celui aussi où les habitants semblaient le plus craintifs en nous voyant arriver, à l’instar d’une petite mamy qui s’occupaient des légumes séchant au soleil, qui est partie presqu’en courant à notre approche, pour mettre un masque 😷. Ici nous n’avons pas pu non plus rentrer dans les Tulous. Mais ça n’est pas grave, au moins ici c’est la vraie Chine, celle que l’on est venue voir!

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Le village de Shiqiao, posé sur les berges d’une rivière

A Shiqiao, nous sommes arrivés à la période où les habitants oeuvraient pour refaire les bords de la route (la moitié étant réellement à l’oeuvre, et les autres qui regardaient, c’est typiquement chinois!). C’était intéressant de les voir tous ainsi oeuvrer ensemble pour le bien commun, ce qui est complètement dans l’esprit Tulou! Par contre il ne fallait pas regarder de trop prêt aux finitions de l’ouvrage, pas sûre que cela tienne bien longtemps. Quelques clichés de ce village:

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L’école du village

Sur la photo qui suit, on voit une ancienne tombe. Nous en avons vu quelques-unes ainsi dans la région, la plupart étant orientées vers le sud (quoiqu’une était plein nord, mais avec un paysage magnifique en face, probablement une volonté du défunt). A présent en Chine il est interdit d’enterrer les morts, tous doivent être incinérés, faute de place sans doute.

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Une tombe

Pendant ces 3 jours dans la région, nous avons pu dormir dans un Tulou, un vrai! Il était petit, carré, mais très joliment restauré! Et comme le monde est petit, nous y avons même croisé 2 copains du lycée des enfants, qui faisaient un voyage comme le nôtre avec leur maman (le truc qui j’aurais adoré faire si je n’étais pas moi aussi au travail 👩‍👧‍👦🎒🗺🧭).

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Par contre ici, niveau isolation thermique, on repassera, je crois que je n’ai jamais eu aussi froid la nuit 🥶! Il faut dire que quand les fenêtres sont en fait des planches côte à côte, et qu’il fait 0° la nuit… En fait, il n’y a que le nord de la Chine qui est doté de vrais systèmes de chauffage. Dans le sud de la Chine en revanche, étant donné qu’il ne fait réellement froid que pendant quelques semaines en hiver, et encore c’est uniquement la nuit qu’il y fait froid, au mieux il y a des clims réversibles pour se chauffer.

Mais le matin, c’était un tel bonheur de prendre le café assis sur un banc à côté de l’entrée du Tulou ☕️😎⛰, avec la pierre chauffée par le soleil! Il y avait presque un air des Alpes ici, cet endroit nous a rappelé le café à côté du comptoir à glace du www.chalethotel-ailefroide.com (pour ceux qui connaissent, et petite pub pour nos cousins des Alpes pour les autres 😉 ). C’était la nostalgie probablement

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le café du matin, rituel le plus important de la journée!

Et comme souvent, nous en avons profité pour déambuler dans les rues, on adore ça, car c’est là que l’on peut capter le quotidien, et immortaliser les souvenirs de voyage.

Après ces trois jours intenses mais inoubliables, nous reprenons la route vers Xiamen, pour prendre le bateau ⛴ pour l’île de Gulangyu (鼓浪屿), car nous avions promis aux enfants un Noël à la plage🎅🏻🌊!

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En l’espace d’une journée, nous sommes partis des Tulous cachés dans l’arrière-pays du Fujian ⛰, pour passer par Xiamen 🏙, qui à l’instar des grandes villes chinoises est semée de très hauts immeubles très modernes, et pour finir sur cette petite île où l’on circule à pied 🏝👣, et qui est très peu fréquentée à cette période de l’année.

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Le nom chinois de l’île de Gulangyu a des résonances musicales : gu lang signifiant «vagues de tambour» 🥁, en raison du son généré par le bruit des vagues frappant les écueils 🌊, et plus exactement certaine roche percée. Yu signifie «petite île». On la surnomme aussi « L’île aux pianos » 🎹🎼 en raison des pianos souvent placés dans les jardins, les parcs ou les squares afin d’être joués en public. De nombreux musées sont aussi présents sur l’île, dont bien évidemment un musée du piano, mais aussi le plus vaste musée au monde consacré au thème de l’orgue.

Cette île côtière d’environ 1.5km2 est située au Sud-Ouest de l’île de Xiamen, dont elle dépend administrativement. Passée sous contrôle européen par le traité de Nankin en 1842, l’île fut l’un des ports coloniaux de la Chine. Redevenue chinoise, elle a conservé de nombreux bâtiments coloniaux, ce qui donne un style unique entre mélange colonial est chinois, avec des aires de la région d’Antibes.

Certains « vestiges » coloniaux sont assez surprenants, d’autant plus qu’un petit panneau expliquait que cette architecture était à l’époque un modèle de design et de modernité. Vu l’aigle au-dessus de l’entrée, et le style architecturale (absolument pas design), nous en avons déduit qu’il s’agissait d’une ancienne concession allemande.

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Le point culminant de l’île, appelé le Rocher du rayon de soleil (日光岩, rìguāng yán), permet d’observer l’ile et le port de fret de Xiamen. Pour y monter, il faut passer par différents pavillons, notamment ce petit temple bouddhiste, dont la forme de la toiture est très typique de cette région.

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Par la première fois de notre vie, nous avons passé un Noël loin du froid, un Noël sur le sable à faire des châteaux et des forts contre la marée, au grand bonheur des enfants, mais aussi des parents, car nous étions complètement rincés par les 2 moins précédents (voir mon dernier article Le Big Bang de la Chine).

Avec le climat doux en journée, et frais le soir, cela donne libre court à l’imagination de Constance pour choisir ses tenues vestimentaires, toujours aussi surprenantes que décalées 😅🧢.

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Sur l’île, nous avons pu manger biensûr la spécialité locale: les fruits de mer! Et c’est vraiment excellent avec les arômes de la cuisine chinoise 🥢🐚.

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Mais pour le jour de Noël, comme cela nous arrive de temps en temps, nous n’avions pas du tout envie de manger de la cuisine chinoise, pourtant excellente, mais des fois on a des envies de cuisine française. Nous prenons donc le bateau le 25 décembre pour Xiamen, où nous avions trouvé un restaurant tenu par un chef français 🇫🇷🥖. Le restaurant, tout comme la ville, était complètement vide car ils étaient au pic de la vague de COVID (alors qu’elle était déjà loin derrière nous à Pékin). Mais nous avons passé un super moment, d’autant plus que le restaurant était juste au pied de la grande roue, au grand bonheur des enfants 🎡!

Pour la petite histoire, Xiamen est une des villes où il fait bon vivre en Chine. En bord de mer, le climat y est très agréable tout au long de l’année, quoique très chaud l’été, et elle possède aussi une université très renommée.

Xiamen, de jour et de nuit:

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Dernier petit cliché pris sur Gulangyu, nous rappelant que malgré le style complètement différent ici par rapport à la Chine que nous connaissons, pas de doute on est bien en Chine!

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Alors que Paris s’invite même dans les endroits les plus improbables

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Fin d’une petite semaine complètement hors du temps, déconnexion totale, de nouveaux super souvenirs rangés dans un coin de la tête. La Chine a le pouvoir incroyable de jouer avec nos nerfs tout en étant terriblement attachante, mais la Chine on l’aime ou on la quitte… la Chine est fascinante, elle nous émerveille tous les jours, et pour ça on l’adore ♥️!

Et pour finir, une petite touche d’humour qui résume parfaitement bien ces dernières années et la nouvelle année qui commence avec 1000 promesses de voyage 🛫 🚅!

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Le Big Bang de la Chine

Le Big Bang de la Chine

Cet article, j’ai dû le ré-écrire 10x, tellement tout a changé très vite en l’espace d’un mois. Depuis que nous sommes en Chine ( 🇨🇳1️⃣ 🕯 déjà!), on en a vu des vertes et des pas mûres, mais là depuis novembre nous sommes mangés à toutes les sauces chinoises possibles et inimaginables! Pour y voir plus clair, et il faut s’accrocher pour ça, je vais essayer de reprendre tout cela étape par étape.

La politique 0-COVID: de la volonté de protéger la population à une guerre idéologique:

Petite leçon d’histoire, car en réalité, l’histoire se répète! Avez-vous déjà entendu parlé de « la campagne des quatre nuisibles (除四害运动)? Il s’agit d’une des premières campagnes initiées lors du « Grand Bond en avant » (大跃进) (*), où à la demande de Mao Zedong, une campagne d’hygiène à grande échelle fut lancée, visant à éradiquer les 4 nuisibles, c’est-à-dire les moineaux 🐦, les rats 🐀, les mouches 🪰 et les moustiques 🦟. L’objectif? Augmenter la productivité de l’agriculture!

(*) Le Grand Bond en avant est la politique économique lancée par Mao Zedong de 1958 à 1960, dans le but de donner une nouvelle orientation politique à la Chine. Irréaliste, ce programme se révèle être un fiasco.

Pourquoi les moineaux? Ils avaient été inclus dans cette liste car ils mangeaient les graines de céréales, privant la population, majoritairement rurale, du fruit de son travail. Les masses populaires chinoises avaient été mobilisées pour éradiquer les oiseaux : les citoyens avaient pour consigne de faire du bruit 🙌 (en frappant des pots et des casseroles ou des tambours) pour effrayer les oiseaux et les empêcher de se poser, les forçant ainsi à voler jusqu’à ce qu’ils tombent du ciel d’épuisement. Les nids furent démolis, les œufs cassés, et les oisillons tués. Le procédé peut paraître abject mais, après tout, le peuple est persuadé de tuer des animaux nuisibles qui ravagent leurs récoltes… C’est donc pour la bonne cause! C’est bien simple, quelques mois à peine après le début de la campagne, la totalité des oiseaux avait disparu de Chine…

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En avril 1960, les dirigeants chinois se rendirent (enfin !) compte que les moineaux ne mangeaient pas seulement les céréales, mais aussi une grande quantité d’insectes. Plutôt que d’être augmentés, les rendements de riz après la campagne ont sensiblement diminué. Mao a alors ordonné la fin de la campagne contre les moineaux, la remplaçant par la chasse aux punaises dans la campagne en cours contre les 4️⃣ nuisibles. Mais il était trop tard : en l’absence de moineaux pour les manger, les populations de criquets 🦗 ont dangereusement augmenté dans le pays. Il en résulta une amplification des problèmes écologiques déjà causés par le Grand Bond en avant. Un tel déséquilibre écologique est d’ailleurs une des causes de la Grande Famine chinoise dans laquelle plus de 30 millions de personnes seraient mortes de faim. Le gouvernement chinois a finalement recours à l’importation de 250 000 moineaux d’Union soviétique pour repeupler le territoire chinois.

En parallèle de cette guerre contre les pauvres moineaux, pour lutter contre les mouches et moustiques, puis les punaises, les écoles distribuèrent des pompes d’insecticide aux enfants.
Les rats ne furent pas épargnés, puisque les écoliers sont, à nouveau, mis à contribution, et chaque classe lance un concours du nombre de queues de rat rapportées, pour encourager l’extermination.

Depuis 3 ans, la Chine a mené une guerre semblable: se battre contre un ennemi qui n’en est pas un, pour lequel la Nature trouvera toujours un moyen de se défendre. Guerre d’idéologie, pour ne pas perdre la face le chef de guerre n’admettra jamais avoir tort, quitte à en faire crever la Chine.

La guerre contre le COVID a ruiné des centaines de milliers de personne, a séparé pendant de longues années des familles, a fait plus de morts qu’elle n’a sauvé de personnes.

Petit jeu avant de passer à la suite, cherchez l’erreur:

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Quand il y a plus de zones à haut risque que de cas journalier…

L’étau se resserre!

Il y a un an, nous avons donc mis les pieds dans un pays où tout était hyper contrôlé, tolérance zéro envers un virus de plus en plus contagieux mais de moins en moins symptomatique. Nous avons été très limités dans nos déplacements, mais globalement avons toujours été à peu près libre au sein de la province pékinoise. Même si cela était frustrant de ne pas voyager en Chine, au moins nous étions « enfermés » dans une province riche historiquement et culturellement. Et puis avoir la Grande Muraille comme terrain de jeux pour le week-end, il y a pire quand même. Oui nous étions résignés, mais du moment que l’on ne touchait pas école, nous étions prêts à supporter ces contrôles permanents et les restrictions les plus incompréhensibles les unes que les autres.

Pour l’application de la politique 0-COVID, le gouvernement central donne des recommandations « conceptuelles », et ensuite chaque autorité locale y va de sa petite contribution (on n’est jamais trop prudent). Pour tous les parents et personnels d’enseignement du district de Chaoyang, la CECY est un des pires. La CECY (Commission Educative de ChaoYang) a en effet pouvoir de vie ou de mort sur l’éducation de nos enfants, et sur la santé mentale des adultes, car c’est la CECY qui du jour au lendemain peut décider de la fermeture des écoles 🏫, et de leurs ré-ouvertures (mais ils sont toujours moins réactifs pour ça). Et c’est justement la CECY qui sonné le glas pour nous le 7 novembre dernier.

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Le LFIP (Lycée Français International de Pékin)

Le seul signe avant-coureur que nous ayons avant la fermeture tant redoutée de l’école, c’est l’augmentation du nombre de cas (et des rumeurs aussi, la Chine est vraiment le pays des rumeurs, souvent lancées pour tester la réaction des gens). En effet ici, à l’inverse de ce qui a été fait en France, les écoles sont souvent fermées en premier, et ré-ouvertes en dernier. Cet automne, les cas augmentaient bien (nous avions largement dépassé le nombre de transmissions journalières d’avril dernier), mais les écoles restaient ouvertes. Par contre nous avions noté une communication plus forte sur le nombre de cas asymptomatiques. Un signal vers la population pour les préparer sur la non dangerosité du virus? Il était temps me direz-vous. Et nous nous pliions même à un test tous les 2 jours pour les enfants, nous montrions tous les matins à la montée du bus leur QR code vert…. nous étions prêts à tout pour qu’ils ne touchent pas à l’école.

Même la cantine était digne d’une cantine de prison (alors que dans les restaurants on mangeait normalement, allez comprendre pourquoi).

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Test des installations de distanciation au self du lycée par le personnel avant la rentrée des classes dernière.

Mais le 7 novembre, le monde s’est écroulé quand arriva ce mail du lycée nous annonçant la décision de la CECY de fermer toutes les écoles du district dès le lendemain (ou plutôt la recommandation forte de fermer les écoles. Mais la CECY a un pouvoir de nuisance telle que l’on est bien obligé de les suivre). Etant maintenant moi aussi au travail, ça ne serait plus la même chanson qu’en avril dernier. Là on allait vraiment prendre cher. C’était d’autant plus difficile que nous trouvions cela très injuste, car il n’y avait aucun cas au sein du lycée. Toutefois, coup de théâtre, au réveil le lendemain matin, nous commençons à recevoir des messages sur WeChat disant que les écoles avaient finalement reçu l’autorisation de rester ouvertes, ce qui se confirma plus tard dans la matinée. On n’a jamais su ce qu’il s’était passé. Il se dit que ça serait suite à de nombreuses plaintes des parents chinois sur le « 12345 ». Les « 12345 » c’est quoi? En résumé, c’est le bureau des pleurs de Pékin. Le chien de ton voisin est trop bruyant? Appelle les 12345! Ton voisin du dessus ne répare pas une fuite d’eau qui coule chez toi? Appelle le 12345 (ne rigolez pas, on a failli le faire)! Il ne faut pas croire qu’en Chine on n’a rien à dire. Il ne faut juste pas critiquer la politique, le pouvoir en place. Sinon les chinois ont tout à fait le droit de se plaindre, et sont très souvent écoutés! Il y a beaucoup de délation aussi, c’est un peu la limite du système.

Ensuite il s’est passé beaucoup de choses en très peu de temps. Tout d’abord du jour au lendemain toutes les cabanes de test PCR dans les rues ont été retirées ou fermées, sans crier gare. C’est pratique quand il faut un test de moins de 3 jours pour aller faire ses courses ou aller au travail…. Puis ces petites cabanes ont ré-ouverts. La raison de ces fermetures soudaines serait économique: les labo n’étaient plus payés depuis des semaines (rappelons les tests sont 100% pris en charge par le gouvernement).

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La petite cabane de test en bas du travail

Ensuite nous avons cru voir la lumière au bout du tunnel: 20 règles visant à rationaliser la lutte contre le COVID ont été édictées. Et on était super content, car il était écrit noir sur blanc qu’il était 🚫 de fermer les écoles si elles n’étaient pas dans des zones où les virus circulaient activement. Ces règles avaient d’ailleurs pour but de lutter contre le COVID de façon dynamique, scientifique, et ciblée. Tout un programme!

En tous cas, nous avons profité de cette accalmie pour aller au Parc Universal Studio… qui était presque désert! 10 minutes de queue maximum, c’était dur 😅🎢.

