Je me lance enfin dans l’écriture d’un article sur la Cité Interdite. C’est si immense, son Histoire est si complexe, que j’ai mis du temps à oser m’y mettre. Je l’ai déjà visitée 4 fois, mais j’ai encore l’impression que de n’y voir que des murs, que de ne palper du bout des doigts qu’une infime partie de ce pan de l’Histoire de Chine 🇨🇳. Nous allons donc nous y balader, y parler un peu architecture, un peu d’histoire, partager des impressions, ressentir la grandeur du lieu. En effet, ici pas d’inscription, pas de panneau explicatif, juste des audio-guides décrivant de façon détaillée l’intérieur des bâtiments… auxquels nous n’avons pas accès! Logique 😅
Pour ceux qui me lisent et qui n’ont pas encore eu la chance de venir en Chine 🧳✈️🇨🇳, je vous recommande de regarder le film 🎬 « le Dernier Empereur », réalisé par Bernardo Bertolucci en 1987, et tourné dans la Cité Interdite 🎥. L’histoire est certes romancée, mais elle relate de façon assez fidèle la vie (tragique) de Puyi 溥仪, et les rites très protocolaires de la Cité Interdite 🚫. Même Constance, qui se plaint que nous l’emmenons trop dans nos visites culturelles, réclame de retourner voir la Cité Interdite depuis qu’elle a vu le film 👧🏼.
Là, il est très facile de me perdre dans des recherches et explications interminables, mais tout autant passionnantes, sur l’Histoire de Chine. Je vais essayer d’éviter de m’y perdre (sinon ce n’est pas 3 mois de retard sur mon blog que je vais prendre, mais 3 ans au minimum 😇). Je vais donc tâcher de rester synthétique, peut-être qu’un jour je me lancerai dans une écriture plus approfondie de ce pan de l’Histoire de Chine 📚. Ici, mon objectif sera essentiellement de vous offrir une visite virtuelle de la Cité Interdite.
Durant 5 siècles, la Cité Interdite (appelée gùgōng 故宫 par les Chinois, ce qui signifie « Palais Ancien ») fut le centre de la politique chinoise, voir du monde selon la pensée chinoise 🌏🇨🇳. Sa construction, qui ne prit que 14 ans, fut ordonnée au début du XVième siècle par l’empereur Yongle 永乐帝 , troisième empereur, dont la légitimité est par ailleurs discutable, de la dynastie Ming. Ainsi, Yongle déplaça la capitale de l’Empire chinois de Nanjing à Pékin, afin de se rapprocher des frontières du Nord, et ainsi mieux les contrôler face à l’envahisseur Mongole. La Cité Interdite est en réalité le troisième palais impérial à avoir été construit à Pékin. Le premier l’a été pendant la dynastie Jin (1115-1234), le second au cours de la dynastie des Yuan (1271-1368), et la Cité Interdite a donc été construite pendant la dynastie des Ming. Aux Ming succédèrent les Qing, dynastie ayant régné de 1644 jusqu’en 1912, année de l’abdication de Pu Yi lors de la création de la République de Chine. Sauf Pu Yi qui y était pour ainsi dire prisonnier , les Empereurs ne vivaient pas toute l’année dans la Cité Interdite. L’été, pour fuir la chaleur étouffante de Pékin 🥵, les Empereurs résidaient à Chengde, résidence d’été située dans la province du Hebei, à 100km au nord de Pékin. Nous en parlerons dans un futur article.
On parle donc de Cité Interdite, car interdite au peuple, ou encore de Gùgōng (nous l’avons vu, cela signifie ancien palais). Mais le nom complet serait « Cité Pourpre Interdite », en référence à l’étoile nommée Zǐwēi Xīng (紫微星, la « petite étoile violette » ⭐️🟣) dans l’astronomie chinoise, c’est-à-dire l’étoile polaire de l’astronomie occidentale. En effet, comme le palais impérial se trouve au centre de Pékin et représentait le centre administratif de l’État 🎯, on lui donna un nom évoquant l’étoile qui est au centre de la rotation du ciel. Tout est toujours symbolique et imagé ici.
C’est donc parti pour la visite virtuelle de la Cité Interdite. L’architecture de la Cité Interdite est très imposante: il s’agit d’un rectangle de 960m x 750m, autour duquel il est difficile de circuler, car des policiers montent la gardent tout le long, et veillent à ce que l’on ne s’attarde pas trop longtemps autour. Une de nos premières tentatives d’approche en décembre 2021 a d’ailleurs été compliquée car nous ignorions à l’époque que les taxis ne pouvaient s’y arrêter. Nous avons donc eu du mal à rentrer. Autrefois, il était interdit à Pékin d’ériger des constructions plus hautes que la Cité Interdite, sauf le Temple du Ciel plus au Sud. Cela amplifie l’effet massif du lieu.
Nous arrivons donc par la « Porte de la Gloire Orientale », où nous laissons nos scooters électriques 🛵, et finissons le tour à pied entre l’extérieur du mur d’enceinte et les douves, pour rentrer par la Porte du Midi, elle aussi bien gardée! 💂♀️