En route vers le chaos – hùnlùan 混乱

Et pourtant, depuis le 21 novembre, toutes les écoles de Pékin sont passée en distanciel, et y sont encore à l’heure actuelle (nous sommes le 21 décembre aujourd’hui). A alors commencé une véritable chasse aux sorcières 🧙‍♀️ (de vilaines sorcières déguisées en virus 🦠). Nous avons vu autour de nous des tas de personnes se retrouver en quarantaine chez eux, pour des durées complètement aléatoires, pour avoir eu un cas positif dans leur quartier, ou leur immeuble, ou au même palier. Là aussi, c’était aléatoire. L’ironie de l’histoire, c’est que plus les règles du gouvernement se veulent claires, plus sur le terrain c’était du grand n’importe quoi.

Nous avions une véritable épée de Damoclès 🗡 en permanence au-dessus de la tête, mais étions trop occupé à gérer le home-schooling et notre travail, pour vraiment y penser. Heureusement probablement.

Un matin, les enfants sont remontés tous paniqués dans l’appartement, car notre immeuble était en train d’être scellé 🔒.

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Les vigiles viennent d’installer de la rubalise devant l’entrée de l’immeuble (vue de notre fenêtre)

Je vais donc sur le groupe WeChat de l’immeuble (et là je remercie la fonction traduction, car évidemment tout est en chinois), et je comprends qu’un voisin du douzième étage (nous sommes au dixième) était dans un tube ressorti positif). En fait il faut comprendre que lors des tests PCR, 10 coton-tige sont mis dans le même tube. Si le tube ressort positif, les 10 personnes doivent se refaire tester individuellement afin de déterminer lequel est positif. En attendant ce second résultat, les 10 personnes sont donc potentiellement des cas positifs (et tous leurs voisins aussi par la même occasion, bonjour l’ambiance).

On y croit encore, on a 9️⃣ chances sur 🔟 d’être libres dans quelques heures 🍀. Surtout que l’immeuble a été fermé sans crier gare, on pouvait encore y rentrer, mais pas en sortir, donc quiconque était à l’intérieur était donc enfermé, ce qui était le cas de l’Ayi de nos amis du 17ième, qui était chez eux à ce moment-là.

Et bien non, nous n’aurons pas cette chance, la nouvelle tombe que tout l’immeuble est confiné pour 5 jours… au moins (et l’Ayi de nos voisins aussi par conséquent)! En effet, nous serons tous testés tous les jours, et si on test ressortait à nouveau positif, le compteur serait remis à 0 (heureusement ce ne fut pas le cas). Pas d’inquiétude, nous pouvions toujours nous faire livrer à manger, les gardiens se chargeaient de nous monter nos courses. Bon par contre on a eu plus de mal à ce qu’ils nous montent nos cartons IKEA avec un bureau et une chaise commandés une semaine plus tôt, et qui ont eu le bon goût d’être livrés le premier jour de notre confinement.

Et que s’est-il passé pour nos voisins du douzième? Là aussi ce fut digne d’un film de science-fiction, car initialement, non seulement les gens de l’appartement 1201 devaient partir en quarantaine centralisée, mais aussi tout le douzième étage, ainsi que les 3 appartements au-dessus et en-dessous (donc de la colonne des appartements en -01, ouf on est au 1004). Et oui, le virus est très vicieux, car il se faufile dans les canalisations, et remontent en rampant chatouiller les fesses du voisin quand il va aux toilettes. Finalement, ils ont tous pu rester faire leur quarantaine chez eux (mais 8 jours), car tout l’immeuble s’est mobilisé pour qu’ils ne soient pas envoyé en quarantaine centralisée. D’ailleurs je tiens à vous dire que tout le monde s’est indigné de ce confinement de tout un immeuble, car il faut rappeler que la chasse au COVID devait être ciblée et scientifique.

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Test quotidien à notre porte
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Les sacs de légumes qui nous ont été distribués de la part du Comité de Quartier. Quelle générosité! (et le grand carton avec notre bureau qui attend gentiment que quelqu’un accepte de nous le monter. 
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La voiture de Constance faite grâce aux cartons IKEA… qui ont mis 2 jours à être montés chez nous!

Donc on avait à manger, on avait de l’eau (rappelons qu’au robinet elle n’est pas potable car chargée en métaux lourds🚰🚫), on avait des cartons pour fabriquer une voiture 📦🚗, mais… et quid du gaz?? Ici tout est très pratique, on fait tout par WeChat, tout est fait pour consommer le plus facilement possible (bien ou pas, ça c’est un autre débat). Mais pour le gaz, c’est complètement archaïque, même en France c’est plus moderne. Il faut en effet prendre la carte 💳 qui est insérée dans le compteur de gaz, aller dans une agence de Bank of Beijing (il n’y en a pas à tous les coins de rue), et payer en cash au guichet pour recharger la carte de gaz. Le truc hyper pénible et auquel on ne pense pas à vérifier le crédit restant régulièrement (faut dire que ce compteur est caché derrière une pile de casseroles). Bon ben perdu, nous sommes tombés à court de gaz le soir du deuxième jour. OK… on n’oublie pas qu’en Chine tout est compliqué, mais rien n’est impossible. On est au pays du système D, donc on va trouver une solution. C’est donc avec l’aide de Joss, qui s’occupe de notre appartement, qui nous avons trouvé un voisin au 26ième étage, qui pouvait recharger notre carte de gaz avec son téléphone Android. En effet, nous avons appris à cette occasion que la carte pouvait aussi être rechargée via la technologie NFC, dispo sur Android uniquement. J’avais trop peur que les vigiles en bas remarques les mouvements d’ascenseurs, je suis donc montée 16 étages 🥵 plus hauts par des escaliers dignes d’un décor de Walking Dead 🧟‍♀️, avec un masque N95 sur le nez 😷.

Ce fut donc la petite aventure de ces 5 jours, au bout desquels nous avons été enfin libérés. Deux jours après, c’est l’immeuble d’à côté qui se retrouve sous scellés. Mais après plusieurs jours où la colère montait de plus en plus en Chine, les habitants de cette tour ont eu gain de cause: seul l’appartement en cause, les voisins du même étage, les 3 appartements au-dessus et les 3 en-dessous sont confinés. Un pas vers la victoire!

L’exaspération du peuple chinois

Plusieurs faits ont sans doute précipité la suite des évènements. Etant « invités » sur le territoire chinois, nous ne pouvions qu’être spectateurs. Vous avez probablement eu les mêmes informations que nous (certaines informations arrivent à paraître ici aussi avant d’être supprimées par la censure).

Des manifestations ont émergé un peu partout, comme notamment dans la plus grande usine d’iPhone, mais aussi dans les rues, comme cette manifestation à 2 pas de chez nous (pendant que nous étions en quarantaine) ☮️.

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Manifestation pacifiste, où chacun brandissait des feuilles blanches

Ou encore la coupe de monde de football ⚽️ qui ici à réveillé les consciences, car encore beaucoup de Chinois ignoraient que le port du masque à l’étranger, c’était de l’histoire ancienne! J’ai notamment trouvé sur WeChat ces 2 images donnant une comparaison frappante. D’ailleurs, si on regardait les matchs de foot sur une chaîne chinoise, les plans zoomés sur le public (non masqué) étaient supprimés. Prêt pour le jeu des sept différences?

Le Big Bang de la Chine

Et ensuite, le 7 décembre, ce fut la libération. Du jour au lendemain, sans crier gare, il a été annoncé sur tous les réseaux sociaux et la presse chinoise que les cas de COVID pouvaient à présent tout à fait rester chez eux, sans impact sur les autres, qu’il n’y avait plus de quarantaine centralisée. Puis c’est allé très vite, je ne sais même plus dans quel ordre tout cela a été annoncé, mais en quelques jours (ou plutôt même en quelques heures!):

  • plus besoin de test PCR pour se rendre au travail
  • plus besoin de test PCR pour rentrer dans un lieu public,
  • plus de tests PCR nulle part en fait, sauf pour les écoles (mais vu qu’elles sont encore fermées, ça ne change pas grand-chose), et sauf pour les restaurants, bars et lieux d’entertainment (uniquement pour Pékin, il faut rester un peu plus exigeants que les autres provinces).
  • Même pour aller à l’hôpital, ni test PCR, ni antigénique
  • Et le top du top: plus aucune limitation pour voyager au sein de la Chine (plus de test requis, plus de risque d’avoir ce maudit pop-up nous empêchant de monter dans un avion ou un train pour Pékin).
  • Nous entendons même de plus en plus de rumeurs sur la fin des quarantaines pour les voyageurs venant de l’étranger.

S’en est suivie une période où tout le monde était complètement perdu. La plupart du temps les résultats de tests PCR ne retombaient plus dans nos HealthKit. Aussi, rapidement beaucoup de gens tombaient malade autour de nous. Finalement, le gouvernement sans le vouloir avait trouvé la solution pour que tout le monde reste chez soi: la moitié des gens était malade, et l’autre moitié avait peur de tomber malade. Si l’on ajoute à cela que plus personne n’arrivait à avoir ses résultats de tests PCR, les restaurants étaient déserts (quand ils n’étaient pas fermés, faute de personnel pouvant assurer le service).

La raison de ce changement aussi brutal que radical? Probablement le résultat d’une guerre de pouvoir au plus haut niveau. La Chine est en tous cas incroyable, elle est capable de tous les extrêmes, avec une rapidité déconcertante. Nous aurons assurément connu deux ères différentes, nous connaissons un véritable sentiment de libération, même si le masque est toujours obligatoire, et les écoles sont toujours tristement fermées.

Aujourd’hui nous sommes en vadrouille hors de Pékin, nous avons réservés nos billets dès que tout s’est ouverts, et allons passer Noël à la plage! On va racontera ça une autre fois 🛫.

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Maintenant j’espère ne plus jamais vous parlé du COVID, mais enfin de la Chine, pas de que de Pékin, et du reste de l’Asie!

Beijing Architecture (北京建筑)

Beijing Architecture (北京建筑)

En cette période du XXième congrès de Parti Communiste Chinois, Pékin est entourée d’une frontière invisible, mais pourtant bien réelle, un peu comme ces boucliers protégeant les villes futuristes des films de science-fiction. Voyant le verre à moitié plein, nous profiterons de ce passage en Chine pour explorer Pékin au maximum, et heureusement il y a de quoi faire!

En effet, la mégalopole chinoise n’en finit pas de nous étonner par sa richesse architecturale si contrastée: l’ultra moderne côtoie des monuments phare de l’Histoire de la Chine, ainsi que l’âme de Pékin avec ses Hutongs. Nous repartons ici dans les rues de la capitale chinoise, pour découvrir son architecture. Il nous faudra pour cela parfois lever les yeux très haut dans le ciel, ou chercher un recoin caché d’un Hutongs. Il ne s’agit que d’un minuscule pan de la ville, je ne pourrai prétendre déjà tout connaître ni tout résumer dans ce simple texte. J’en profite pour remercier notre ami Quentin, qui a contribué au reportage photo que vous allez découvrir ici 📸.

Mais d’abord, je voudrais vous partager notre perception des changements profonds opérés à Pékin ces dernières décennies. Comme nous l’avons vu il y a quelques mois, Pékin a 7️⃣ périphériques (et ouai, nous sommes de petits joueurs avec notre périphérique parisien + A86 + N104). Le premier périphérique est en réalité l’enceinte de la Cité Interdite. Nous habitons juste derrière le troisième périphérique (ce qui est toujours considéré comme faisant partie du centre de Pékin!).

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le point rouge en haut à droite, c’est chez nous!

Pour imaginer cette vitesse de l’extension de la ville de Pékin, dites-vous que les 3ième périphérique a été terminé à la fin des années 90. Pour faire simple, il y a 20 ans, à la place de notre immense résidence, il y avait des champs et des vaches 🐮. C’est comme tout ici: on construit vite, on voit tout en grand, tout est toujours démesuré. Nous n’étions pas là pour le voir, mais les français installés ici depuis des années (des héros à nos yeux) nous décrivent aussi un changement opéré depuis quelques années consistant à remplacer l’ancien par du nouveau. Il ne s’agit de rénover une habitation ou un magasin, mais de raser ce qui fait l’âme de Pékin, par du moderne aseptisé. Les petites échoppes traditionnelles sont remplacées par des banques 🏦 ou des salons de coiffure💈 (ne me demandez pas pourquoi), une grande partie des Hutongs ont été rasés pour être remplacés par des immeubles de 40 étages 🌇. Oui il faut loger tout le monde, oui il faut vivre avec son temps, mais à quel prix? Un autre exemple de cette ville ayant grandi trop vite, c’est le plan du métro 🚇, qui n’est absolument pas pratique. Les stations sont toujours loin d’où l’on doit se rendre, les stations sont éloignées entre elles, et les interconnexions sont mal pensées. Le métro pékinois est en quelques sortes plus comparable au RER parisien qu’à son métro.

Revenons à l’objet de cet article. Comme dans d’autres mégalopoles chinoises, Shanghaï pour ne pas la citer, Pékin est fait de contrastes entre l’ultra design, l’historique, et l’authentique que j’associerais à pauvre aussi. Oui, le contraste est aussi très fort au niveau des richesses: Pékin fait partie du top 10 des villes les plus chers de la planète (ou 20, selon les classements), mais il y aussi beaucoup de très pauvres. Du point de vue du contraste architectural, un exemple bien connu ici illustrant cela est cette célèbre photo offrant un point de vue sur le très design Galaxy SOHO, construit au milieu des vieux Hutongs.

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Galaxy SOHO au milieu des Hutongs

Vu de l’intérieur, c’est d’ailleurs digne d’un décor de film de science-fiction.

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Il y a en fait 3 ensembles SOHO de ce type à Pékin, au style ultra moderne dessiné par la célèbre architecte Anglo-Irakienne Zaha Hadid. On y retrouve des magasins (il y a à Pékin une incitation permanente à la consommation), des bureaux, et autres lieux de divertissements. Un autre de ces trois SOHO est le Wangjing SOHO, au look tout aussi improbable.

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Wangjing SOHO

Wangjing est aussi appelé le Koreantown 🇰🇷 de Pékin. Et oui, partout dans le monde on a des Chinatown, et ici il faut bien trouver autre chose! Ce quartier a aussi ses grandes tours, qui enfilent leurs robes de lumière le soir. Il n’y a pas à dire, les Chinois sont très forts pour les illuminations de nuit.

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Les tours de Wangjing

C’est d’ailleurs étrange de s’émerveiller devant ces illuminations 💡 (c’est vraiment beau Pékin de nuit), alors que récemment sur France Inter j’entendais qu’il était question de ne plus faire d’illuminations pour Noël, à l’heure de la crise énergétique (et écologique!). Mais qui sommes-nous pour avoir bien profité pendant des décennies, avoir donc bien contribué à cette crise, et pour donner des leçons de sobriété aux pays qui ont pris leur élan après nous? Enfin bref, revenons à notre sujet, c’est beaucoup plus léger!

Toujours dans la thématique de l’architecture design, la CCTV tower est l’emblème du nouveau Pékin. Conçue par l’architecte néerlandais Rem Koolhaas, cette tour défiant les lois de la gravité, abrite le siège de la télévision centrale chinoise 📺. Notamment en raison des risques de séisme, sa construction fut considérée comme un défi d’ingénierie. Sa forme unique lui fait valoir le surnom dà kùchǎ (大裤衩), signifiant « gros pantalon ».

Dans ce même quartier d’affaires de Guomao 🏙, le CBD pour Central Business District, se trouve un fameux gratte-ciel à la forme singulière: le China Zun (中国尊). Son nom vient du zūn, un ancien type de vase chinois en bronze qui inspira le style architectural de l’édifice. En temps normal il est possible de monter jusqu’au 108ième (et dernier) et étage, où une terrasse d’observation doit offrir une vue à couper le souffle sur la capitale. Mais restriction COVID oblige, elle n’est pas accessible. Mais vue d’en bas, cette tour donne aussi le vertige!

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Pour la petite histoire, nous voyons cette tour China Zun de notre salon (j’avoue que ce n’est pas désagréable comme vue, surtout le de nuit 🌃), et elle nous sert d’indicateur du niveau de pollution: si nous la voyons mal, voire pas du tout, c’est qu’il y a un pic de pollution.

Finalement, le CBD est le symbole moderne de Pékin, une des images typiques que l’on pourrait envoyer par carte-postale. J’aime d’ailleurs beaucoup ce contraste que l’on voit sur la photo ci-dessous, prise depuis la colline au Charbon avec le CBD en arrière-plan.

Pékin n’en reste pas là sur le thème des constructions audacieuses et futuristes 🛸. Au sud de Chaoyang Park, qui est un peu le Central Park de notre district, se trouve le Chaoyang Park Plaza, conçu par l’architecte Chinois Ma Yansong. Les formes des bâtiments ont été dessinés de façon à faire écho à ce que l’on retrouve dans les paysages naturels et les peintures traditionnelles chinoises, et réintroduisent ainsi la nature dans le domaine urbain. Ce n’est cependant pas exactement ce qui me vient à l’esprit en voyant cette construction, mais elle a le mérite d’être très atypique.