Comme je vous le disais, la Cité Interdite je l’ai déjà visitée 4x: 2x pendant le COVID 😷 (dont le 10 décembre alors que le COVID a subitement fait partie du passé, tout le monde était alors terré chez soi, soit de peur d’attraper le virus, soit car déjà malade), et 2x dans le monde post-pandémie 🥳. C’est très certainement un des rares points qui me fait regretter l’époque 2022, car nous avons eu la chance de voir la Cité Interdite pratiquement vide. Cela donne à la visite du lieu une saveur très particulière, que nous nous ne réalisons que maintenant au milieu des foules de visiteurs. Par conséquent, ne soyez pas surpris de voir des photos prises à différents moments de l’année 📷 ❄️☀️.
Après un minutieux contrôle de notre identité, nous passons la Porte du Midi, pour entrer dans la Cour de la Rivière aux eaux d’or, avec au fond l’imposante Porte de l’Harmonie suprême.


La forme sinueuse de cette rivière évoque la forme du Dragon, symbole de l’Empereur. La dragon chinois 🐉 n’a d’ailleurs rien à voir avec notre dragon volant et effrayant cracheur de feu en Occident. Le dragon chinois ne vole pas, il représente la force de la nature, et la puissance impériale.
Cette cour monumentale (et c’est loin d’être la seule), nous montre que la Cité Interdite s’élève sur d’énormes fondations en pierre blanche. Ces blocs de roche massive, dont le poids peut atteindre plus de 200 tonnes, ont été autrefois extraits des carrières de Fangshan, situés à 70km au sud de Pékin, et transportés jusqu’au site de construction. Comment ont-ils réalisé cet exploit? En les faisant glisser sur les cours d’eau gelés 🧊, cela pouvant parfois prendre plusieurs hivers pour tout transporter.
Nous pouvons d’ailleurs ici voir déjà les symboliques de la Cité Interdites. Pour cela, faisons une courte introduction à la numérologie chinoise:
- le chiffre 9️⃣ (九 jiǔ) est considéré comme un bon nombre dans la culture chinoise car il sonne comme et ressemble au mot « durable » (久 jiǔ). C’était ainsi le chiffre symbole de l’Empereur sous la dynastie Ming, et c’est pour cette raison que la cité interdite compterait 9999 pièces (en réalité, elle en compterait un peu moins de 9000). 9999 est aussi le dernier nombre avant 10 000, représentant une limite de ce qui est dénombrable. Au-delà on entre dans le domaine du divin. 9️⃣ est aussi le plus grand nombre impair, tandis que 5️⃣ se trouve en plein milieu des nombres impairs. Ainsi, dans la Chine ancienne les chiffres 9️⃣ et 5️⃣ symbolisaient la suprématie de l’empereur
- le chiffre 3️⃣ est aussi très présent, celui-ci représentant l’équilibre, et le début de tout (si je me souviens bien, sur ce point j’ai un doute)
Ces chiffres sont donc très souvent présents dans la Cité Interdite, tout comme d’autres symboles réservés uniquement à l’Empereur:
- 9 colonnes ou 9 intervalles entre les colonnes, ou parfois 5, ou parfois 3.
- 9 animaux mythiques sur les tuiles des toits ou 9 intervalles entre eux (ou parfois 5, ou parfois 3). Ce qui est intéressant de noter ici, c’est l’entrelacement du symbolisme et du rôle architectural. En effet, ces animaux (dont les représentations sont aussi très symboliques, mais je n’irai pas dans ce détail ici) sont des éléments architecturaux lourds qui favorisent le maintien en place du toit, c’est sans doute le rôle initial de ces représentations
- les toits avec des tuiles vernissées jaunes, couleur réservée à l’empereur uniquement 🟡. Dans la culture chinoise, la couleur jaune étant associée au respect.
- On trouve aussi beaucoup de rouge pourpre 🔴🟣, nous l’avons vu plus haut, cette couleur étant associée à l’étoile polaire, cette étoile qui ne semble jamais bouger. C’est donc parfait pour cet environnement ayant si besoin de symétrie.
- 9 rangées de 9 clous sur les portes🚪
- 3 niveaux de terrasses pour les bâtiments les plus importants (personne d’autre en Chine ne pouvait oser avoir plus de 2 marches pour rentrer chez lui!)
- des dragons, représentés un peu partout 🐉
Avant d’aller plus loin, laissez-moi vous montrer son plan (image trouvée sur voyageschine.com), là aussi tout est question de symbolismes

L’architecture de la Cité respecte à la perfection des règles protocolaires très strictes. D’ailleurs, nous avons commencé à le voir, il n’y a pas d’arbre, pas de verdure pour se rafraîchir un moment à l’ombre, mais de grandes étendues minérales. Cela est un peu moins vrai dans la partie nord de la Cité Interdite, ou dite Intérieure, la partie privée de la Cité Interdite (par opposition à la zone au sud, dite extérieure, où s’exerçait la politique impériale). Le palais est, nous l’avons vu, au centre de la ville de Pékin, inscrit dans un rectangle dont le centre est le palais de l’Harmonie Suprême, le palais de l’Empereur, où celui-ci était couronné, où il recevait les hauts fonctionnaires chinois et les délégations étrangères. Coupée en deux par une ligne de symétrie Nord-Sud, reprenant le même axe qui était autrefois déjà cela de la ville de Pékin au temps des dynasties mongoles, la Cité Interdite toute entière est vouée à la logique mathématique. Les pavillons sont construits suivants des règles géométriques les plus parfaites possibles, par nombre pair le plus souvent. Le palais n’accueille aucune courbe, à l’exception de la rivière aux eaux d’or, tout est tracé de façon rectiligne, mettant en avant l’ordre, la régularité, les qualités qui devaient être celles de l’empereur.
De façon plus pragmatique on constate que l’empereur, fils du Ciel 🔵, réside dans le palais de la Pureté Céleste. Son épouse, associée à la Terre 🌏, était au palais de la Tranquillité Terrestre. Dans la cour intérieure les portes latérales sont dédiées à la Lune 🌝 et au Soleil 🌞, ce qui fait qu’on retrouve dans cette disposition les 4 éléments de l’Univers, selon la cosmologie chinoise. Cette disposition ainsi favorisait la stabilité du pouvoir. Ce lieu est donc imposant, inspirant un immense respect, sentiment appelant la comparaison avec Versailles.
Toutefois, les plus tatillons d’entre-vous auront remarqués que cette symétrie n’est pas toujours exactement respectée sur le plan. La Cité Interdite a effectivement beaucoup évolué au cours de son histoire, les empereurs apportant leur touche personnelle, sans pour autant détruire ce qui était là avant, afin de garantir une certaine forme d’unité de l’Empire, pour rassembler tous les peuples, y compris les partisans des précédents Empereurs. Mais aussi car la Cité Interdite a subi de nombreux incendies au cours de son histoire. En effet, les bâtiments sont conçus majoritairement en bois 🪵, du bois précieux venant du Yunnan. On imagine aisément qu’un lieu si immense n’a pas toutes ses pièces occupées toute l’année, et les bâtiments étant chauffés par un système de chauffage au sol, pas toujours bien entretenu pour les bâtiments les moins usités, ils étaient régulièrement ravagés par les flammes. Un des rôles de la rivière aux eaux d’or étaient d’ailleurs de servir de réserve d’eau pour éteindre les feux 💦🔥!
Reprenons notre visite, avec un petit retour en arrière. Avec toutes ces contraintes symboliques sur l’architecture du palais, cela laisse peu de liberté pour faire de l’esthétisme… sauf dans les angles, comme on peut le voir pour cette tour d’angle que nous apercevons depuis l’extérieur, au sud-est des remparts. Ces dougongs, emboîtement de supports en bois très typique de l’architecture chinoise, sont aussi ici un véritable ornement. Il faut noter que ce type de construction est très robuste vis-à-vis des tremblements de terre, la région pékinoise s’étendant sur une zone sismique.