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Chaoyang Park Plaza vu depuis l’autre côté du lac de Chaoyang Park

Non loin de là, toujours aux abords du sud de Chaoyang Park, se trouve cette drôle de construction en forme de Donut 🍩, le Phoenix Center, ou Phoenix television. Cette construction est surtout impressionnante vue de l’intérieur, mais malheureusement il n’est pas possible d’y rentrer depuis plusieurs mois, à moins de travailler pour la chaîne Hong Kongaise évidemment.

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A l’ouest de la place Tian’Anmen, une autre construction étrange ressemblant cette fois-ci à un Oeuf posé sur l’eau mérite le détour 🥚💧: le National Centre for the Performing Arts 🎶 (NCPA pour les intimes). Cet opéra démesuré est l’oeuvre du Français Paul Andreu 🐓.

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Changement de décors pour un autre symbole de Pékin: les Hutongs. Les Hutongs, ça grouille de vie (ou plutôt ça grouillait, il paraît qu’avant c’était beaucoup plus animé qu’à présent), mais ce sont aussi de vieux vélos ou scooters garés en vrac 🚲🛵, ce sont des oiseaux 🐦, vestige du Pékin d’autrefois où les soldats en attente d’être appelés s’occupaient aux jeux et en faisant de l’élevage d’oiseaux, et puis on y joue, on y crie, ou on y fait la sieste. L’oisiveté d’antan est toujours un peu présente dans les Hutongs…

Dans les Hutongs on ressent aussi un fort sentiment nationaliste chinois, notamment avec les drapeaux accrochés à côté de chaque porte 🇨🇳. Nous avons des amis installés dans les Hutongs, et à la veille de la fête nationale début octobre (la Golden week), le comité de quartier a fait le tour des habitations pour s’assurer que chacun accroche bien un drapeau à sa porte. Nos amis (Français) n’ont pas eu d’autre choix que d’acheter un drapeau chinois (c’était le plus neuf de la rue!), le comité de quartier ayant un pouvoir de nuisance non négligeable, comme faire passer le health kit, précieux sésame du quotidien, du vert au rouge sans aucune raison. Chiche qu’ils feront mettre un drapeau français à leurs voisins pour le 14 juillet 🇫🇷!

On aime jeter un oeil au travers des portes pour deviner comment c’est à l’intérieur, et on y trouve de tout: des Hutongs joliment rénovés, du bric à brac, des Hutongs dans leur jus 🏮.

Où on aime simplement s’arrêter devant les portes closes🚪, car elles sont toujours étonnantes, très joliment ornées, le plus souvent du rouge typiquement chinois.

Mais les Hutongs, ce sont aussi des toits en quinconces, parfois avec des volières au milieu, qui renforcent le sentiment de dédale et de bouillonnement de la vie pékinoise. Si ça n’avait pas été si compliqué de se rendre au lycée d’ici, c’est là que j’aurais voulu habiter! Attention toutefois, car mis à part pour les hutongs rénovés, il n’y a pas d’autres sanitaires que les WC publiques dans la rue 🚻, et ces hutongs sont souvent si mal isolés que l’hiver, très rude à Pékin, il faut garder le gros manteau aussi bien dehors que dedans 🥶.

Pékin est aussi LA ville qui a accueilli les JO d’hiver ET d’été🏅(la Chine en est d’ailleurs très fière). Cela a par conséquent laissé une empreinte architecturale plutôt chouette, comme le stade national de Pékin, surnommé aussi le « Nid d’Oiseau ». C’est là que ce sont déroulées les épreuves d’athlétisme, mais aussi les cérémonies d’ouverture et de fermeture des JOs.

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On retrouve aussi la Tour d’Observation Olympique, mais dont la construction n’a commencé qu’en 2011, soit 3 ans après les JO 2008. Son rôle n’est que de faire de l’observation, rien d’autre. Elle est située sur l’Olympic Green, où l’on voit aussi ci-dessous le Nid d’Oiseau, le « Cube » (le centre national aquatique de Pékin, en blanc à droit sur la photo), et la tour de diffusion des médias pour les JO (la tour ressemblant à un empilement de toupies).

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Mais comment parler d’architecture pékinoise sans évoquer un autre symbole, qui n’a nul autre pareil: la Cité Interdite 🚫! Je présume que vous seriez curieux de lire un article à ce sujet, encore un peu de patience, car nous ne l’avons visitée qu’une fois, ce qui est bien trop peu pour commencer à en percer ses mystères. Mais en attendant, voici un magnifique panorama depuis la colline du charbon, où l’on aperçoit aussi plus loin sur la droite l’Opéra de Pékin.

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Un autre cliché célèbre à prendre à Pékin est cette vue prise à l’un des angles nord de la Cité Interdite, à l’équilibre symétrique parfait.

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Bien évidemment à Pékin on trouve une multitude de temples. On ne peut jamais vraiment les dater, dire s’ils sont très anciens ou pas. En Europe nous prêtons une grande attention à la façon d’entretenir, voire de restaurer nos monuments anciens, pour ne pas impacter leur authenticité (il n’y a qu’à regarder tous les débats autour de la reconstruction de la flèche de Notre-Dame de Paris). Ces temples ont par contre une caractéristique commune que nous aimons beaucoup: la forme élancée des toits, avec leurs tuiles vernissées . Toujours du rouge et du doré, mais aussi du vert et du bleu.

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On y voit ici un dǒugǒng (斗拱), un élément architectural spécifique au monde chinois, basé sur un emboîtement de supports en bois. Servant au début à fixer les structures des toits sur des piliers et des colonnes, ils évoluent avec le temps pour devenir un ornement. C’est un des éléments les plus importants de l’architecture chinoise traditionnelle.

Tous ces temples que nous pouvons visiter ici sont de forme rectangulaire, sauf un temple très célèbre, presqu’autant que la Cité Interdite, et qui est aussi un véritable symbole de Pékin: le temple du Ciel. Il est considéré comme l’achèvement de l’architecture chinoise traditionnelle. La croyance chinoise symbolisant la Terre de forme carrée, et le Ciel de forme ronde, l’architecture ici est faite d’enceintes carrées avec des tuiles de couleur verte qui symbolisent la terre 🌍🟩, de bâtiments ronds avec des tuiles de couleur bleue qui symbolisent le ciel 🌈🔵. Ici aussi, il nous faudra y revenir, car ce genre d’endroit est trop immense pour être visiter complètement en une seule fois, surtout avec des enfants.

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Temple du Ciel

Et pour finir, n’oublions pas que le Communisme a aussi laissé sa trace sur l’architecture pékinoise, surtout aux abords de la place Tian’anmen 🪖. Le Palais de l’Assemblée du Peuple en est sans doute le meilleur représentant.

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Le Parlement

Je ne vais évidemment pas commenter plus ce sujet du congrès du PCC, qui commence aujourd’hui, mais pour les curieux que vous êtes, je vous propose d’écouter quelques Podcast pour mieux comprendre le contexte dans lequel nous vivons, notre réalité. Sur l’application Spotfy:

  • il y bien entendu « Les Chroniques d’Eric » (qui est d’ailleurs l’auteur de « Robinson à Pékin », dont nous avons parlé dans Robinsons à Pékin 2.0. ): épisodes du 14 octobre et du 14 septembre 2022
  • mais aussi « L’Heure du Monde »: épisode du 13 octobre
Yunnan (云南) – Voyage sur les rives tropicales du Mékong

Yunnan (云南) – Voyage sur les rives tropicales du Mékong

Je n’ai jamais mis autant de temps pour un article… entre la reprise du travail et la rentrée des classes, je n’ai plus beaucoup de temps pour écrire 🥱. On va dire que c’est juste le temps de se remettre dans le rythme. Mais j’espère surtout que cet article ne sera pas trop décousu, car difficile de garder le fil conducteur en écrivant 3 lignes tous les 3 jours 🤷🏻‍♀️.

Ça y est, notre road trip dans le nord-ouest du Yunnan touche à sa fin, et nous reprenons l’avion ✈️ pour la région autonome du Xishuangbanna (signifiant « 12 000 rizières » 🌾), plus précisément pour la ville de Jinghong.

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Grande comme la Belgique, cette région frontalière du Laos et de la Birmanie (Jinghong n’est qu’à 30km de sa frontière!) représente ce que la Chine a de plus tropical 🌞🌴💦. Eh oui! Même si nous ne pouvons pas passer les frontières chinoises (enfin si c’est possible, mais bonjour le parcours du combattant pour revenir), ici on se sent dans ce que l’on imagine de la Thaïlande, du Vietnam, et du Laos. Et le mythique fleuve Mékong y contribue beaucoup, avec ses rives bordées par la jungle, les odeurs de nature après la pluie, l’air chargé d’humidité, on se croirait dans un décor de film se déroulant au Vietnam! Venant du Tibet, le Lancang Jiang (c’est le nom chinois du Mékong) traverse du nord au sud cette province verte de la Chine, puis vient marquer une frontière naturelle entre le Laos et la Birmanie, avant de s’enfoncer dans l’ancienne Indochine.

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Cette région est habitée principalement par la minorité des Dai, cousins germains des Thaïs. Ce « pays à dos d’éléphants » (comme on l’appelait autrefois) était leur royaume jusqu’en 1953. La culture des Dai est similaire est celle du peuple Thaï, de par l’architecture des maisons, la façon de prier dans les temples bouddhiques, la langue (à l’oreille c’est très différent du mandarin), et l’écriture.

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Nous sommes arrivés en début de soirée dans notre hôtel, situé le long du fleuve et en plein coeur de Jinghong. Après les 10 jours où nous étions finalement très isolés du tourisme de masse et où nous étions dans des petites villes plutôt authentique, le changement de décors est assez brutal: de hauts immeubles lumineux aux formes rappelant les tropiques 🌃🍍🌴, des lumières multicolores, des voitures de luxe à louer pour une balade, et surtout du bruit et du monde.

Mais ce que nous apprécions vraiment, c’est cette vue de nuit sur le Mékong, qui offre un panorama venant parfaire le plaisir de voyager.

Nous partons à la recherche d’un endroit pour dîner. La réception de l’hôtel (où personne ne parlait anglais, la semaine s’annonce challenging sur le plan de la communication 😅), nous avait conseillé un restaurant très populaire dans le marché de nuit juste à côté. Même si ce marché de nuit est un des lieux incontournables de Jinghong 🎆, nous y retournerons en journée, ça sera plus calme 😱.

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Couleurs et lumières au-dessus du très fameux marché de nuit de Jinghong

(plus tard nous sommes donc retournés de jour au marché de nuit. Evidemment presque tout était fermé, mais cette allée très colorée est très agréable, on y fait volontiers un petit détour, comme je le faisais autrefois en rentrant à la maison pas Gare de Lyon, où je faisais un détour par la rue Crémieux)

Il y a aussi le marché de nuit version locale, nous expliqua cette jeune chinoise qui a marché une bonne heure avec nous le long du quai du fleuve, trop contente qu’elle était de pouvoir pratiquer son anglais. Ici on retrouve des odeurs qui caractérisent tant cette Chine tropicale, des odeurs de nourriture dont nous ne préférons pas connaître les ingrédients, et de fruits si délicieux!

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Le lendemain, le programme promis aux enfants est: piscine, piscine, et puis si on a le temps, on ira à la piscine 🥳. Bref, ne rien faire en vacances, c’est pas mal non plus. C’est aussi l’occasion de déambuler un peu dans la ville, et de nous faire une meilleure idée des Chinois en vacances. La fameuse étoile ayant disparu pour tout le monde (voir mon article Fichue étoile! ), tous les chinois en profitent pour voyager (et ils ont eu bien raison! Car ça s’est bien gâté en août). Ce qui fait qu’en comparaison d’ici, la côte d’Azur en plein mois de juillet a des allures de port de pêche du Finistère Nord au mois de novembre (j’exagère un peu, mais pas tant que ça 😁). Les chinois en vacances (et je m’excuse auprès de mes amis chinois qui peut-être me lisent, mais c’est réellement ce que nous avons ressenti), c’est comme des ados en colo! La journée ils ne font pas grand-chose à part manger, se prendre en photo et dépenser de l’argent (ici c’est très important de dépenser beaucoup d’argent en vacances, regardez aux Galeries Lafayette à Paris quand ils pouvaient encore voyager!), donc le soir (et la nuit 😡), ils sont en super forme! Globalement (et ça c’est valable toute l’année), les chinois sont assez bruyants, et ici en vacances, c’est encore pire.

Je vous fais donc une petite parenthèse d’Histoire. En effet, une explication que l’on nous a donnée sur le fait d’être si bruyant ici serait un héritage de la révolution culturelle, période très sombre de l’Histoire de la Chine du XXième siècle. Initiée par Mao Zedong, la révolution culturelle a été lancée afin de purger le Parti Communiste Chinois (PCC) de ses éléments « révisionnistes » et limiter les pouvoirs de la bureaucratie. De nombreux massacres ont alors été perpétrés, notamment lors de rafles pendant la nuit, pendant le sommeil des gens. Une habitude consistant à faire du bruit a donc été prise, afin de décourager ces rafles (difficile d’être discret dans ces conditions).

Revenons à présent à Jinghong. Là où nous nous trouvons, nous sommes en plein coeur du quartier de Gaozhuang Xishuangjing. Ici, c’est la folie des grandeurs, version chinoise. Un immense quartier sorti de terre en moins de 15 ans et entièrement dédié aux divertissements de la nouvelle bourgeoisie chinoise. Dans ses rues, on trouve des hôtels de luxe (quoi que pour beaucoup, comme par exemple le nôtre, passé l’effet Waow, on voit vite que c’est beaucoup dans l’apparence uniquement, et que c’est souvent mal entretenu), des boutiques de luxes (en vacances, je vous l’ai dit en Chine il est important de pouvoir dépenser de l’argent), des restaurants (et oui, les chinois mangent tout le temps!), des marchands de thé 🫖🍵 (nous sommes très proche de la ville-préfecture de Pu’er, célèbre pour son thé), et des marchands de Durian. Le Durian est un fruit de la taille d’un ballon de rugby, hérissé d’épines. Il est aussi très connu pour son odeur pestilentielle (il est par exemple interdit d’en consommer dans le métro). Les asiatiques pourtant en raffolent, mais nous n’avons toujours pas compris pourquoi 🤢.

Dans les rues, on trouve de tout, comme ces scooters ressemblant à des toutous, certains étant même disponible en version side-car, et le mieux étant d’en trouver un assorti à sa robe, ça donne mieux en photo 💃🏻👗.

Ou des travaux, où il vaut mieux avoir un bon équilibre…

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Ou encore ces rues, où règne un fourmillement permanent, ce genre d’endroit où l’on ne voudrait pas vivre et pourtant où l’on adore aller car c’est ici où est la vraie vie de la ville, et non cette vitrine complètement fake pour les vacanciers.

C’est aussi dans ces rues que l’on trouve toujours des endroits improbables pour manger (ben oui, nous aussi on doit se nourrir de temps en temps), même si pour commander c’est toujours un véritable challenge! En fait les cartes avec images c’est vachement bien. Mais au jour d’aujourd’hui, tout se fait par WeChat, y compris pour commander au resto, et ça c’est beaucoup moins intuitif quand c’est complètement en chinois…La modernité n’a pas que des avantages. On a dû leurs faire pitié, car ils nous ont trouvé une ancienne carte, et un client est même venu faire l’interprète… un échange d’une photo de sa soeur avec Constance 😅.

Et comme tous les soirs, ça n’est pas la peine de commander un taxi comme à Pékin, ici c’est à l’ancienne, en hélant le premier taxi qui passe 🚖. Nous aurions voulu louer des scooters (les enfants auraient adoré aller dans un side-car), mais sans carte d’identité chinoise c’est assez compliqué, voire impossible ☹️.

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Pour notre deuxième journée dans le Xishuangbanna, le programme nous conduit à la Vallée des Eléphants 🐘. Elle se situe à environ 30km au Nord de Jinghong, en bordure d’une réserve naturelle protégeant la forêt tropicale et les éléphants sauvages. Xishuangbanna est la seule région où résident les éléphants sauvages de Chine et la Vallée des éléphants sauvages le seul endroit où l’on peut les observer, bien que la rencontre ne soit pas certaine. La preuve… nous ne les avons pas vu ! En effet, ils détestent le bruit, dommage quand on est en Chine 😂 ! Et puis ils sont malins, il faisait si chaud qu’ils ont préféré aller se mettre au frais dans la forêt! Quand on parle de jungle ou de forêts, ici il s’agit surtout de forêts d’hévéas. Cette essence d’arbre a sans doute beaucoup de qualités, mais elle n’en est pas moins néfaste d’un point de vue écologique, car elle est responsable en grande partie de la déforestation en Afrique et en Asie du Sud-est, la demande en caoutchouc naturel étant de plus en plus importante.

Nous avons pourtant deviné la présence des éléphants, avec les énormes empreintes de pas que nous pouvions voir en contre-bas dans la boue, le long de la rivière, ainsi que par la taille de leur excréments (et ouai! 💩). Une soixantaine d’éléphants sauvages résident ici. Ils s’approchent très occasionnellement des humains. Un sentier aérien en bois de 2km s’étend le long du parc et permet aux touristes de parcourir une partie du parc depuis les airs.

A défaut d’avoir vu des éléphants sauvages, nous avons vu un singe 🐒 et un paresseux 🦥 accrochés dans les arbres. Ils n’étaient pas difficiles à trouver, il suffisait de lever les yeux quand on voyait un Baoan 👮‍♂️ montant la garde à côté d’un arbre. Pour ceux qui ont vu Zootopie, un paresseux ça se déplace réellement au ralenti, encore pire qu’Augustin au réveil!

Un spectacle d’éléphants domestiqués était aussi donné dans le parc, pour le bonheur des enfants. Ce genre de spectacle, où qu’il soit, ne nous plaît pas forcément, question de valeurs, mais les enfants étaient contents, et on pourra dire que nous avons vu les éléphants du Xishuangbanna ✅.

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Dans ce parc, parmi les animaux que nous pouvions voir, pas toujours dans des super conditions d’ailleurs…, il y avait une énorme volière à papillons. Des papillons par centaines 🦋, qui se posaient même sur nos têtes, nos mains, sans aucune crainte, alors que nous n’avions qu’une peur, c’était de frôler leurs ailes, car me semble-t-il ça n’est pas très bon pour eux.

Après cette longue journée sous un soleil de plomb, les enfants n’ont qu’une envie… la piscine évidemment! Nous avions dans l’hôtel une chambre familiale (décorée sur le thème de Saint Exupéry), donnant sur la piscine, pour le plus grand bonheur des enfants! Un peu moins pour nous, car vous vous en doutez, c’est bruyant quand certains décident de se baigner tard. Mais, cette semaine est la semaine des enfants 👦🏼👧🏼.

Par contre du point de vue de l’intimité, c’est assez moyen. L’intimité est beaucoup moins un sujet pour les Chinois que pour nous. Ça n’en reste pas moins délicat, et ça l’est encore plus quand dans notre chambre, la porte des toilettes et de la douche est en réalité une vitre, et que cette porte fait directement face à la fenêtre de la chambre, qui donne… sur la piscine!

Le jour suivant, un programme bien chargé nous attend encore. Nous nous rendons d’abord au magnifique jardin botanique de Menglun. Il s’étend sur une petite péninsule encerclée par la rivière Lupsuo, à proximité de la ville de Menglun, à 70km à l’Est de Jinghong. Ce jardin botanique a été fondé en 1959, par Cai Xitao, un botaniste chinois réputé, et couvre une superficie de 900 ha. Avec une collection de plus de 12 000 espèces botaniques domestiques et introduites, c’est le plus grand jardin botanique tropical de Chine. Le jour de notre visite, il pleuvait des cordes ☔️. Mais finalement, ça nous va très bien, car la pluie mélangée à la chaleur accentue encore l’ambiance tropicale, et fait encore plus ressortir ces odeurs de la nature. Et cerise sur le gâteau 🍰, nous pouvons profiter tous seuls à pied du parc (on avait nos k-way), la plupart des gens préférant parcourir le parc abrité dans des golfettes.

Rien qu’à regarder à nouveau ces photos je sens encore ces odeurs de nature tropicale humide. Ça me transporte dans les pays d’Asie du Sud, si proches et pourtant encore inaccessibles.

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Nous avons vu aussi un arbre à durian, même d’en bas on pouvait sentir cette odeur horrible (je ne pas la décrire, mais vraiment ça sent mauvais). La pensée de cette odeur me transporte plutôt dans les rues du vieux Jinghong, étroites, sales et pleines de monde, avec des étals de fruits et de gros cageots de durians.

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Pour le déjeuner, ici pas de jambon beurre, mais des hot pot, ces pots de bouillon à base de nouilles et de viande 🍜. Pour accompagner, un délicieux jus de fruit de la passion 🥤, comme on en trouve partout dans cette région. Ici les fruits de la passion, qui sont jaune à l’extérieur, sont beaucoup moins acide que les violets que l’on peut acheter chez nous. Nous aurions aussi pu prendre du jus de noix de Coco 🥥, fraîchement préparée. Constance, dans sa volonté de manger avec les yeux, a plutôt opté pour une saucisse de canard. C’est un peu comme les fricadelles, je préfère ne pas savoir comment c’est fait…

Après ce repas, nous préférons encore repartir à pied, la file pour avoir une place dans une golfette étant très dissuasive 🛺.

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Nous retrouvons un peu plus tard notre chauffeur, et faisons route, toujours le long du fascinant Mékong, vers Ganlanba, bout de campagne au milieu des rizières, essentiellement peuplé par la minorité Dai. Dans ce parc dédié à la culture Dai, on peut trouver quelques villages typiques, mais comme souvent ici « nos pas ne peuvent quitter le chemin balisé ». Comme dans tous les lieux un peu touristiques, on ne va pas où on veut comme on veut (pas grave, on reviendra tous seuls la prochaine fois, il paraît que c’est encore mieux de parcourir ces campagnes à vélo, pour voir « les vrais gens »). Au milieu de Ganlanba, nous avons pu visiter un superbe temple bouddhiste en bois, enclave de sérénité comme on peut en voir tant dans cette région de Chine.

Avec en prime une comparaison de l’écriture Dai avec les caractères chinois (et des filles beaucoup moins ordonnées que les garçons! 👟😂).

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Un peu plus loin nous pouvons voir un autre temple bouddhiste en bois, ainsi que son stupa. Comme tous ces lieux, il s’agit encore d’un véritable havre de paix. Nous y croisons d’ailleurs quelques moines, certains à priori à peine plus âgés qu’Augustin, se dépêchant pour ne pas arriver trop en retard pour la prière. C’est amusant de voir ces moines en tenue traditionnelle, le kesa, et de grosses baskets, style Nike Air.

Pour finir cet après-midi dans l’univers Dai, on nous a conseillé d’aller voir « la Fête de l’eau ». Sans savoir vraiment de quoi il s’agit, nous suivons la foule (oui parce qu’ici dans le Yunnan, il y a encore moins de monde parlant anglais), en pensant bien que tout le monde s’y rendait (ça semblait être un évènement très populaire)

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Nous arrivons donc sur une grande place, entourée d’échoppes et de bancs (déjà bien pleins), et au milieu une grande fontaine. On ne sait pas trop quoi faire, on se dit alors que l’on va attendre, comme tout le monde. Quelques enfants, certains en combinaison de piscine et munis de bassines ou de pistolets à eau 🔫, commencent à essayer de s’approcher de l’eau, mais ils se font à chaque fois refouler par des « vigiles ». Cela ne nous étonne pas vraiment, il y a des fois des interdits pas toujours très logiques (car par cette chaleur, un peu d’eau aurait fait du bien!). De plus en plus de monde arrivait, et beaucoup avec des récipients et des pistolets à eau (d’ailleurs il y avait quelques marchants de pistolets à eau un peu plus loin). Mais que se passe-t-il ici? Il y avait aussi cette ligne au sol, faisant un cercle plus large autour du plan d’eau, derrière laquelle la plupart des gens se mettaient pour attendre… Et puis à un moment, après un discours biensûr incompréhensible pour nous, ils se sont tous jetés à l’eau 💦!

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Par la suite, nous avons compris que la Fête de l’eau correspond au Nouvel An Dai, qui est une déclinaison locale du Songkran thaïlandais. Ayant lieu mi-avril, le Nouvel An Dai se déroule sur 3️⃣ jours: le 1er jour se tient un marché géant sur les berges du Mékong, le 2ième se tient une course de bateaux dragon et des spectacles de danse et de musique. Enfin, le 3ième jour c’est l’apothéose: pour appeler la pluie bienfaitrice, les participants s’arrosent à coups de grands seaux d’eau, de pistolets à eau, de jets et bombes à eau. Ils rendent ainsi hommage à Nang Thorani, déesse de la Terre qui tordit sa chevelure pour en faire jaillir des torrents d’eau capables d’engloutir les armées du démon. En plus, plus on est mouillé, plus on aura de chance dans l’année!

Après cette journée haute en couleurs, nous avions une folle envie… de manger « western ». La nourriture chinoise est vraiment délicieuse, mais il y a des moments où en fait non, on sature, on a besoin de revenir vers nos repères. A Jinghong le choix pour dîner western n’est pas très varié, le choix se limite rapidement à des pizzas ou des burgers. TripAdvisor nous amène donc dans ce Bistro digne d’un décor de film américain, tenu pour un Canadien « Jim » 🇨🇦. Mais quelle bonne soirée! En Chine, nous sommes si peu d’étrangers que rapidement on se met à discuter ensemble pendant des heures, on échange nos WeChat si jamais nos chemins devaient encore se croiser, une véritable solidarité se crée sans rien attendre en retour.

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Finalement tous les soirs on choisissait de manger Western, ce qui nous a d’ailleurs conduit le vendredi soir dans un autre restaurant (tenu par un Hollandais 🇳🇱 si je me souviens bien, et qui brassait sa propre bière!) au milieu d’une grande tablée de « Laowai » (terme pour désigner les étrangers non-asiatiques en Chine) ayant pour habitude de s’y retrouver tous les vendredis soir. C’était fabuleux cette soirée à discuter avec des Américains 🇺🇸, des Australiens et des Néo-Zélandais 🇦🇺, et même un Suisse avec un style improbable de soixante-huitard chic. Gérard, le Suisse🇨🇭, nous a expliqué être arrivé ici il y a 18 ans, alors qu’il n’y avait encore presque rien, sauf de grandes forêts d’hévéas. Il a donc décidé de planter une jungle (oui oui, vous avez bien lu). Au milieu de sa propriété, où l’on retrouve je ne sais plus combien d’essences différentes, il tient 5 chambres d’hôte dans des cottages, tout en bois, où parfois même des singes s’invitent 🐵. Nous avons définitivement envie d’y revenir le temps d’un week-end long ou pourquoi pas pour Noël 🎄?

Nous avons à nouveau une journée « sans rien de prévu ». La nature, surtout la mienne, ayant horreur du vide, nous partons (à pied!) au parc Manting, magnifique jardin botanique en plein centre de Jinghong, de l’autre côté du fleuve. C’était malheureusement sans tenir compte que nous ne sommes pas tous égaux face à la chaleur, je me suis faite appelée Arthur sur tout le trajet 🥵.

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traversée du pont à pied

La nuit suivante, Julien et moi avons été réveillés par les cintres qui se cognaient entre eux dans le placard… un tremblement de terre! Pour nous deux, c’était la première fois que nous en « sentions un ». Personnellement, passé la question « mais… c’est un tremblement de terre? », je me suis rendormie directement. Julien par contre a été tenu réveillé un moment par ce qui ne m’a traversé l’esprit que le matin au réveil « mais on aurait pu voir tout l’hôtel s’effondrer sur nous! ». Et pour cause, il ne s’agissait pas d’un petit tremblement de terre : magnitude 5 à seulement 100km de nous!

IMG_4564Pour notre dernière journée « programmée, nous commençons par la visite du village Dai de Manzhao, où l’on fabrique encore du papier de manière traditionnelle.

On s’y promène et au fil des maisons, on peut y observer les locaux fabriquer de superbes feuilles de papier de riz. Les enfants s’y sont même essayé. Dans l’ordre ici la fabrication du papier de riz:

Au-delà de la technique de fabrication du papier, c’est aussi un très joli village, au milieu duquel trône bien évidemment un temple bouddhiste. Et celui-ci nous offre un beau panorama sur le village.

Nous avons même eu droit à la fameuse cérémonie du thé (nous y reviendrons un peu plus loin), servi par le bouddha (prêtre principal) du temple lui-même! Encore une fois le décalage que l’on se fait des moines bouddhistes nous a fait sourire. Certes il s’agit de moines, mais ils ont des téléphones dernier cri, de belles baskets, et ils sont surtout très sympathiques et très drôle!

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Nous reprenons la route, direction la pagode octogonale de Jingzhen. Ici, nous sommes seuls au monde, nous sommes accompagnés uniquement du tintement des clochettes sur le toit, moment de zénitude garanti!

Avec une fresque sur la vie de Bouddha, passé de prince hindou à fondateur du bouddhisme.

L’heure du déjeuner arrive, et tout comme avec Jeff, nous nous arrêtons dans un endroit improbable, où l’on peut manger du poulet « rôti à plat » (comme au Portugal) dans un…. garage, ou une carrosserie, je ne sais pas. Le poulet est cuit dans l’entrée, et on mange au-dessus du garage.

Le poulet est entier, certains n’ont pas pu s’empêcher de s’en amuser 😁🐓.

Puis nous prenons la route vers la montagne Nannuo Shan, l’une des six montagnes à thé qui ont fait la renommée du thé Pu’er ⛰☕️. Encore une fois, ces paysages nous ont replongés dans notre voyage au Sri-Lanka il y a 14 ans, décidément ce voyage nous a marqués.

Petite anecdote tout d’abord: le Xishuangbanna est une région autonome. Ainsi, quand nous quittons sa limite pour nous rendre vers la plantation de thé, nous devons nous arrêter à un poste de contrôle de police 🛂. Donc comme d’habitude, il nous faut répondre à un certain nombre de questions, sauf que certaines sont absolument ridicules, comme le numéro de vol par lequel nous sommes arrivés en Chine 9 mois plus tôt…), ainsi que le numéro de siège! Nous n’avons pas trouvé mieux comme réponse qu’éclater de rire 😆, même le policier a ri de l’absurdité de la chose.

Revenons donc au thé Pu’er. Il s’agit du thé chinois le plus réputé. Il ne s’agit ni d’un thé noir ni d’un thé vert, mais d’un thé « sombre ». A l’instar des grands vins, le thé Pu’er se bonifie en vieillissant, du moins pour les meilleurs crus. Les thés de cette famille se différencient de toutes les autres familles par la fermentation qu’ils subissent (fermentation, et non oxydation). L’oxydation est la réaction qui se produit naturellement chez tous les végétaux une fois récoltés au simple contact avec l’oxygène contenu dans l’air, comme par exemple une pomme qui noircit après avoir été coupée. Il en est de même pour le thé car, une fois ses feuilles récoltées, le processus d’oxydation s’amorce naturellement. La fermentation, quant à elle, est une réaction différente. Elle peut se produire chez les végétaux sous l’effet de micro-organismes (des levures ou des bactéries). C’est notamment grâce à la fermentation que le sucre du raisin se transforme en alcool lorsque l’on fait du vin. Cette réaction est due à l’action de bonnes bactéries naturellement présentes dans les aliments qui, soumises à certaines conditions de chaleur et d’humidité, sécrètent des enzymes qui vont modifier l’aliment d’origine. Le thé Pu’er est donc soumis, lors de son élaboration, à la chaleur et un certain taux d’humidité pour activer sa fermentation et se retrouve ainsi, outre son goût transformé, particulièrement sain pour l’équilibre de notre organisme.

Nous arrêtons donc la voiture dans un petit village, et partons à pied dans la forêt.

Nous arrivons un peu plus loin, après que Julien soit tombé nez à nez avec un serpent 🐍, dans un endroit ressemblant au repère de Peter Pan, avec des petits sentiers suspendus, reliant des petites cabanes en bois.

Comme dans tous villages de théiers, il y a aussi « le plus vieil arbre à thé », celui-ci étant vieux de 800 ans (j’ai d’ailleurs lu que l’on pouvait en trouver vieux de 2000 ans!)

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Comme évoqué dans un précédent article, les Chinois ont développé une technique ingénieuse pour le stockage du thé. En compressant fortement les feuilles de thé, on crée des volumes compacts faciles à empiler sans perte de place, et permettant de plus de mieux préserver le thé lors de longs voyages. La compression limite en effet le contact des feuilles avec l’air et ralentit ainsi l’oxydation des feuilles. Il s’agit des fameuses galettes de Pu’er, et ce format est encore aujourd’hui celui qui prime lors du façonnage des Pu’er. Même si on peut trouver du thé Pu’er en vrac, la plupart sont compressés sous diverses formes : galettes, briques, boules, etc.

Et ici encore, nous avons droit à la « cérémonie du thé ». Appelée Gong Fu Cha (signifiant « prendre le temps pour le thé »), cette cérémonie consiste à révéler tous les arômes du thé en préparant en quelques instants un thé très concentré. Les feuilles de thé sont infusées jusqu’à épuisement des arômes, il est d’ailleurs possible de conserver les mêmes feuilles jusqu’à 10 infusions pour un thé de très bonne qualité. Les ustensiles pour la cérémonie du thé sont:

  • Une petite théière 🫖, de préférence en terre cuite (mais ici elle est transparente, pour mieux admirer la robe du thé)
  • Un pot à thé avec une petite passoire ou un couvercle pour retenir les feuilles de thé
  • Des petites tasses de dégustation 🍵 à l’intérieur blanc de préférence pour mieux apprécier la couleur du thé (ici pas de gros mug pour boire le thé)
  • Une bouilloire
  • Un plateau ajouré avec un réservoir qui accueillera toute la vaisselle et l’eau versée

Le rituel se passe ensuite selon les étapes suivantes (attention, ce rituel est digne de la dégustation d’un grand vin!):

  • Il faut d’abord laver et réchauffer les ustensiles, afin d’éviter les chocs thermiques. Pour cela on verse de l’eau bouillante dans la théière, puis depuis la théière dans le pot, puis dans les tasses
  • Ensuite, on procède au lavage et à l’humidification des feuilles de thé. Pour cela, il faut placer le thé au fond de la théière puis verser de l’eau frémissante dessus pour ensuite jeter cette première eau
  • Le moment de la véritable première infusion est venu. On verse de l’eau bouillante dans la théière puis sur la théière, et on laisse infuser pendant environ 1 minute. Il faut ensuite transvaser le thé dans le pot muni de la passoire pour homogénéiser l’infusion puis dans les tasses. Au fil des infusions, les arômes et la couleur évolueront…

Ici nous avons pu goûter le traditionnel thé sombre Pu’er, mais aussi du thé blanc, c’est-à-dire celui ayant reçu le moins traitement lors de son élaboration.