Reprenons notre visite virtuelle là où nous l’avions laissée:

En passant par là, on ne peut rester indifférent devant les deux magnifiques shī 獅, ces 2 lions gardiens impériaux 🦁💂♀️, montant la garde devant tous les temples et palais chinois, et biensûr la Cité Interdite ni fait pas exception. Sur l’image ci-dessous il s’agit d’un mâle, reconnaissable à la boule de soie qu’il maintient sous sa patte. La femelle a quant à elle un petit lionceau couché sur le dos.
Nous passons ensuite de l’autre côté de la Porte, et arrivons dans une immense cour (qui mesure tout de même la bagatelle de 30 000 mètres carrés), où trône le Palais de l’Harmonie Suprême (en chinois Taihedian 太和殿), le palais principal de l’Empereur 🏰. Il s’agit par ailleurs du bâtiment en bois le plus grand de son époque à avoir survécu en Chine, et du plus haut de la Cité interdite. Il repose sur une base en marbre à trois étages, toujours pour une question de symbolique!
L’Empereur y recevait les hauts fonctionnaires, mais surtout les délégations étrangères. Toutes les grandes cérémonies avaient lieux ici, en particulier lors des avènements des nouveaux empereurs. On y célébrait aussi les anniversaires 🎂, les mariages 👰🏻♀️, et toute autre occasion comme la célébration du solstice d’hiver ❄️, le nouvel an chinois 🧧 et les déclarations de guerre ⚔️.
La terrasse en marbre y est décorée luxueusement de grues 🦩 et de tortues de bronze 🐢, symboles de la domination et de la longévité éternelle ∞. On trouve aussi, devant le bâtiment, deux cuves de bronze doré, servant à stocker l’eau 💧 en cas d’incendie🧯.
Sur cette terrasse, on trouve aussi un cadran solaire 🕔☀️ (on en trouve d’ailleurs plusieurs au sein de la Cité Interdite, le second exemple ci-dessous est visible dans la zone privée de la Cité Interdite). Il a ici un double rôle: à la fois symbolique puisqu’il représentait la capacité de l’empereur à être mesuré dans ses jugements ⚖️, mais aussi pratique car la vie protocolaire de la Cité nécessitait de toujours bien respecter le calendrier 🗓.
Il nous est par contre impossible de voir comment est l’intérieur du bâtiment, des barrières nous empêchant de coller la tête aux fenêtres pour y apercevoir probablement un trône richement décoré.
Passons à présent de l’autre côté du Palais de l’Harmonie Suprême.

Il fait en fait partie d’un ensemble de 3 pavillons principaux, avec le Palais de l’Harmonie Parfaite (ou Palais de l’Harmonie du Milieu, en chinois Zhonghedian 中和殿), et la salle de l’Harmonie Préservée (en chinois Baohedian 保和殿).


Ces trois pavillons sont connus sous le nom des « Trois grandes salles de la cour extérieure », et sont alignés le long de l’axe de symétrie Nord-Sud de la Cité 🚫. A vol d’oiseau les trois palais sont disposés de façon à plaire aux Dieux, sensés regarder le palais de haut. Leurs formes différentes brisent la monotonie architecturale du lieu. Le Palais de l’Harmonie Parfaite, qui est aussi le plus petit des trois pavillons, dispose aussi d’un toit unique. Ce pavillon était le lieu de repos 😴 de l’empereur quand il était en train d’organiser les cérémonies qui avaient lieu dans la salle de l’harmonie suprême. C’était un peu un salon d’attente, avant de recevoir ses ministres ou les fonctionnaires.
Le dernier pavillon de la cour extérieure est donc la salle de l’Harmonie Préservée. Les empereurs Ming s’en servaient pour changer de vêtements lors des cérémonies rituelles. Cette fonction changea ensuite sous la dynastie Qing, puisqu’il était devenu d’usage que les banquets impériaux s’y tiennent 🎉. Chaque année, à la veille du réveillon du Nouvel An Chinois, un banquet s’y tenait pour honorer les gouverneurs de provinces, les princes mongols, et quelques fonctionnaires civils et militaires. En 1789, au milieu de la dynastie des Qing, l’empereur Qianlong décida que la phase finale de l’examen national obligatoire, celui qui permit de lettrer une grande partie de la population chinoise, se tiendrait dans ce pavillon 📝🥇. Il s’agissait de l’équivalent du plus haut niveau du système des examens impériaux, à l’échelle nationale, et l’empereur honorait ainsi les dix premiers candidats retenus par la lecture des journaux qu’ils avaient soumis.
On croise ici du drôle de monde, surtout quand la Cité est complètement vide de visiteurs du fait de la pandémie en 2022 😷:


Et biensûr, comme dans tous lieux touristiques en Chine, nous retrouvons toujours ces personnes en costume traditionnel, pour une immersion au temps des Empereurs, le temps de quelques heures de shooting photo 📷.
Derrière la salle de l’Harmonie Préservée, avant de rentrer dans la cour Intérieure, zone privée réservée à l’usage personnel de l’Empereur, dans arrivons dans cette cour, qui donne l’impression de n’avoir pas de rôle particulier. Et pourtant, c’est dans ce petit bâtiment, qui ne ressemble à rien de bien important, que se jouait toute la politique de l’Empire du milieu. C’était un peu le bureau de l’Empereur, et la salle de réunion avec ses ministres 👨🏻💻 🤝.

Je crois d’ailleurs que de l’autre côté du mur, qui sépare la cour Intérieure de l’Extérieure, un des Empereurs y avait installé sa garçonnière. Ainsi, pas besoin de beaucoup se déplacer au quotidien 🚶🏻♂️😄.
Si vous regardez bien la photo précédente, vous pouvez apercevoir un toit un peu différent des autres. En zoomant un peu plus (photo ci-dessous), on voit effectivement un toit qui sort complètement du protocole de la cour extérieure, beaucoup plus officielle. Dans la partie privée de la Cité Interdite, il était permis quelques fantaisies architecturales. Il s’agit en fait du Pavillon Yuhua, un temple Bouddhiste Tibétain, témoin de l’apogée de cette religion en Chine.

Pour se rendre de la cour extérieure à l’intérieure, on passe par la Porte de la Pureté Céleste (Qianqingmen), qui sert d’entrée au domaine privé de l’Empereur 🚫. A l’entrée de cette porte on peut voir deux magnifiques lions en bronze 🦁, comme nous l’avons déjà vu précédemment. A l’origine, ils avaient pour rôle d’empêcher les femmes d’entrer dans la cour extérieure (où se déroulaient les affaires de l’État, interdites aux femmes) et aux courtisans d’entrer dans la cour intérieure (qui était le domaine privé de l’Empereur). Ils étaient un peu les cerbères de la Cité Interdite.

Derrière la porte de la Pureté Céleste, on arrive sur une cour de taille plus modeste. L’élément principal de cette cour est le Palais de la Pureté céleste (Qianqinggong en chinois). C’était tout simplement la chambre 🛌 des Empereurs de la Cité Interdite, du moins jusqu’à la dynastie des Qing. Ensuite, ce Palais servit de cabinet de travail ou de salle d’audience.

La partie privée, où l’Empereur résidait avec sa famille, sa cour, ses eunuques (à une certaine époque il y en aurait eu près de 8000!), offre un décor très différent: une succession de petits pavillons, de grandes allées faites de murs hauts séparant les différentes parcelles, et surtout le jardin impérial 🌳 (oui, ici les arbres sont permis aussi).
J’aime me perdre en déambulant dans ces allées, et jouer à photographier les portes. Cela offre de jolies perspectives, et ça donne l’impression de faire un voyage à l’époque des Empereurs de Chine.
Autre lieu que je trouve très agréable (ou trouvais, car c’est une toute autre saveur quand il est vide de visiteurs), c’est le jardin impérial 🌳🪨🌺. Il correspond à la plus petite des zones du palais, composé d’une succession de jardins et de pavillons de taille modeste (il s’agirait même de kiosques). Il est situé tout au Nord de la cité interdite, face à la porte de la prouesse divine qui garde l’entrée Nord. Ce fut un refuge privé pour la famille impériale et c’est peut-être l’exemple le plus typique de la conception chinoise d’un jardin. Ici, les arbres aux formes biscornues, les rochers tout aussi peu conventionnels et les massifs de fleurs sont agencés dans une harmonie parfaite.