C’est ainsi que ce termine ce premier tant attendu voyage dans notre conquête de l’Asie. Nous sommes revenus avec des étoiles plein les yeux, des souvenirs pleins la tête, et heureux par les rencontres, souvent improbables, faites. Tout comme Paris n’est pas la France, Pékin n’est pas la Chine, et la diversité découverte ici est très prometteuse pour la suite (même si à l’heure où je vous écris, sortir de Pékin est encore très risqué, le retour n’étant pas du tout garanti sans passer par la case quarantaine, même en ne quittant pas la Chine). Ce fut aussi l’occasion de comprendre comment nous aimons voyager en Chine, et nous comprenons que sortir des sentiers battus est encore plus nécessaire ici, notre façon de voyager n’étant pas mieux ou moins bien, mais simplement différente de celle des Chinois.

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中秋节 – La fête de la Lune

中秋节 – La fête de la Lune

Ce week-end est un des week-end les plus importants de l’année en Chine, car nous fêtons « la fête de la Lune » 🌕, ou encore « le festival de la mi-automne » 🍂🍁 (zhōngqiū jié en pinyin).

Ce week-end de trois jours a encore plus de saveur pour moi, car ça y est, j’ai enfin repris le chemin du travail 🏭💻✈️! D’où le temps incroyable que je mets pour rédiger le troisième et dernier article sur nos vacances de juillet…

Vous me diriez: pourquoi la fête de la mi-automne alors que nous ne sommes même pas encore à la mi-septembre? En Chine, le calendrier, largement utilisé pour gérer l’agriculture, est soli-lunaire (ou luni-solaire, je ne sais pas trop), les saisons sont donc décalées par rapport à notre calendrier géorgien 🗓. Par exemple, le nouvel an chinois fête le début du printemps, autour de début février. Nous fêtons à présent la mi automne, saison ayant commencé mi-août. Et il est vrai que nous avons réellement constaté un changement de météo à chacun de ces changements de saison, c’est assez bluffant je dois dire.

L’origine de cette fête résulterait de la synthèse d’un ancien culte lunaire et d’une fête agricole, célébration des récoltes de l’année accompagnée d’un festin. La tradition, vieille de plusieurs millénaires, veut que les familles chinoises se réunissent autour d’un même repas. Une fois le repas terminé, les familles sortent dans leur quartier ou dans les parcs publics pour admirer la pleine lune, tout en dégustant des fruits et des gâteaux de lune, les fameux yuebing 🥮. Le gâteau de lune, que l’on trouve de forme ronde ou carrée, est constitué d’une farce qui peut être sucrée (pâte de haricots rouges, pâte de sésame, fruits secs) ou salée (jaune d’oeuf, viande séchée). Apparu sous la dynastie Tang, le gâteau de Lune ne serait devenu vraiment populaire que plus tard. On raconte que lorsque les Mongols étaient au pouvoir, les anciens gouvernants Sung ont fomenté une rébellion pour les renverser. A l’approche de la fête de la mi-automne, ils auraient caché le plan d’attaque dans les gâteaux de lune. La rébellion fut un succès et donna naissance à la dynastie Ming, et la légende des gâteaux de la rébellion a fait perdurer l’attachement à cette pâtisserie parfois un peu étouffante.

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Petit assortiment maison de gâteaux de Lune

Même si le second degré n’est pas une spécialité chinoise, certains ont également trouvé ces gâteaux de lune, à la signification beaucoup trop d’actualité: 🟨 je suis déjà vacciné, 🟩 préservez votre code vert, 🟥 test PCR négatif, ⬜️ la situation épidémique est en train de se dissiper.

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Il y a plusieurs légendes expliquant l’origine de la fête de la Lune, notamment celles de Chang’e qui s’envole sur la Lune, et celle du lapin qui fabrique des pilules d’immortalité.

Il y a fort longtemps, la Terre avait 10 soleils 🔟☀️. C’était bien trop pour chauffer la planète et très vite, les soleils firent bouillir l’eau des mers, asséchèrent les terres, rendant le peuple affamé. Les hommes supplièrent alors Hou Yi, archer émérite, de les aider. Celui-ci réussit à décrocher neuf des dix soleils à l’aide de son arc, en laissant un seul, celui qui nous éclaire encore aujourd’hui. Un jour dans les montagnes de Kunlun, Hou Yi rencontra Xiwangmu (qui dans les traditions taoïstes règne sur une terre d’immortalité située à l’Occident). Elle lui offrit un élixir de l’immortalité qui lui permettrait d’arriver au ciel. Il confia alors cet élixir à sa femme, Chang’e. A partir d’ici, on a plusieurs versions de cette version de la légende (vous me suivez toujours?):

  • Ne voulant pas attendre d’avoir atteint un âge avancé pour consommer sa part, comme le lui conseillait son mari, Chang’e absorba l’intégralité de la dose en cachette, et aussitôt son corps se mis à voler. Trop embarrassée par sa conduite pour se rendre dans le ciel des immortels, elle s’exila sur la Lune, où elle vit depuis dans un palais de jade nommé Guanghangong

  • Un des apprentis de Hou-Yi, nommé Peng-Meng, menaça Chang’e pour qu’elle lui donne l’élixir magique. Dans l’urgence, elle l’avala et s’envola alors dans le ciel. Ne voulant pas être trop loin de son mari chéri, elle atterri sur la Lune et vit depuis dans le palais de jade. Chaque année, au 15 août du calendrier lunaire, Hou-Yi rejoint sa femme par son regard en contemplant la Lune et en lui offrant un banquet

  • Devenu roi, Hou Yi se comporta en tyran. Voulant obtenir l’immortalité, il alla subtiliser l’élixir de longue vie. Mais sa femme Chang’e, voulant épargner au peuple ces souffrances, s’empara de la fiole et but elle-même le breuvage. Son corps, devenu léger, flotta jusqu’à la lune 🌙. Hou Yi, bien que furieux, était très amoureux de sa femme et décida de ne pas décrocher la lune avec l’une de ses flèches 🏹, épargnant ainsi son épouse.

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Pour expliquer l’origine de la fête de la Lune, une autre légende existe 🐇💊: celle du lapin apothicaire qui fabriquait des pilules d’immortalité (appelées “pilules de crapaud”) dans un mortier sur la lune. Comment se lapin arriva sur la Lune? Là encore il y a plusieurs versions de la légende:

  • Le lapin est Chang’e elle-même. Ayant commis la faute d’absorber la potion de l’immortalité, à l’occasion de chaque pleine lune celle-ci doit se transformer en lapin afin de fabriquer des pilules d’immortalité au service des Dieux du Ciel
  • Un immortel se déguisa en pauvre vieil homme et demanda à manger à trois animaux: le renard, le singe et le lapin. Les deux premiers lui donnèrent de la nourriture, mais le lapin se sacrifia au feu pour nourrir le vieil homme. Très touchés, les dieux rendirent le lapin immortel sur la lune
  • un couple de lapins acquirent l’immortalité par leur pratique du taoïsme. Ils eurent quatre filles. Un jour, en allant au ciel sur l’invitation des dieux, le père lapin vit que Chang’e était condamnée sur la Lune. Triste sur le sort de Chang’e, il raconta l’histoire à ses filles en leur demandant “si votre père était enfermé dans la solitude seriez-vous prêtes à vous sacrifier pour l’accompagner?” Les enfants se sont tous portés volontaires et le couple a envoyé la toute petite fille sur la lune pour accompagner Chang’e. Cette histoire fait valoir la morale de la piété filiale, vertu primordiale en Chine

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Cette année, le jour exacte de la fête de la Lune était donc le samedi 10 septembre. Quoi de mieux que d’aller admirer le coucher du soleil et le lever de la Lune depuis la Grande Muraille? Au lieu des départs à l’aube, nous quittons donc le centre de Pékin en début d’après-midi, pour attaquer l’ascension à 15h. Départ d’un petit village comme il y en a tant autour de la mégalopole pékinoise, aux rues joliment décorées pour l’occasion.

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Nous partons donc du village de Shixia, pour monter jusqu’à la Grande Muraille.

Une fois arrivés dessus, cette partie étant non ou que partiellement restaurée, ça n’est pas toujours évident de voir les restes de la muraille.

Certains passages sont en très mauvais état, et ce qu’il reste des marches (rappelez-vous, la Chine ne serait pas la Chine sans ses innombrables escaliers) peut s’avérer infranchissable pour notre courageuse petite Constance. Heureusement, son papa super fort peut encore la porter sur ses épaules (même si elle commence à devenir un peu lourde…).

Arrivés sur la tour qui sera le point culminant de notre rando, comme toujours une vue imprenable s’offre à nous.

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C’est donc là que nous prenons notre pique-nique, pour attendre le coucher de soleil🌄, et le lever de la lune 🌝, qui paraît-elle nous offrira la plus grosse pleine Lune de l’année.

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Ensuite, descente à la frontale 🔦, ce qui est toujours impressionnant, surtout quand le guide a dû nous laisser (nous étions avec un groupe d’une quinzaine de personnes) car une famille ayant voulu continuer plus loin s’était perdue, et que la personne sensée nous mener au village ne se souvient plus du chemin… Ça a toujours un petit côté Pékin Express quand même nos sorties ici 🗺🧭.

Yunnan (云南) – Voyage le long du fleuve Yangtsé

Yunnan (云南) – Voyage le long du fleuve Yangtsé

Le fleuve Yangtsé (en pinyin Chángjiāng, ou 长江 en chinois) prend sa source dans les hauts plateaux arides du Tibet, pour se jeter ensuite à Shanghaï dans la mer de Chine Orientale, en ayant traversé toute la Chine. Avec une longueur de 6380km, c’est le plus long fleuve d’Asie, le troisième plus long fleuve du monde et le plus long au monde à couler entièrement dans un seul pays. Je vous l’avais bien dit: ici tout est « le plus grand/le plus haut/le plus long du monde ».

Les Gorges du Saut du Tigre (Hǔtiào Xiá en pinyin, 虎跳峡 en chinois) 🏔: Nous quittons à présent Shangri-La, direction « les Gorges du Saut du Tigre ». Avec une longueur d’une trentaine de kilomètres, ces gorges sont absolument spectaculaires: encastré entre le mont Haba (sommet à 5400m) et le mont enneigé du Dragon de Jade (sommet à 5600m), le fleuve Yangtsé franchit tel un énorme torrent pas moins de 18 rapides dans des paysages époustouflants. Des parois incroyablement verticales étranglent le fleuve, par endroit il doit il y avoir pas moins de 2000m de dalle, un véritable paradis pour les grimpeurs. Cette zone est si magnifique qu’elle fait partie des 15 « aires protégées des 3 fleuves parallèles » classées au Patrimoine mondial de l’Unesco.

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Vue panoramique sur le Mont enneigé du Dragon de Jade (5600m)

C’est toujours aussi impressionnant d’être entre ces deux sommets culminants à plus de 5000m d’altitude, sans même voir de la neige. Mais rappelons que nous sommes ici à une latitude équivalente à celle du milieu de l’Algérie, soit beaucoup plus bas que celle du Mont Blanc 🏔⛰🌏.

Mais d’ailleurs, savez-vous d’où vient ce nom de « Gorges du Saut du Tigre »? Ce nom provient d’une légende, celle d’un tigre qui aurait franchi d’un bond le Yangtsé pour échapper à un chasseur. Pas bête, le félin aurait choisi le point le plus étroit (20m seulement), là où un rocher, le Tiger Leaping Rock, s’enracine au milieu des flots déchaînés.

Revenons donc à notre arrivée dans les Gorges, qui est déjà en soit une petite expérience dont seuls nos amis les Chinois ont le secret 🚗🚕🚌🚙. A l’entrée des Gorges, un énorme noeud de voitures nous attendait. En effet, il fallait d’abord arriver au niveau d’une personne auprès de qui l’on devait acheter nos tickets permettant d’entrer dans les Gorges (tout est payant ici). Ensuite, deuxième noeud de voitures avant d’aller montrer nos tickets à une personne dans une petite guitoune, afin de contrôler que nous avions bien pris nos tickets (n’oublions qu’ici le plein emploi est le mot d’ordre, quitte à avoir des emplois complètement inutiles). Et à nouveau, longue attente au milieu d’un tas de voitures, à attendre que l’on nous laisse passer pour accéder à la route longeant les Gorges, le tout après 2 heures d’embouteillages. C’est incompréhensible car autant sur certains sujets, comme par exemple la logistique, les Chinois sont imbattables, mais pour ce genre de gestion de flux, l’expression « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué » n’a jamais été aussi vraie.

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Voir tout ce monde dans ces Gorges est très récent car jusqu’à la fin des années 1990, il n’y avait qu’un sentier muletier, qui a depuis été remplacé par la route que nous empruntons. Il y a à présent plusieurs façon de visiter les Gorges du Saut du Tigre: par en bas via l’itinéraire aménagé, toujours par en bas mais façon trail « pour aller toucher l’eau », ou encore par en haut façon trek. Pour contenter toute la famille, nous allons donc tester les trois méthodes! Pour nos enfants encore un peu ronchons quand il faut marcher, nous commençons par le chemin aménagé du bas, le fleuve étant particulièrement puissant et rugissant à cet endroit précis, étranglé entre la montagne Haba et la montagne du Dragon de Jade.

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Et puis tant qu’à aller sur les plateformes aménagées spécialement pour les photos TikTok (c’est une vraie institution ici), autant les utiliser aussi 📸

Pour remonter, 2 options: soit remonter par les escaliers en bois, soit remonter en escalator (si si, un vrai escalator a été installé pour descendre et remonter au parking, il faut ce qu’il faut). Nous avons donc laissé les enfants remonter avec Jeff en escalator, après qu’Augustin se soit laissé prendre en photo par une maman chinoise qui le trouvait très beau car il ressemblait à Harry Potter 🧙🏻🤓.

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Après cette première étape dans les Gorges, nous reprenons la voiture pour aller déjeuner dans une auberge plus le long de la route. Même si cette route avait été refaite récemment, il n’était pas rare de voir des morceaux de falaise s’étant détachés de la montagne pour tomber sur la route, et ça n’était pas juste des petits cailloux. Mieux valait ne pas se trouver en-dessous à ce moment-là!

J’ouvre ici une petite parenthèse sur les sanitaires en Chine. La plupart du temps, notamment dans les lieux publics, il s’agit de toilettes à la turque. Ce n’est pas ce que je préfère, mais au moins c’est plus hygiénique. De plus, le système de canalisation en Chine est si mauvais qu’il ne faut pas jeter le papier dans les toilettes, mais dans une poubelle à côté, même dans les habitations privées (bonjour l’odeur…). Troisième point, en Chine la notion d’intimité n’est pas la même que pour nous, à savoir qu’il n’y en a pas (ou du moins pas beaucoup). En allant faire une pause technique après le déjeuner, j’ai donc eu la joie de tester les latrines, mais grand luxe car il y avait des petits murets entre chaque. J’ai quand même demandé à Augustin de faire le guet pour que personne ne rentre alors que j’y étais…

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Après un bon déjeuner avec une superbe vue sur les Gorges, nous prenons la route mais dans une voiture plus petite que celle de Jeff, et qui ne passerait sans doute aucun contrôle technique, conduite par un de ces amis. Et en effet, la route qu’il fallut emprunter pour atteindre le début de notre rando était beaucoup trop étroite pour son van. La montée par cette route étroite était déjà une aventure en soit: route de montagne sans parapet, inclinaison sans doute supérieure à nos normes, et nous avons eu de la chance de ne pas croiser d’autres véhicules… Et vu les rochers que nous avions vus sur la route en contre-bas, nous espérions très fort que la route ne cède pas sous le poids de la voiture. Bref, nous sommes arrivés en haut sur le chemin de rando sans soucis 🥾! Ce sentier haut remplace l’ancien sentier bas, qui a été remplacé par la route goudronnée qui nous avions empruntée le matin. On ne côtoie pas ici le fleuve, mais on le domine du haut, voire de très haut, cheminant à flanc de montagne sur les basses pentes du Mont Haba.

Le trek complet se fait sur une journée, voire sur deux jours pour bien en profiter. La difficulté par temps sec est moyenne (et il devient très dangereux par temps de pluie), mais même si nous avons l’habitude de traîner les enfants avec nous les week-end pour randonner autour de Pékin, ce sont aussi leurs vacances donc nous avons opté pour ne faire qu’une partie du trek, sur un après-midi.

Les paysages sont grandioses, et impressionnants du fait de certains passages vertigineux. Pas de main courante ni corde pour sécuriser les passages aériens, nous comprenons mieux pourquoi cet itinéraire devient déconseillé par temps pluvieux: les pierres sont déjà très glissantes par temps sec, donc je n’ose pas imaginer si elles étaient mouillées. Et la terre argileuse dans les descentes rend le sol très glissant (même Julien nous a offert une figure artistique digne de ce nom en tombant avec Constance sur les épaules, pour ne pas qu’elle se fasse mal. Plus de peur que de mal, tout le monde va bien!).

Après la cohue du point de vue ultra fréquenté en bas, ici nous étions seuls au monde dans l’immensité des gorges. Enfin presque seuls, car les villages aux alentours sont constitués de fermes, et les flancs de montagnes sont les prairies des animaux de la basse-cour 🐂🐐🐓🐎.

En chemin, à peu près à mi-parcours, nous passons par un petit village où l’on s’arrête sur la terrasse panoramique d’un gîte à l’allure de gros refuge alpin. Nous y étions à peu près tous seuls, pourtant on sentait qu’ici fut un temps ça devait grouiller de monde. Il faut savoir que le sentier haut est plutôt empruntés par les occidentaux, plus amateurs de rando comme on les aime chez nous, où avoir un beau paysage se mérite au travers de l’effort. A contrario les chinois sont plus friands d’un accès facile à de beaux endroits à immortaliser pour leurs followers, le chemin aménagé du bas est donc tout indiqué. Etant donné qu’il n’y a plus de touristes étrangers en Chine, sauf les quelques de plus en plus rare expatriés, ces gîtes d’étape ne sont plus fréquentés comme ils l’étaient autrefois 😟.

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Après cette journée qui nous en mis plein les yeux et les jambes, nous arrivons à notre chambre d’hôte d’un soir. Un lieu que l’on ne devine pas de la route, caché à flanc de montagne, avec une vue imprenable sur les sommets, le tout rythmé par le cours du Yangtsé. Sans se concerter, Julien et moi retrouvons ici des sons et odeurs nous transportant dans le souvenir de notre voyage au Sri Lanka 🌴🌸🍃🎋🌺⛰🦎🦋. Après un délicieux repas (à base de produits du jardin) sur le toit-terrasse 🌄, nous avons longuement discuté avec la propriétaire du lodge (le bonheur pour nous de discuter avec des personnes parlant anglais, et pour elle de pratiquer la langue). Elle nous expliqua que la nouvelle route a fait grand bien pour les gîtes reculés comme le sien. En effet, auparavant avec l’ancienne route moins fréquentée (car en mauvais état), les touristes ne s’aventuraient pas trop loin des bords de route (sauf les étrangers notamment, plus en recherche de calme que nous amis chinois). Le COVID étant passé par là, presque plus personne ne venait donc dans ces petits lodges éloignés. Avec la nouvelle route, il y a plus de trafic, et les voitures roulent à une vitesse plus importante. Par conséquent, les gîtes trop proches de la route sont devenus trop bruyants, et donc moins attractifs, mais cela a fait le bonheur des autres plus reculés. Cela étant dit ce soir-là nous étions seuls, et très égoïstement nous avons beaucoup apprécié.

Le lendemain matin, Julien et Jeff se sont levés à l’aube pour descendre « toucher l’eau » comme ils disaient, façon trail cette fois-ci (moi je reste avec les enfants, car ce jour est un jour spécial 👦🏼🎂🔟). Une autre façon d’apprécier les lieux. Bizarrerie pour nous, arrivés au début du sentier de descente, Julien a dû payer son entrée à un monsieur qui attendait là. La raison? C’est lui qui avait tracé le chemin. En remontant, même histoire à l’entrée d’un autre sentier à un autre monsieur. Et même raison. Décidément, randonner ici semble encore être une activité à caractère exceptionnel.

Wumu (吾木): Au retour de Julien et Jeff, nous reprenons la route pour Wumu, notre gros coup de coeur des vacances, une véritable pépite, un voyage dans le voyage! Mais comme je vous le disais, ce jour est très spécial puisqu’Augustin souffle sa dixième bougie! Même si nous avons fêté ça comme il se doit avec ses petits camarades avant de partir, et même si son cadeau l’attend pour son retour de vacances, j’ai demandé à Jeff s’il était possible de trouver en chemin un gâteau, ou au moins quelque chose pour mettre une bougie dessus. Mais c’était sans imager l’expédition qui attendrait ledit gâteau! 🎒🎂🥾

La veille, Jeff nous avait expliqué que l’unique route menant à Wumu était en train d’être complètement refaite, et que par conséquent en temps normal elle n’était ouverte que deux fois par jour: de 12h à 13h, puis après 19h. Toutefois, la route ne pouvait à priori pas être dégagée pour nous permettre de passer avec la voiture le lendemain. Il nous demanda donc de préparer un sac à dos avec nos affaires pour les deux prochains jours, sa voiture restera avec nos valises à l’entrée du chantier non dégagé. Il nous faudra alors rejoindre à pied l’autre extrémité du chantier, où une autre voiture devait nous attendre. Bon… ça semble être un peu compliqué, mais après tout nous voulions sortir des sentiers battus, ce programme nous convient donc très bien! Il faut savoir aussi que le Huahuasei Lodge, là où nous passerons nos deux nuits à Wumu, appartient à Jeff, et au fur et à mesure du voyage nous nous sommes rendus compte qu’il connaissait à peu près tout le monde dans la région, qu’il connaissait comme sa poche. Donc aucune inquiétude, nous nous savons entre de bonnes mains. Après un passage par Lijiang pour acheter un ÉNORME gâteau d’anniversaire (là j’espère très fort que le passage à pied avec les sacs à dos ne sera pas trop compliqué…), où nous avons aussi déjeuné avec Wendy, l’épouse de Jeff qui est aussi une compatriote belge, nous reprenons la route en direction de Wumu.

La route est longue, et nous faisons un arrêt tourisme à « Blue Moon Valley ». Il s’agit d’un lac très prisé, du fait de l’eau d’un bleu turquoise éclatant (photo non retouchée), au pied de la montagne du Dragon de Jade.

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Et donc comme vous pouvez vous en douter… les rives du lac étaient noires de monde! Il faut dire que le lieu se prête particulièrement bien à de jolies photos, même s’il n’est pas simple de n’avoir personne d’autre dessus! 📸💧

Ce qui était assez drôle, c’est le nombre impressionnant de couple de futurs mariés venus avec un photographe pour immortaliser l’évènement. Prendre des photos pour les occasions spéciales est une vraie religion en Chine (et ça n’est pas moi qui le dit!), les mariés prévoient donc en général une journée (voir plus) pour faire les photos dans les plus beaux endroits possibles. Nous avons croisé au moins 40 couples de futurs mariés (ou pas en fait, car finalement rien n’empêche de choisir une tenue de marié(e) plutôt qu’une autre pour sa séance photos!), et c’est toujours très amusant de voir une jeune femme bien maquillée et en robe de mariée, relever sa robe pour marcher sans trébucher, et de découvrir qu’en dessous elle est en legging et claquettes en plastique 🧖🏻‍♀️🩴.

A y regarder de plus près, l’ensemble a été fortement aménagé, et n’a donc plus grand chose de naturel. Le lac a été creusé plus encore pour qu’il n’y ait plus que du sable au fond, afin d’accentuer la couleur turquoise. Les cascades en terrasse, au départ complètement naturelles, ont été aménagées pour les rendre plus régulières, plus esthétique.

Mais ça n’en reste pas moins très joli lieu, parfait pour le plaisir des followers sur les réseaux sociaux, et ce qui montre aussi ce que l’on veut sur ses photos, l’envers du décor étant bien moins glamour que l’image que l’on souhaite montrer.

La famille s’est prêtée à ce jeu, même si nous avions du mal à garder notre sérieux 😅

Allé hop, c’était joli, mais nous on préfère s’isoler au milieu de nul part. Nous reprenons donc la route avec Jeff et le gâteau (si si), et nous roulons jusqu’à ce que la route sous complètement bloquée. Deux heures de marche plus tard, avec des enfants demandant toutes les 2 minutes « quand est-ce qu’on arrive? », le gâteau est sain et sauf (pourtant ça n’était pas gagné!)

Arrivés enfin de l’autre côté, le neveu de Jeff, qui devait nous retrouver avec une autre voiture, n’était pas monté si haut (Jeff nous disait en rigolant que son neveu était un fainéant), mais pas de soucis, un ouvrier va nous y conduire avec son camion de chantier, qui sentait aussi fort le carburant et l’huile que ses amortisseurs étaient inexistants.

Quand nous retrouvons un véhicule plus traditionnel, nous pouvons admirer la vue qui s’offre à nous à chaque virage.

Construit sur un rocher (à présent bien caché par les maisons), Wumu est un village de 600 âmes offrant une superbe vue sur la vallée creusée par le Yangtsé, et sur toute la région de Baoshan. Et cette vue est encore plus impressionnante depuis la terrasse du Lodge de Jeff! Le village a beau être à 2200m d’altitude, en hiver les températures ne descendent pas en dessous des 15°C, c’est donc un climat idéal en toutes saisons. On ne vient pas ici par hasard. On y vient spécialement, dans un but précis : on s’y pose loin de tout, on contemple, on randonne.

Ce très joli Lodge appartient donc à Jeff et Wendy. Quand ils ont racheté l’ancienne habitation il y a quelques années pour une bouchée de pain, il n’en restait plus grand chose, la maison ayant été en grande partie dévastée par un incendie. Avec l’aide des artisans du village, ils ont tout reconstruit, pour ensuite ouvrir en 2014 ce Lodge, qui est d’ailleurs le seul endroit du village accueillant des touristes. Tout ici a été fait sur place, y compris les meubles, parfois par des gens n’ayant jamais mis les pieds dans un hôtel de leur vie. Mais cela donne un vrai cachet à cette maison, qui est chaleureuse, confortable, fonctionnelle, et qui plus est très belle.

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Petit privilège du début de saison, nous étions tous seuls, et ça n’a pas de prix quand on est en Chine. Et aujourd’hui étant un jour spécial, on s’autorise donc un petit apéro comme chez nous 🍻🇧🇪, avant un succulent repas, avec pour dessert… le gâteau miraculé🎂🎉!

Laissez-moi vous parler un peu plus de Wumu (signifiant « lieu d’abondance »), village qui, vous l’aurez compris, nous avons vraiment adoré. Ici, comme dans la région autour de Lijiang, la grande ville des environs, vit la minorité Naxi (纳西族). Les Naxi, d’origine nomade, possèdent leur propre religion, le dongbaïsme, dont le culte de la nature, et plus particulièrement des eaux et des montagnes, en sont les fondements. Les prêtres, les dongba, sont des shamans, et il y en aurait encore pas moins de neuf actifs dans cette vallée. Pour exprimer leurs coutumes et transcrire leurs écrits, les Naxi utilisent une écriture vieille de plus de 1000 ans, qui se compose de pictogrammes inspirés de la nature. Pas de caractères abstraits comme dans l’écriture chinoise, mais des caractères représentant le mot de façon graphique. Contrairement à l’écriture chinoise qui a beaucoup évolué au fil des millénaires et est donc devenue très abstraite, celle-ci est restée originelle et reste donc beaucoup plus intuitive à lire.

Le cours du Yangtzé passe en contrebas de Wumu, Dans cette boucle du fleuve, le gouvernement central prévoyait la construction de huit barrages, principalement afin de doter les grandes villes du sud en électricité (jusqu’à récemment, le village n’était pas alimenté en électricité). Deux barrages ont été terminés en 2012 : Liyuan et Ahai. Cela a fait monter le niveau du fleuve, inondant ainsi les cultures aux abords du cours d’eau. Les paysans impactés sont depuis indemnisés par le gouvernement par une prime de ¥30 000/an (soit un peu plus de 4 300€), ce qui leurs suffit amplement pour vivre dans cette région si reculée. Regroupés en 5 clans principaux, les paysans ici élèvent principalement des cochons, le jambon étant d’ailleurs une des spécialités locales 🐷. Ils cultivent du blé et maïs (pour nourrir le bétail), mais aussi beaucoup de tabac (beaucoup de familles ayant d’ailleurs ici signé un contrat avec China Tobacco), ainsi que des légumes et des fruits. Ici tous les villageois sont donc des agriculteurs, vivant de manière encore très traditionnelle, avec des liens familiaux très forts. Evidemment, tout comme chez nous dans nos villages isolés, 40% de la population officielle de Wumu vit en réalité à Lijiang (ce qui est d’ailleurs le cas de Jeff et Wendy), pour être plus proche des écoles pour leurs enfants (en Chine, les familles accordent énormément de moyens pour donner la meilleure éducation possible aux enfants. C’est d’ailleurs aussi pour cette raison que beaucoup de jeunes chinois ne veulent pas d’enfants, car leur éducation coûte beaucoup trop cher).

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Les champs de tabac
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Les cultures en terrasse

Revenons à notre périple. Après une bonne nuit de sommeil et un très bon petit déjeuner (avec en prime du pain frais, du Nutella et de la confiture maison, ce qui est suffisamment rare en Chine pour le souligner), nous partons randonner vers les rives du Yangtsé. Ici les distances à vol d’oiseau peuvent être courtes pour aller d’un endroit à un autre, alors qu’il est souvent nécessaire de prendre la voiture sur plusieurs dizaines de kilomètres pour aller de ce même point A au point B. Ainsi, pour faciliter les déplacements entre les différents villages (Jeff était auparavant maire de Wumu), mais aussi pour développer son activité, Jeff nous raconta qu’il avait fortement amélioré l’été précédent la praticabilité des chemins de randonnées des environs (et vu la situation très reculée des lieux, cela a été fait manuellement, avec l’aide des villageois). La descente était par endroit très raide donc pas toujours aisée (du moins pour moi, Julien et Jeff étaient comme des cabris, et Constance était le plus souvent sur les épaules de l’un ou de l’autre), mais quel paysage magnifique s’offrait à nous! 🏞⛰🥾

Nous descendons ainsi jusqu’à arriver au bord du fleuve, où un vieux bateau de pêcheur nous a rejoint pour nous emmener ensuite au village de Baoshan, à 40 minutes de navigation de là 🛥. Cet été est aussi ici particulier: plus sec et plus chaud. Malgré que nous soyons en plein milieu de la saison des pluies, le niveau du fleuve est déjà très bas, laissant à l’air libre une terre complètement asséchée 🌞🌞😟.

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Notre embarcation nous dépose ensuite en bas du village de Baoshan, que nous atteindrons après une montée en plein cagnard, à pied pour les grands, et à dos de poney pour les petits 🦄.

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en montant vers Baoshan…
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Baoshan vu de loin

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Le village de Baoshan, aussi surnommé « le village de Pierre », est installé sur un énorme rocher (un autre!), surplombant le fleuve Yangtsé. Ses petites habitations sont étroitement collées les unes aux autres, et avec ses petites ruelles tortueuses, le village donne une impression de désordre. C’est si calme ici aussi! C’est tellement salutaire quand on vient du fourmillement incessant de la capitale.

En penchant la tête par-ci par-là, on découvre par les portes laissées ouvertes de magnifiques petites habitations, et nous pouvons apprécier la vie quotidienne du village, si paisible.

C’est ici que nous prenons notre déjeuner, encore une fois dans un lieu que seuls les initiés peuvent connaître. Comme dans tous les endroits où Jeff nous emmène, nous apprécions toujours un peu plus la nourriture chinoise, riche en légumes (parfait pour moi), avec des viandes en sauce très parfumée, à base d’herbes et d’épices dont nous devons apprendre les secrets avant de rentrer en Europe. Par contre, c’est toujours un peu compliqué avec les piments 😅🌶🥢.

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Et en bonus, une vue magnifique pour ce déjeuner

Pour la suite, deux options s’offrent à nous: soit retour à pied, avec montées et passages vertigineux, soit retour en voiture avec le neveu de Jeff. Vu la chaleur, la fatigue des enfants et ma tendance à avoir le vertige, Julien et Jeff partent à pieds, et nous les retrouverons un peu avant Wumu. Les photos de Julien sont superbes, mais en effet j’aurais probablement été incapable de passer par certains endroits effectivement très aériens (d’autant plus avec des enfants à gérer en plus de moi-même 😱.)

De notre côté avec les enfants, nous remontons tout le village pour trouver le neveu de Jeff, et une route aussi en travaux…

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Avec le ralentissement dû aux travaux et la nécessité de devoir contourner toute une montagne pour rejoindre Wumu, ça n’était pas beaucoup plus rapide de prendre la voiture 😅🚘🥾.