Toujours dans la partie privée de la Cité Interdite, nous pouvons visiter, moyennant un ticket supplémentaire, le Palais de Qianlong, regroupant un ensemble de bâtiments indépendants du reste du palais. Cet ensemble, entouré par de hauts murs d’enceinte rouge, n’est pas une construction d’origine. Il s’agit d’un ajout ordonné par l’empereur Qianlong (1736-1795), de la dynastie Qing, en vue de sa retraite. Une fois qu’il aurait démissionné, il souhaitait s’y retirer paisiblement et y passer ses vieux jours. Il démissionna effectivement de ses fonctions à ses 60 ans de règne 👴🏻, par respect pour son grand-père, l’empereur Kangxi, qui régna pendant 61 ans. Il décida toutefois de conserver un œil 👀 sur les affaires de l’Etat sous le prétexte de donner un coup de main, et donc en pratique il conserva le pouvoir. Il ne vécut donc jamais dans cette partie qu’il s’était faite construire, où il n’alla que parfois, dans son temps libre.
Ici, on peut notamment trouver un théâtre 🎭, appelé le Pavillon des Sons Agréables (Changyinge en chinois). Une de ses particularités est d’avoir une scène à 3 niveaux.
Contrairement au reste de la Cité Interdite, nous avons pu ici rentrer dans certains bâtiments. Rappelez-vous, je vous disais plus haut que la Cité Interdite était essentiellement faite en bois. L’intérieur ici était donc complètement en bois, non vernis cette fois, ce qui donnait une atmosphère assez sombre. Les cloisons étaient faites pour être modulables, et j’ai un peu honte mais je ne me souviens plus des explications reçues sur cet intérieur. Il va falloir que j’y retourne!
Est-ce que vous vous rappelez du Murs des 9 dragons 🐉 vu dans le parc de Beihai Beihai et ses neuf Dragons (北海公园)? Il existe 3 de ces murs en tuiles vernissées en Chine, le mieux conservé étant celui visible dans le Palais de Qianlong, dans la Cité Interdite. Le chiffre 9️⃣, des dragons, toujours une histoire de symbolisme!
Il est dit que le centre du troisième dragon (blanc) a été brisé lors de la cuisson dans le four, ce qui était la mort assurée pour les artistes compromis dans ce travail ☠️. Malgré le risque, un charpentier s’était porté volontaire pour remplacer l’original avec du bois et fit la sculpture et la peinture pendant la nuit. Grâce à ses talents et son courage, il sauva ainsi les sculpteurs du châtiment qui les attendait. De nos jours, on peut encore trouver des traces de cette réparation sur le troisième dragon. Zut, j’ai raté ce détail! Pour ça aussi, il faudra que j’y retourne.
De nos jours, certains de ces pavillons sont reconvertis en halls d’expositions, où l’on peut admirer des trésors impériaux de la civilisation chinoise ancienne et de très nombreuses œuvres d’art chinois : peintures, bronzes, céramiques, instruments de musique, laques. En voici un exemple (j’avoue de pas en être une grande passionnée, je ne m’y suis donc pas trop attardée).

Avant de ressortir de la Cité Interdite, nous passons toujours devant un autre Palais, tout à fait étonnant du fait de son architecture plutôt de style occidental, voir même italien.
Il s’agit du Palais du Bonheur Prolongé (Yanxi gong). Au XIXième siècle, le palais originel fut détruit par un incendie. Il resta alors en ruine jusqu’en 1909, date où le gouvernement des Qing lança sa reconstruction dans un style occidental (la terrible impératrice douairière Cixi étant décédée, l’époque était propice à un élan d’ouverture vers l’Occident), avec un bassin l’entourant. Faute de budget, il ne fut jamais achevé, le bassin qui devait être rempli autour resta vide, on ne peut donc qu’imaginer ce que serait la visite permettant de voir les poissons 🐟 nager à travers des parois de verre. A présent les sculptures en marbre permettent d’imaginer ce qu’aurait pu être ce système.

Pour sortir de la Cité Interdite, nous passons habituellement par les annexes extérieures orientales, chemin très agréable de par la verdure et le petit canal qui y serpente.
On peut apercevoir au fond ce grand bâtiment au toit de tuiles noires. Il s’agit du belvédère de la profondeur littéraire (Wenyuan ge en chinois, 文渊阁), ou plus simplement la bibliothèque impériale 📚. La couleur noire symbolisant l’eau 💦, ce toit noir (et non jaune!) protégeait les livres impériaux des risques d’incendie 👩🏻🚒.

Pour terminer notre visite virtuelle de la Cité Interdite, je vous propose ce diaporama de photos prises en 1890 ou 1900, en regard des mêmes lieux de nos jours. Enjoy!









































