C’est donc avec regret que nous quittons Wumu le lendemain matin, mais encore à pied, pour le plaisir d’en profiter jusqu’au bout! Cela se passe de commentaires, les images parlent d’elles-mêmes…

Un minibus nous attendait à un village plus loin, pour nous ramener à la voiture de Jeff, restée bloquée par les travaux deux jours plus tôt. Car, bonne nouvelle, la route est ouverte aujourd’hui, mais il ne faut pas rater le créneau!

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Lijiang (丽江市): retour vers la civilisation, prochaine étape, mais aussi la dernière avant de partir vers le sud du Yunnan: Lijiang (signifiant: la ville du beau fleuve). La vieille ville de Lijiang est une ancienne ville absolument charmante. Bien que détruite en grande partie en 1996 suite à un tremblement de terre, elle s’est vite reconstruite, notamment grâce à son classement au patrimoine mondial de l’UNESCO. Lijiang est le centre de la minorité Naxi, à la culture, nous l’avons vu, très spécifique. Ancien centre d’échanges importants sur la route du thé et des chevaux, et relié avec le Tibet et la Birmanie, Lijiang est toujours aussi riche, et peut-être trop : Lijiang est devenue ces dernières années une destination très prisée des touristes chinois, qui la considèrent comme une région très romantique et où voyager avec sa moitié y est très répandu. Cela est notamment dû à une légende locale racontant le suicide de jeunes gens dont l’amour était rendu impossible en raison de leurs origines sociales différentes. Lijiang abrite aujourd’hui de plus en plus de boutiques, de bars et de restaurants, rendant certains quartiers beaucoup trop bruyants et occultant le cachet de cette vieille ville. Lijiang n’en reste pas moins un ville très jolie, avec ses nombreux canaux qui lui confèrent un air de Venise asiatique.

L’un des clichés les plus célèbre de Lijiang est celui de l’étang du Dragon noir, avec son pont blanc de style oriental, sa pagode, et en arrière-plan la montagne du Dragon de Jade .

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Ce jour-là, comme tous les autres d’ailleurs, il faisait une chaleur de plomb. Nous nous sommes mis à la recherche d’un marchand de glace, mais ici ça n’est pas si simple, les chinois n’étant absolument pas adeptes du sucré. Finalement, nous trouvons cette curiosité: un robot qui nous sert de très bonnes glaces à la fraise 🍓🍦🤖.

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Avant de clôturer ce second volet de notre voyage, nous faisons 2 petits détours à côté de Lijiang.

Tout d’abord par Baisha, signifiant littéralement « le sable blanc », situé au nord de Lijiang. Avant 1270, Baisha était la capitale du royaume Naxi. Les ancêtres des Naxi traversèrent la rivière Jinshajiang (aussi connue comme la rivière au sable d’or), descendirent la montagne du Dragon de Jade puis entrèrent dans le bassin de Lijiang. Le premier lieu où ils s’installèrent et développèrent leur culture fut Baisha. A présent cette petite ville à l’architecture très typique, est surtout très animées par des petites boutiques d’objets d’antiquité, ainsi que d’objet faits main. Mais surtout, ce que nous retiendrons de Baisha c’est cette magnifique vue sur la montagne enneigée du Dragon de Jade, avec le ciel rosé du coucher de soleil.

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Un second détour nous emmène à Yuhu, qui est aussi le village qu’avait choisi l’explorateur Joseph Rock pour s’installer. En effet, botaniste de métier, le Dr. Rock est venu ici en mission pour étudier les plantes de la Montagne du Dragon de Jade. Lors de ce voyage, il tomba amoureux de la région, de ses habitants et de sa culture, et décida alors de s’y installer. Il habitera au village de Yuhu pendant 27 ans. À partir de 1922, il commença un énorme travail de recherche sur la minorité Naxi locale, prit de nombreuses photos et rédigeât des articles pour le magazine « National Geographic ».

Cela fait maintenant un moins que cette étape de notre voyage s’est terminée, et nous en gardons un souvenir incroyable. Depuis, la situation a apparemment beaucoup changé. En effet, des amis ont suivi nos traces (ils y sont actuellement), et l’épidémie fait à présent aussi de l’ombre sur le Yunnan (juste pour une poignée de cas). Ils nous ont rapporté avoir vu une réelle différence entre leur arrivée là-bas il y a dix jours et maintenant: tout le monde reporte le masque, obligation d’avoir un test PCR de moins de 24h pour faire un check-in dans un hôtel, beaucoup d’établissements doivent fermer (notamment le Lodge de Jeff, ou encore tout Shangri-la). Shangri-la a d’ailleurs enregistré son tout premier cas depuis le début de l’épidémie, la psychose reprend, nous avons eu le nez creux en partant début juillet!

La suite du voyage: Xishuangbanna, dans le sud du Yunnan 😎

Yunnan (云南) – Voyage aux portes du Tibet

Yunnan (云南) – Voyage aux portes du Tibet

Ça y est, nous avons enfin pu sortir de Pékin pour VOY-A-GER. Oui, le voyage c’est ce que nous plaît, c’est ce que nous voulons transmettre aux enfants, c’est notre carburant. Ce voyage nous l’attendons depuis des mois, la politique COVID appliquée ici nous l’a fait décaler 2x, mais ça y est, le grand jour est enfin arrivé!

Pour notre premier voyage en Chine, nous avons choisi le Yunnan. Quand nous avons commencé la préparation du voyage, nous avions contacté plusieurs agences, car par les temps qui courent voyager seuls quand on ne connaît pas le pays, que l’on ne parle pas la langue et quand on n’est pas chinois est malheureusement déconseillé. Notre cahier des charges était assez simple: nous voulions découvrir la Chine, nous voulions de l’authenticité, sortir des sentiers battus, et nous voyageons avec 2 jeunes enfants qui n’aiment pas toujours autant marcher que leurs parents 😅. Les trois agences contactées ont été unanimes: il faut aller dans le Yunnan! C’est donc Yunnan Roads que nous avons choisi pour organiser notre voyage, juste pour nous quatre, avec un chauffeur guide pour une partie du voyage.

Le Yunnan (云南, signifiant « au sud des nuages »), est une province nichée dans le Sud-Ouest de la Chine, frontalière  avec les forêts tropicales du Vietnam et du Laos au Sud, et de la Birmanie à l’Ouest. Le Nord-Ouest du Yunnan est le début quant à lui des hauts plateaux tibétains, avec notamment la célèbre ville de Shangri-La. Cette province, ayant une superficie équivalente à celle de l’Allemagne, présente une altitude moyenne de 1980m, avec au nord des sommets dépassant les 5000m. La province du Yunnan comporte pas moins de 25 minorités ethniques (sur les 56 recensées sur toute la Chine). D’un point de vue économique, c’est une des provinces les plus pauvres de Chine, mais c’est aussi la plus riche de par sa diversité: le territoire, recouvert à 40% de forêts et à près de 94% de montagnes, est caractérisé par la plus importante variété de climats, de paysages, et de populations de Chine.

Il était évident qu’en 2 semaines et demi nous ne pouvions pas tout voir, il a donc fallu faire des choix. Nous avons donc choisi de parcourir en itinérance toute la partie nord-ouest du Yunnan pendant les 10 premiers jours de notre voyage (cela fera l’objet de cet article ainsi que du suivant), pour finir par une semaine « tranquilles » dans l’ambiance subtropicale des bords du Mékong (cela sera le troisième article de ce voyage).

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Au départ de Pékin (rouge): road trip dans le Nord-Ouest du Yunnan (bleu), semaine dans l’ambiance sub-tropicale du Sud.

Mais nous reviendrons! Il nous faudra en effet approfondir certaines de nos pépites découvertes lors de ce voyage, mais aussi aller voir les rizières en terrasse de Yuanyang au centre de la province, ainsi que les forêts de pierre à l’Est à Kunming. Bref vous l’aurez compris, nous sommes revenus à Pékin avec nos têtes pleines de souvenirs, nos batteries rechargées à bloc, ravis de toutes les belles rencontres faites lors de ce voyage, et par-dessus tout heureux d’avoir enfin pu goûter à cette Chine que nous étions venus chercher en venant vivre ici.

Dǎlì (大理) et Xizhou (喜洲): Nous commençons donc notre périple par la ville de Dǎlì. Perchée à une altitude de 2000m, la ville de Dǎlì s’étant le long du lac Erhai, au pied de la chaîne des Cangshan. Cette région est habitée essentiellement par les Bai (il y en a environ 2 millions dans le Yunnan). La communauté Bai (signifiant « Blanc » du fait de la couleur dominante du costume féminin) se forme au début de notre ère, à l’époque des royaumes de Nanzhao et de Dali. Elle est constituée de l’ensemble des populations qui occupent alors la région du lac Erhai, c’est à dire d’indigènes, de migrants Han (c’est-à-dire l’ethnie qui constitue le peuple chinois historique), de Di et Qiang tibétains, de Birman et de Yi, fusionnant localement pour former la culture Bai. En 1958, pendant la révolution culturelle, une grande partie des Bai fuient en Birmanie.

Nous n’avons pas pu passer autant de temps que prévu à Dǎlì, du fait de la suppression du vol prévu initialement et du basculement sur un autre nous faisant arriver seulement en fin d’après-midi. Nous n’y avons passé qu’une soirée, mais d’entrée nous avions l’impression d’avoir changé de Chine. Des couleurs, des rues pleines de monde (sans masque! Nous avons mis un peu de temps à nous rendre compte que nous étions les seuls à porter le masque, réflexe que nous nous sommes empressés d’oublier). Des sourires, et beaucoup de regards curieux, car les touristes étrangers dans cette région son très rares par les temps qui courent, et du fait que le Yunnan n’autorisaient pas les voyageurs avec étoile (voir mon article précédent). Dans la vieille ville de Dǎlì, pas d’immeubles mais des bâtiments bas dont les façades sont habillées de grandes portes en bois, qu’il s’agisse d’habitations, de boutiques ou de restaurants.

En déambulant dans les rues du vieux Dali, notre constat fut aussi qu’ici les gens ont un faciès bien différent de celui que nous avons l’habitude de voir à Pékin. Pour faire simple, je dirais qu’ici les visages font « moins chinois », avec des yeux moins bridés, et des pommettes moins saillantes. Aussi, là où à Pékin il est important d’avoir une peau très blanche (signe d’un rang social plus élevé), ici les peaux sont plus mates. Cela dit, la Chine est un pays si grand, il n’est pas étonnant de voir de telles différences!

En arrivant dans un restaurant recommandé par le chauffeur de taxi nous ayant emmené de l’aéroport, nous avons même eu droit à des applaudissements de la part de nos voisins de table quand nous nous installés pour le dîner. Pour ce premier repas des vacances, il nous a été conseillé d’aller manger un barbecue, spécialité locale où l’on met à cuire nous même les différents ingrédients individuels commandés. Pensant prendre des petits légumes en sauce, nous avons en fait pris de la grenouille, coupé en petits morceaux (avec les os). En plus du fait que c’était ultra épicé, on passait plus de temps à enlever les petits os (sans pour autant les recracher par terre comme c’est l’habitude ici) qu’à goûter ce plat. Mais comme tout premier repas de vacances, c’était succulent.

Nous avons ensuite encore un peu flâné dans les rues animées du soir, avant de retrouver notre taxi pour notre premier hôtel. Ce fut déjà l’occasion de voir quelques curiosités, comme des lamas promenés en rue à l’instar de nos chiens, ou le Mac Do du coin installé dans un bâtiment « typique chinois », on encore une dame revêtue d’une robe de princesse (nous en comprendrons plus tard la raison de cette « habitude de touristes »).

Une autre chose que nous avons vue pour la première fois, ce sont ces salons où l’on vient pour se faire récurer les oreilles. Nous ne comprenions pas de prime abord pourquoi des gens équipés d’une lampe frontale se penchaient sur le côté de la tête de personnes installées sur des chaises longues en rang d’oignons. Puis en voyant une affiche avec des images peu ragoûtantes d’oreilles sales, nous avons compris de quoi il s’agissait. Quelle drôle d’idée tout même 😅!

Nous prenons ensuite la route pour Xizhou (à 20km du vieux Dali), où nous passerons nos deux premières nuits. Le lieu où nous arrivons est une réelle surprise pour nous. Cet hôtel occupe une ancienne grande demeure aristocratique chinoise construite en 1948, et qui fut restaurée par un très sympathique couple d’antiquaires originaires de Chicago. Avec cette superbe entrée et ses cours carrées, il s’agit d’une bâtisse dans le pur style de la minorité Bai. Peu de temps après sa construction au milieu du siècle dernier, cette fastueuse demeure fut réquisitionnée par l’armée populaire immédiatement après la prise de pouvoir communiste. C’est ce qui la sauva pendant la révolution culturelle, l’armée ayant protégé les magnifiques bas-reliefs, portes ciselées et sculptures contre les exactions des Gardes rouges.

Le calme de cette première soirée, le ciel noir sans pollution lumineuse, le bruit des insectes (et les piqures de moustiques qui vont avec), l’odeur caractéristique de l’air humide mêlé au parfum de fleurs, enfin un retour au calme qui nous a tant manqué dans l’effervescence pékinoise.

Le lendemain, nous partons à la découverte de la bourgade de Xizhou. Malgré que cela soit tout à fait faisable à pied, nous cédons à la demande des enfants de la faire en tchouk-tchouk, où pour une poignée de ¥ le chauffeur nous emmène dans des lieux significatifs de la ville.

La bourgade de Xizhou conserve l’un des plus beaux ensembles de demeures Bai de la région, avec leurs élégants portails ouvragés et leurs toits de tuiles à la forme caractéristique. Les cours intérieures de ces demeures typiques sont bordées sur trois côtés de pièces, et par un mur décoratif protégeant ses habitants des mauvais esprits (mais aussi garant de l’intimité de la famille).

Derrière les grandes portes en bois habillant toutes les maisons de la rue principale, on peut aussi bien trouver un épicier, un coiffeur, voir même le Leroy Merlin du coin 😉.

Au cours de notre balade en Tchouk-tchouk, nous avons poussé des portes que nous n’aurions même pas penser regarder, et souvent des petits trésors s’y cachaient, comme cette école de fabrication de tableaux en fil de soie, un réel travail d’orfèvre. Même si le procédé de fabrication de la soie est assez contestable, le résultat n’en est pas moins bluffant.

Derrière une autre porte nous pouvons prendre le thé, selon la cérémonie du thé. Je vous décrirai le principe de cette « cérémonie du thé » dans un prochain article, et je pense que nous vous le ferons découvrir en vrai quand nous reviendrons en Europe. Ici, le thé est biensûr disponible en vrac, comme chez nous, mais aussi sous forme de « cake », sorte de disque de thé compacté.

Sur la place centrale, on peut trouver de nombreuses gargotes où croquer des xizhou baba, des pains fourrés de lardons et ciboulette pour la version salée, ou de sucre et purée de haricots rouges pour la sucrée. On y trouve biensûr aussi de nombreux commerces (la ville est tout de même très touristique) dont de bijoux en argent. Je pense que je devrai y consacrer un article aussi, mais pour très fortement simplifier, il faut savoir que l’histoire de la Chine a été fortement façonnée par le métal argent. On y trouve donc énormément de bijoux et autres objets et argent, et souvent on peut regarder l’artisan le travailler au fond de la boutique ou à l’entrée.

A Xizhou nous avons aussi eu l’occasion de nous promener dans les rizières, qui s’étendent à perte de vue. A cette époque de l’année, elles sont encore vertes, mais vont très vite jaunir (comme le blé) jusqu’à la récolte en octobre. Elles seront alors nettoyées puis remise en eau fin novembre/début décembre.

Nous avons ensuite trouvé un très agréable toit-terrasse pour le dîner, au milieu des rizières justement, où nous avons notamment goûter des oeufs de 100 ans. Il s’agit d’un mets typiquement chinois, qui s’obtient en laissant vieillir des oeufs pendant au moins 2 moins dans un mélange de boue riche en chaux, de thé, de cendre et de bicarbonate de soude. Le blanc d’oeuf prend alors une couleur marron translucide, comme de la gelée, et le jaune devient bleu-vert. On ne va pas vous mentir, nous n’avons pas réussi à apprécier ce plat à sa juste valeur…

Lors de notre retour à l’hôtel, nous nous sommes arrêtés regarder les dames de la bourgade (souvent assez âgées) se retrouver pour danser sur des musiques pleines d’entrain. Car rappelons-le, les chinois aiment se retrouver dehors quand la fraîcheur revient, pour jouer aux cartes, au mahjong, jouer à divers jeux d’extérieur, mais aussi danser.

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La route vers Shaxi (沙溪): nous faisons à présent connaissance avec Jeff, qui sera notre chauffeur et guide pour les sept prochains jours. N’ayant en effet pas le droit de conduire ici en Chine et n’étant pas capable de mener une conversation en chinois, c’est indispensable (Jeff parle anglais). Nous prenons donc la route pour Shaxi, seconde étape du voyage, avec un premier arrêt à Zhoucheng. Ce village de minorité Bai est réputé pour ses batiks bleus aux motifs blancs. La plupart des ateliers impriment ces tissus, mais certains (quoique de moins en moins nombreux) entretiennent encore la méthode traditionnelle, qui consiste à nouer le tissu avant de le tremper dans une teinture d’indigo. C’est la façon dont le nouage est fait qui fera que l’on obtiendra tel ou tel motif. Le processus de fabrication est celui illustré ci-dessous (vous noterez que même les enfants s’y sont essayés)

Après cette halte assez ludique, nous faisons route et faisons un arrêt déjeuner dans un routier. Au lieu de choisir les plats sur une carte, nous les choisissons directement dans le frigo (en évitant de tourner la tête vers la cuisine, quoique dans celui-ci elle semblait assez propre).

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En Chine, on ne commande pas chacun son plat, mais des plats à partager. Comme toujours, nous nous faisons avoir en commandant trop à manger, d’autant plus que dans notre éducation occidentale, il ne faut pas laisser de reste. Ici, c’est exactement l’inverse: ne rien laisser serait signe que l’on n’a pas assez mangé! D’ailleurs si vous vous faites inviter pour manger au restaurant par un chinois et que vous avez tout mangé, il recommandera des plats en plus jusqu’à que vous en laissiez à table. Nous qui faisons en sorte de ne pas gaspiller de nourriture, ça fait toujours étrange de voir une table après le repas, c’est comme s’ils étaient tous partis en même temps aux toilettes, car jamais nous ne laisserions une table comme cela.

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Nous continuons ensuite notre route vers une seconde halte, sur le magnifique site de Shibaoshan (signifiant « Mont du Trésor de Pierre »). Ce site est connu pour ses grottes troglodytiques, considérées comme la Perle du Yunnan (ou plutôt « une des » selon moi). Il s’agit d’un vaste complexe de grottes datant d’environ 1300 ans, avec de remarquables représentations d’images bouddhistes gravées dans les rochers, dont le Guanyin est le plus populaire. Cet art rupestre témoigne de la popularité du bouddhisme Mahayana, originaire du nord de l’Inde, dans cette région.

Après une ascension en escalier (la Chine ne serait pas la Chine sans ses innombrables marches d’escalier), nous arrivons face à Mahakala, cette divinité bouddhiste à l’aspect effrayant, faisant partie des Dharmapala, gardiens protecteurs de la loi, protégeant la doctrine et ses institutions des forces ennemies.

Pour nous le bouddhisme est assez difficile à comprendre, d’autant plus qu’à l’école j’avais appris qu’il s’agit plutôt d’une philosophie, et non d’une véritable religion. Erreur ou pas, le bouddhisme a comme différence fondamentale avec nos religions le fait de ne pas avoir de dieu créateur. Le bouddhisme, qui est à l’origine un mouvement dissident de l’hindouisme, a vu le jour en Inde, pour pénétrer progressivement toute l’Asie. La base du bouddhisme est que la vie est souffrance, qu’il faut tenter de remonter à l’origine de cette souffrance afin de s’en extraire. Pour cela, l’homme doit faire cesser la douleur (inhérente à cette souffrance née d’une illusion ignorante), en se libérant de ses désirs, du karma, et suivre le Noble Octuple Sentier (chemin qui mène à la cessation de la souffrance et de l’insatisfaction) préconisé par le Bouddha. Au fil du temps, plusieurs branches du bouddhisme ont vu le jour, dont le Mahayana (Grand Véhicule) qui s’est diffusé plus largement en Chine. Cette variante prône une forme plus évoluée du bouddhisme, où le salut est ouvert à tous, et où les règles disciplinaires se relâchent. D’autres écoles plus proches de la tradition tibétaine existent aussi biensûr en Chine.

Dans ce site absolument magnifique, nous entrons dans une grotte dont l’entrée est cachée derrière un temple, avec une magnifique représentation de Guanyin, déesse de la miséricorde, couchée. D’abord figure masculine, comme en Inde, Guanyin est devenu un personnage de sexe féminin en Chine et en Asie de l’Est, chose très rare dans le bouddhisme. De nombreux personnages Dharmapala sont aussi représentés, ainsi que des Dragons. Mais rappelons-le, leur aspect est aussi effrayant que leur rôle est protecteur et bienveillant.

Nous continuons ensuite notre ascension vers un superbe temple, directement construit à flanc de montagne. Ce temple, pourtant de taille normale, semble minuscule à coté des 2 énormes représentations de Bouddha, le gros et le maigre:

  • Chan Butai: le gros Bouddha rieur, symbole de générosité, et porte-bonheur car frotter son ventre apporterait abondance et chance
  • Siddhartha Gautama: le Bouddha historique, qui affiche des traits fins et réguliers, rappelant ses origines nobles. Comme il a vécu et enseigné une vie de modération, il est plutôt représenté mince

Comme toutes les représentations de Bouddha, ils affichent de longues oreilles. Historiquement, Siddhartha Gautama faisait partie d’une famille noble. Il portait donc beaucoup de bijoux, dont des boucles d’oreilles très lourdes. Quand il renonça à ses privilèges pour se tourner vers la simplicité, il retira tous ses bijoux et coupa ses longs cheveux, ne pouvant ainsi plus cacher ses oreilles avec lobes allongés. Ces lobes allongés représentent donc un symbole de renoncement, ou en quelque sorte la bonne voie. En d’autres termes, savoir tout abandonner comme bouddha pour atteindre le nirvana.

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Après cette très agréable visite, nous partons donc pour Shaxi, ville où nous passerons notre troisième nuit. A 140km de Dali, Shaxi est une petite bourgade de caractère, ancien carrefour important de la route du Thé et des Chevaux, branche de la route de la Soie. En effet, il y a 1000 ans, Shaxi devint le nœud prépondérant entre le Tibet et le Sud-Ouest de la Chine. En échange du thé du Yunnan, les Tibétains échangeaient leurs fameux chevaux aux officiels de la dynastie Song dans tout le Sud et l’Est de la Chine, pour les aider dans leur défense contre les invasions venues du Nord. La route des caravanes du thé et des chevaux naquit alors, et Shaxi devint un centre important d’échange le long de cette route.

Au milieu de montagnes et avec ses ruelles tortueuses en pavés, ses maisons en bois et torchis, et ses toits couverts d’herbes, Shaxi semble surgir d’un autre temps, avec un air de village des Alpes chinois (on n’a pas trouvé d’image plus parlante). De jour comme de nuit, Shaxi nous ravi de son charme. On remarquera notamment sur la place centrale, l’élégant théâtre avec son majestueux porche.

Ici, en plus des Bai, on retrouve également en nombre la minorité Yi. Jadis appelés Lolo par les Han (donc les chinois « pur souche ») en signe de mépris, les Yi seraient environ 8 millions en Chine, dont un peu plus de la moitié dans le Yunnan. La plupart vivent sur les hauts plateaux. Il semblerait que leur origine ferait encore débat aujourd’hui: on pense que, descendus des hautes terres de l’Est tibétain, ils se seraient retirés vers le Sud sous la pression des Chinois, occupant progressivement les régions périphériques. Eux aussi possèdent une langue qui leurs est propre, et ont aussi une écriture pictographique.

En route vers la mythique ville de Shangri-La (香格里拉市): les paysages changent, la route monte lentement mais surement (les enfants ont compté pas moins de 16 tunnels traversant les montagnes afin que la nouvelle autoroute reliant Lijiang à Shangri-la fasse son ascension de façon régulière), les montagnes verdoyantes font place à des falaises plus rudes, passé ce pont nous entrons dans l’Himalaya!

Nous passons au pied des montagnes Haba Snow Mountain (sommet à 5400m) et du Dragon de Jade (sommet à 5600m). Quand on voit ces montagnes si hautes et pourtant si peu enneigées par rapport au paysage qui entoure le Mont-Blanc, on se rappelle alors de la différence de latitude entre les deux régions, c’est bluffant.

A 3160m d’altitude et une population de 130 000 habitants, Shangri-la est le chef-lieu de la préfecture autonome tibétaine de Diqing. Shangri-la est bien loin de Lhassa, la capitale tibétaine située à 1870km, mais les Tibétains y représentent tout de même 45% de la population, donnant à la région un avant-goût de Tibet. Bien que situé au Yunnan, Shangri-La et sa région sont réellement tibétains

Le nom Shangri-La est en réalité très récent. Tout a commencé par un reportage sur la culture Naxi réalisé par l’aventurier Américain Joseph Rock pour le magazine National Geographic. En 1933, l’écrivain James Hilton s’en inspira pour son roman « Lost Horizon », dans lequel il décrit une mystérieuse région nommée Shangri-La, située aux confins du sud-ouest de la Chine, cachée dans les forêts, les montagnes, et les canyons. Comme dans un paradis terrestre, ses habitants y vivaient dans un mode écologique et pacifique, en harmonie complète avec la nature, et, moyennant l’absorption d’un élixir secret, éternellement. Ce mythe fut étendu dans le monde suite à l’adaptation de ce roman au cinéma, et des aventuriers et journalistes se lancèrent à la recherche de ce royaume caché. Biensûr, personne ne le découvrit, ce royaume n’ayant existé que dans les esprits. Mais qu’importe, de nombreuses villes voulurent s’en approprier le nom, et c’est finalement en décembre 2001 que le gouvernement central de Chine valida le fait de rebaptiser le district de Zhongdian en Shangri-la (Xianggelila).

Pendant longtemps, Shangri-La était un espèce ce Far West chinois. Gagnant en notoriété, la ville s’est ensuite beaucoup étendue, et perdant ainsi un peu de son caractère de bout du monde. La ville a toutefois gardé son noyau historique, qui a encore tout le charme d’un village de haute montagne, avec une atmosphère unique. En 2014 malheureusement, un incendie ravagea l’ancienne ville de Shangri-La. Tout a été reconstruit depuis, et à présent on y voit que du feu (c’est le cas de le dire).

Shangri-La est beaucoup plus touristique que les villes que nous avons vue jusqu’à présent. Peut-être Dali l’est tout autant, mais nous y sommes restés très peu finalement. Ici nous commençons donc à réaliser ce que sont les Chinois en vacances. Ils (ou plutôt elles) sont notamment très friands de s’habiller en tenue traditionnel du lieu où ils sont, et ensuite de se faire prendre en photo un peu partout dans la ville par un photographe professionnel (du moins qui y ressemble vu la taille des appareils photo) ou par une copine munie d’un smartphone (sans doute une question de budget), le tout dans le but assumé d’alimenter leur compte TikTok et leurs Moments WeChat. Au début nous trouvions cela amusant (même si j’ai encore beaucoup de mal à prendre les gens en photo sans demander leur accord, ce qui n’a pas trop de sens ici), mais à la longue ça devient agaçant, cette façon de faire du tourisme étant complètement artificielle, car c’est la personne qui est mise en avant, et non plus le lieu, aussi beau soit-il.

Ce business doit être très lucratif, car de nombreuses boutiques proposent ainsi des packages avec costume, maquillage, coiffure, et service photos pour quelques heures.

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Nous montons ensuite vers le temple Da Gui Shang, perché sur un tertre naturel dans la vieille ville. En haut d’un escalier orné de drapeaux de prières, une superbe vue sur la plaine de Shangri-La s’offre à nous.

Nous pouvons aussi faire tourner un moulin à prière géant, le plus grand du monde paraît-il (tout est le plus grand du monde de toutes façons en Chine), il faut être au moins six personnes pour le faire tourner. Moi je pense surtout que c’est grâce aux enfants qu’il a pu tourner 😅.

Pour ce premier soir à Shangri-La, nous avons goûté au Hot Pot de Yak, plat traditionnel de la région. C’est un peu comme notre pot au feu (ce plat doit mijoter longtemps aussi d’ailleurs), mais avec de la viande Yak. Pour accompagner cela, nous goûtons au thé façon tibétain, c’est-à-dire du thé noir avec du lait de Yak et du sucre. Même si rapidement nous commandons des bières locales, ce thé est très bon (meilleur que le lendemain en tous cas… vous allez comprendre…).

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Comme je vous le disais plus haut, Shangri-La est situé à plus de 3000m d’altitude. Ça commence à faire haut pour l’organisme, mais pour nous pas de soucis puisque l’itinéraire de notre voyage est monté progressivement en altitude. En revanche, ce n’est pas le cas de tous les touristes chinois que nous avons croisés ici, certains venant par exemple directement de Guangzhou (Canton), qui se trouve au niveau de la mer. Nous avons donc croisé beaucoup de monde dans les rues avec une petite bouteille d’oxygène pur à la main, afin d’aider l’organisme à s’acclimater plus vite. Et c’est là toute l’aberration de la gestion de la sécurité à la chinoise: tout le monde s’équipe de cette bouteille d’oxygène, mais la plupart l’utilise n’importe comment. C’est le cas par exemple de ce groupe d’enfants accompagnés par des animateurs, arrivant directement de Guangzhou, qui se sont installé à la table voisine au restaurant. L’un des enfants s’est mis à respirer en continu pendant au moins 5 minutes sa bouteille d’O2, jusqu’à ce qu’il s’écroule à table. Il a été emmené à l’hôpital illico!

En rentrant vers notre hôtel (ou plutôt notre toute mignonne auberge tibétaine), nous avons pu assister aux danses spontanées des locaux sur la place de la vieille ville.

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Le lendemain, nous partons le long des rives de la réserve naturelle du lac Napa. Il s’agit d’un lac saisonnier, formé chaque été quand la neige accumulée sur les hauteurs alentours fond et s’écoule dans les rivières Naqu et Naizi pour former cet immense lac. À l’arrivée de la saison sèche, le niveau du lac diminue alors peu à peu et prend la forme d’un grand marais. Au mois de septembre, le lac Napa devient un habitat pour de nombreuses espèces d’oiseaux migrateurs, particulièrement pour la grue à cou noir qui est l’espèce la plus présente. On y trouve l’une des douze espèces de grues les plus rares au monde et qui a été reconnue comme appartenant aux Animaux de Protection Nationale.

Aucun doute, nous sommes bien à la saison haute pour le lac, certaines portions de la route qui le contourne étant complètement inondées. Mais aucun problème, les voitures et mêmes les scooters y passent. La voiture de Jeff va toutefois s’en souvenir, une tôle de protection du carter ayant été tordue par la force de l’eau, la faisant alors racler sur la route avec un boucan de tous les diables.

Mais j’en connais un qui était tout content car il avait enfin l’occasion de bricoler un peu

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Nous avons ensuite eu la chance de manger à la table d’une famille tibétaine. Ce repas est essentiellement à base de Yak (lait, fromage et viande), et de tsampa, qui est farine d’orge grillée, que l’on consomme au même titre que le riz.

Savez-vous ce qu’est ce breuvage jaune en bas de la photo? C’est le fameux thé au beurre de Yak. Notre hôte versa au préalable du thé noir bien chaud dans ce tube en bois, dans lequel il devait il y avoir du beurre au fond. Elle le mélangea vivement pendant 2 minutes, puis nous servit nos deux tasses. Nous aurions dû nous méfier quand Jeff a décliné qu’on lui en serve, et pensant avoir le même thé que la veille, nous en avons pris une bonne grosse gorgée… Ben c’est comme boire du beurre liquide… c’est pô bon.

Les maisons traditionnelles ici sont massives, de grandes et hautes pièces en bois organisées autour de ce qui devait être une grange. Ces granges étaient pour la plupart vitrées, ce qui faisait rentrer beaucoup de lumière, et cela devait aussi faire effet de serre pour chauffer l’intérieur en hiver.

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Nous reprenons ensuite la route, avec la voiture rafistolée de Jeff, vers le somptueux temple de Songzalin, la plus grande (et plus belle) lamaserie de la région. Ainsi nommé « petit Potala » (Potala signifiant « montagne de Bouddha ») de par son apparence assez similaire au palais du dalai-lama à Lhassa, il s’agit d’un monastère traditionnel bouddhiste construit en 1679, et rénové plusieurs fois depuis. Aujourd’hui, environ 700 moines et lamas y vivent (dans les habitations en contre-bas du temple). Plus précisément, il s’agit d’une des 13 lamaseries de la secte de Bonnets jaunes.

Le lac Lamuyangcuo qui était en contre-bas du monastère est à présent complètement asséché, il ne nous fut donc pas possible de prendre la traditionnelle photo de loin du monastère, avec son image se reflétant sur l’eau du lac.

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Il nous faut alors gravir un long et raide escalier (encore des marches!), nous permettant d’arriver aux 3 bâtiments principaux.

Nous pouvons alors déambuler dans une succession de salles (toujours dans le sens des aiguilles d’une montre!), impressionnantes de par leur grandeur, leurs couleurs vives, la taille des statues de bouddhas qui y trônent, et surtout de par l’atmosphère de sérénité qui s’en dégage. Nous ne pouvons évidemment pas faire de photos à l’intérieur, il vous faudra donc l’imaginer!

On l’appelle aussi le « temple de la tuile d’or », et pour cause!

Je crois que j’ai déjà trop longuement écrit, je m’arrête là pour aujourd’hui. Notre voyage était biensûr bien plus long que ça, et tout aussi génial. Je reviens très bientôt avec la suite!